Avoir un enfant change une vie. Il arrive que ça change une carrière aussi! Entre une tétée et les changements de couches, certaines femmes profitent de cette pause professionnelle pour suivre une formation, mettre leur curriculum vitae à jour ou rédiger un plan d'affaires.

Se lancer en affaires, Audrey Miller en rêvait depuis longtemps sans oser le faire. Chargée de projet dans une entreprise spécialisée dans le matériel pédagogique numérique, elle n'avait toutefois pas l'intention de quitter son poste à la naissance de son petit Raphaël, qui a aujourd'hui 1 an. «Il y a eu une restructuration de l'entreprise et le défi qu'on me proposait ne me convenait pas vraiment. J'ai senti que c'était le moment de me lancer», explique-t-elle. La jeune mère a donc mis à profit ses dernières semaines de congé pour peaufiner son projet et devenir officiellement conceptrice, rédactrice et formatrice en technologies éducatives à son compte.

Pour plusieurs femmes, le retour au travail après plusieurs mois de congé crée de l'anxiété. «Parfois, elles doivent revenir dans une équipe qu'elles n'aiment pas, leur patron a changé ou la dynamique au travail n'est plus la même. Cette anxiété va conditionner le choix de carrière, indique Martin Lauzier, docteur en psychologie du travail et professeur à l'Université du Québec en Outaouais. Devenir mère est aussi un moment charnière qui permet une introspection et peut amener certaines personnes à revoir leur parcours professionnel. Ça peut être très révélateur.»

Le fait d'avoir décroché du travail et de devoir y replonger peut aussi être stressant pour plusieurs mamans, selon lui. Il arrive qu'elles ne se sentent plus à la hauteur. «Comme je travaille en technologies de l'information, mes relations avec les personnes de mon réseau se font beaucoup sur le web. Ça m'a aidée à ne pas me sentir trop déconnectée au terme de mon congé», dit Audrey Miller.

Conciliation travail-famille

Conseillère en orientation, Nathalie Gauthier constate que la conciliation travail-famille est aussi à la source de nombreux changements de carrière chez les mères. «Quand elles doivent travailler le soir, les fins de semaine ou encore sur appel, ça cause beaucoup de difficultés. Souvent, elles n'ont pas l'aide nécessaire et doivent changer d'emploi ou carrément de métier.» Par contre, elle propose d'envisager d'abord avec l'employeur la possibilité de modifier leurs conditions de travail ou de changer de poste au sein de l'organisation.

Avant d'entreprendre un grand changement, elle conseille également de prendre le temps de bien analyser la situation. Rédiger sa lettre de démission sur le coup du baby blues n'est pas une bonne idée. Un bilan des parcours scolaire et professionnel s'impose habituellement. Ensuite, la personne peut regarder les différentes options qui s'offrent à elle. Pour y voir clair, Mme Gauthier suggère fortement de consulter des organismes en employabilité ou en entrepreneuriat.

Si les employeurs aiment habituellement savoir rapidement qu'une travailleuse ne reviendra pas au terme de son congé de maternité, le moment de l'annonce dépend de la situation de chacune. Le Code civil du Québec prévoit toutefois qu'un délai raisonnable doit être donné à l'employeur dans le cas d'une démission. La longueur de celui-ci dépend notamment de la nature de l'emploi. Mme Miller, elle, a décidé de jouer franc-jeu avec son ex-patron. Sa franchise l'a bien servie puisqu'il est devenu son client!