L'inflation annuelle a continué à progresser le mois dernier, pour atteindre 2,3 %, alimentée par la hausse des prix de l'essence et des billets d'avion, a indiqué vendredi Statistique Canada.

En comparaison, l'inflation s'était établie à 2,2 % en février, et à 1,7 % en janvier. La hausse des prix observée en mars était la plus importante d'une année à l'autre depuis que l'inflation a atteint 2,4 % en octobre 2014, alors que le plongeon du prix du pétrole gagnait en importance.

Les données du mois de mars montrent que la cadence de l'inflation a dépassé la cible idéale de la Banque du Canada. La banque centrale tente de contrôler l'inflation pour qu'elle soit le plus près possible du point milieu de la fourchette comprise entre 1,0 % et 3,0 %.

Cependant, les experts s'attendaient à une accélération encore plus prononcée pour le mois de mars, et, plus tôt cette semaine, la Banque du Canada a révisé à la hausse ses prévisions d'inflation pour 2018.

La banque centrale a estimé que l'effet temporaire des prix de l'essence et les hausses du salaire minimum permettrait à l'inflation d'atteindre en moyenne 2,3 % cette année, avant de ralentir à 2,1 % en 2019.

Prudence avec le taux directeur

Cette inflation plus vigoureuse permet de croire que la Banque du Canada continuera à faire usage de prudence dans ses décisions à venir sur les taux d'intérêt.

«Le fait que l'inflation ne se soit pas enflammée autant que la plupart des économistes le croyaient respecte le scénario voulant que la Banque du Canada se montre très patiente en regard des futures hausses de taux», a estimé Royce Mendes, économiste principal pour Marchés mondiaux CIBC, lors d'un entretien.

«Maintenant, même si l'inflation accélère pendant le reste de l'année, la banque aura toujours raison d'être prudente par rapport aux futures hausses des taux.»

L'économiste principal James Marple, de la Banque TD, a pour sa part estimé, dans un rapport, qu'il faudrait que l'inflation grimpe très haut pour que la banque centrale choisisse d'accélérer ses hausses de taux. Il s'attend malgré tout à une autre hausse d'ici la fin de l'année, ce qui serait conforme à l'amélioration des perspectives pour la croissance économique, tant au Canada que dans le monde.

Le mois dernier, la pression à la hausse sur les prix trouvait sa source dans les prix de l'essence et du transport aérien, alors que les prix du matériel vidéo, des appareils électroniques et de l'électricité affichaient un recul.

Le rapport de Statistique Canada permettait aussi de constater que la moyenne des trois mesures de l'inflation de base de la Banque du Canada - des données qui excluent les distorsions que peuvent entraîner les prix les plus volatils, comme ceux de l'essence et des fruits et légumes frais - avait atteint 2,0 % en mars. En février, leur moyenne avait été légèrement supérieure à 2,0 %.

La banque centrale étudie de près les chiffres de l'inflation avant de prendre ses décisions sur la politique monétaire. Ses hausses de taux d'intérêt peuvent être utilisées comme un outil qui empêche l'inflation de grimper trop haut.

Le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, a haussé le taux d'intérêt directeur à trois reprises depuis juillet, et plusieurs observateurs s'attendent à ce qu'il reste sur cette même trajectoire puisque l'économie fonctionne près de sa capacité.

Le Canada a une légère marge de manoeuvre pour croître encore davantage, croit M. Poloz, au-delà de ce que la banque considère être le plein potentiel de l'économie, sans faire grimper l'inflation.

Mais le gouverneur n'a pas haussé le taux directeur depuis janvier - il a notamment choisi de le maintenir à sa plus récente annonce, mercredi. Malgré les récentes améliorations, a-t-il expliqué, l'économie n'est toujours pas capable de tourner à plein régime sans l'appui stimulant des faibles taux, du moins pour l'instant.

Ventes au détail

Par ailleurs, dans un rapport distinct publié vendredi, Statistique Canada a indiqué que les ventes des détaillants avaient progressé de 0,4 % en février, pour totaliser 49,8 milliards.

Les achats d'automobiles ont été le principal moteur des ventes au détail, a souligné M. Mendes, tout en prévenant que celles-ci avaient tendance à être volatiles et témoignaient rarement de tendances sous-jacentes. En excluant les ventes d'automobiles, les ventes des détaillants étaient stables en février.

Les dépenses des consommateurs ont ralenti ces derniers mois alors que les ménages sont confrontés à une hausse du coût de l'emprunt, à de plus strictes règles hypothécaires et à de plus importantes dettes.

«Cette économie a progressé sur le dos des consommateurs et du marché immobilier pendant plusieurs années maintenant», a observé M. Mendes.

«Nous espérons qu'à un certain moment, cela se tournera vers les investissements et les exportations - mais la tendance cette année n'a pas été si positive.»

Statistique Canada a aussi révisé à la baisse ses données sur les ventes au détail des derniers mois. L'agence fédérale calcule maintenant que les ventes de novembre se sont contractées de 1,1 % par rapport au mois précédent - alors qu'elle avait initialement signalé une croissance de 0,5 %. Pour le mois de décembre, les ventes des détaillants ont vraisemblablement diminué de 1,2 %, comparativement à une contraction initiale de 0,7 %.

Les ventes au détail du mois de janvier n'ont quant à elles avancé que de 0,1 %, en regard d'une croissance initialement estimée à 0,3 %.