La Cour suprême des États-Unis va examiner mardi la validité de la plus grosse plainte en nom collectif de l'histoire qui réunit 1,5 million d'employées et anciennes employées accusant le distributeur américain Walmart (WMT) de les traiter moins bien que leurs collègues masculins.

Si la plus haute juridiction des États-Unis donne d'ici fin juin son feu vert à l'examen de cette plainte, il s'agira d'un précédent inédit dans la lutte contre les discriminations au travail.

Si à l'inverse elle se range au côté du premier employeur privé du pays qui conteste la possibilité que toutes ses employées depuis 1998 puissent le poursuivre sur les mêmes chefs, elle risque de condamner toute autre tentative de poursuite collective pour discrimination, même par des groupes plus restreints.

C'est donc devant une salle comble que la Cour devrait entendre les arguments des parties non sur le fond, mais sur la seule question de la taille de la plainte dans le dossier le plus attendu de l'année.

A l'origine de l'affaire, sept employées de Walmart ont porté plainte il y a dix ans pour discrimination, assurant «être moins payées que les hommes à des postes comparables, en dépit d'une meilleure notation et d'une plus grande ancienneté».

«Les statistiques sur les salaires des employés et des employées montrent de telles différences qu'il est très peu probable que ce soit un hasard», estiment les plaignantes.

Elles réclament le réajustement rétroactif de leurs salaires, mais aussi une amende pour le préjudice subi et bien sûr un changement de la politique salariale de l'entreprise.

En 2007, en première instance, un juge fédéral de Californie les a autorisées à représenter en leur nom environ 1,5 million d'employés et anciennes employées. La décision a été confirmée en avril par la cour d'appel de San Francisco dans une décision très serrée (6 voix contre 5), que Walmart conteste aujourd'hui devant la Cour suprême.

Il s'agit de «la plainte en nom collectif contre un employeur la plus vaste de l'histoire par plusieurs degrés de magnitude», estime le numéro un mondial de la distribution dans sa requête, en rappelant que ce sont «des milliards de dollars» qui sont en jeu.

«La plainte couvre un plus grand nombre de personnes que tout le personnel en service dans l'Armée de terre, la Marine, l'Armée de l'air et les gardes-côtes réunis», fait valoir le groupe.

Chaque cas peut recourir des réalités différentes, rétorquent les plaignantes, mais «Walmart est le principal employeur aux États-Unis et son fonctionnement et ses ressources humaines sont gérés de manière uniforme et centralisée».

Selon les spécialistes, il y a peu de chance que la Cour suprême leur donne gain de cause. Les neuf sages sont traditionnellement soucieux de soutenir la concurrence et le libre marché. Les observateurs prédisent que ses juges les plus conservateurs exprimeront des inquiétudes à l'idée d'ouvrir les vannes d'une série de plaintes collectives plus ou moins sérieuses contre des employeurs pour toutes sortes de discriminations.

«Il existe des preuves que les cadres de Walmart sous-évaluaient les femmes au nom de clichés archaïques sur leur place dans le monde du travail», explique néanmoins Ariela Migdal, de la puissante Organisation américaine de défense des libertés civiles (ACLU).

«L'usage chez Wal-Mart consistant à laisser les hiérarchies locales maîtres des décisions sur les salaires et les promotions donnait toute latitude à ces clichés, c'est pour cela que les plaignantes devraient avoir le droit de se constituer en groupe pour porter plainte», ajoute-t-elle.