Le cofondateur d'un site Web qui suit les fluctuations du prix de l'essence à travers le pays estime que les consommateurs sont de plus en plus habitués aux soubresauts à la pompe - comme celui de 13 cents infligé aux Montréalais plus tôt cette semaine.

Jason Toews, du site gasbuddy.com, rappelle que les Canadiens étaient «au bord de l'insurrection» en 2005, quand les dégâts causés par l'ouragan Katrina avaient eu des répercussions jusque chez nous en propulsant le prix national moyen à 1,23$ le litre, un sommet sans précédent à ce moment.

«Les gens étaient vraiment furieux par le prix élevé de l'essence et ils envisageaient de boycotter les pétrolières et les stations d'essence, a-t-il dit. Ironiquement, aujourd'hui, on ne trouve plus ça si dispendieux - 1,23$, c'est presque la nouvelle norme.»

La moyenne nationale s'établissait à 1,33 $ le litre en début de journée vendredi.

Au Québec, le site essencemontreal.com rapportait une moyenne provinciale de 1,45$ le litre.

À Montréal, le prix a fléchi à 1,48$ sur l'île et à un niveau encore plus bas en périphérie.

Les automobilistes de Québec paient eux aussi 1,48$ pour un litre d'essence, contre 1,47$ à Sherbrooke et à Trois-Rivières.Ailleurs, le litre d'essence a reculé à 1,31$ à Toronto et à 1,28 $ à Ottawa mais est en hausse à 1,43$ à Halifax et à 1,34$ à Vancouver.

M. Toews explique que les Canadiens voient maintenant les prix de l'essence différemment.

«En 2005 on aurait annulé une visite au chalet parce que l'essence coûtait trop cher, a-t-il dit. Mais aujourd'hui on ne fait plus ça.»

Les automobilistes canadiens ont profité de prix relativement stables pendant l'été, une saison propice aux déplacements et aux voyages qui stimulent la demande d'essence.

L'accalmie des prix qui survient normalement à l'automne a été annulée par l'ouragan Isaac, qui a forcé la fermeture de plusieurs raffineries de la côte du golfe du Mexique.

L'effet domino s'est ensuite fait sentir jusqu'au Canada.

L'analyste Roger McKnight, de la firme En-Pro International, prédit de son côté une dégringolade des prix vendredi - d'environ 6,4 cents à Montréal et de 6,2 cents dans le sud de l'Ontario.

Il s'explique mal la poussée de cette semaine, exception faite de la volonté des pétrolières d'engraisser leurs profits.

«Il n'y a pas de problème avec les inventaires, pas de problème avec les raffineries à ce que je sache, pas de problème avec les oléoducs. Et c'est normalement une période de faible demande pour l'essence», a-t-il expliqué.

Par contre, entre octobre et mars, le prix de l'essence suit habituellement celui des distillats comme le diesel et le mazout, a dit M. McKnight.

«Les inventaires de distillats se trouvent sous la moyenne des cinq dernières années, donc je n'anticipe pas de recul important du prix de l'essence», a-t-il prévenu.

L'instabilité politique du Moyen-Orient demeure le facteur le plus imprévisible. Si des problèmes de production dans des pays comme la Libye n'ont pas d'implication directe sur le Canada, il n'en va pas de même avec la réaction des spéculateurs.

«Tout dépend de la situation géopolitique, a dit M. McKnight. Je pense que les spéculateurs perdent un peu la tête en essayant de comprendre ce qui se passe.»

Les mesures de relance de l'économie annoncées jeudi par la Réserve fédérale des États-Unis devraient enfin se traduire par un redressement du dollar américain, ce qui entraînera à la hausse à la fois les cours du brut et le prix de l'essence à la pompe, a-t-il ajouté.