À quelques heures de l'échéance fixée par Shell pour fermer sa raffinerie de Montréal, un consortium non identifié a manifesté officiellement son intention d'acheter la raffinerie et de poursuivre ses activités.

Ce qu'offre le consortium est toutefois bien loin des attentes de Shell, qui s'était engagée à discuter avec tout acheteur sérieux. «C'est très loin de ce qu'on considère acceptable», a commenté le porte-parole de la pétrolière, Larry Lalonde.

Selon lui, Shell prendra quand même le temps d'examiner la proposition, mais ça devrait se faire très rapidement. «Nous n'avons pas l'intention de créer de faux espoirs», a-t-il dit, en ajoutant que la décision sera prise dans les prochains jours.

Une téléconférence doit réunir aujourd'hui Shell et les acheteurs potentiels. Officiellement, ils ont jusqu'à 17 h pour s'entendre. Il n'est pas exclu non plus qu'une offre soit déposée par les deux autres entreprises qui se sont montrées intéressées.

Mais il faudrait un miracle pour sauver la raffinerie. Tout indique que Shell ira de l'avant avec son projet de cesser ses activités de raffinage à Montréal, pour ne conserver que des installations de stockage de produits raffinés.

La nervosité est à son comble chez les 500 employés de la raffinerie, qui se sont réunis hier en assemblée générale pour apprendre ces nouveaux développements.

«Les gens sont anxieux de voir ce qui va arriver. C'est leur pain et leur beurre», a confié le président du syndicat, Jean-Claude Rocheleau. Quoi qu'il arrive, le syndicat pourra dire qu'il a fait son possible pour sauver les emplois, selon le porte-parole syndical.

Sous la pression syndicale, un comité piloté par l'ancien sénateur Michael Fortier a contacté une centaine d'acheteurs éventuels partout dans le monde afin de les intéresser à la raffinerie délaissée par Shell.

Contre toute attente, parce que Shell avait déjà prospecté le marché pendant des mois auparavant, trois entreprises intéressées ont signé des ententes de confidentialité avec Shell pour avoir accès aux états financiers de la raffinerie.

Même si l'avenir de la raffinerie ne tient qu'à un fil, le maire de Montréal, Gérald Tremblay, ne veut pas lâcher prise. «On va continuer de demander à Shell, si on a des partenaires qui sont intéressés très sérieusement, de nous donner les délais nécessaires», a-t-il dit hier, en soulignant que la raffinerie fait travailler entre 3000 et 3500 personnes à Montréal.

Shell a déjà un plan précis de démantèlement de ses installations. Ça devrait commencer dans les prochains jours avec la fermeture de l'unité de fabrication des huiles lubrifiantes et se poursuivre tout l'été. La raffinerie devrait recevoir sa dernière livraison de pétrole brut en août et cesser ses activités en septembre.

Plusieurs employés de la raffinerie, surtout parmi les plus jeunes, ont déjà quitté l'entreprise parce qu'ils ne croyaient pas qu'un acheteur se manifesterait.

Partout dans le monde, les grandes pétrolières intégrées mettent en vente leurs activités de raffinage, dont les perspectives sont incertaines, pour concentrer plus de ressources dans l'exploration et la production du pétrole.

Plusieurs raffineries ont cessé leurs activités en Amérique du Nord et en Europe et les nouveaux investissements dans le raffinage vont dans les pays en développement, comme la Chine et l'Inde.

La raffinerie de Shell à Montréal a 75 ans et, comme toutes les installations du genre, elle a besoin d'investissements pour rester concurrentielle et conforme aux règles environnementales.

Sa fermeture pourrait entraîner celle de la seule autre raffinerie de Montréal, Suncor (Petro-Canada), avec qui elle partage les coûts d'approvisionnement en brut par le pipeline de Portland.

D'autres petites entreprises, comme Marsulex, qui utilise le souffre généré par les activités de raffinage, seraient aussi en péril.