Dans l'espoir que Chrysler continue ses activités au Canada malgré la restructuration, le gouvernement fédéral et l'Ontario mettent la main à la pâte, offrant à l'entreprise des prêts totalisant 3,8 milliards de dollars.

Cette aide financière du Canada se veut proportionnelle au soutien de 12 milliards annoncé plus tôt dans la journée par l'administration de Barack Obama. Un cinquième de la production de Chrysler en Amérique du Nord se trouve au Canada.

 

L'enveloppe canadienne comprend un prêt provisoire existant, un prêt en fonds de roulement à court terme et un prêt de restructuration à moyen terme, qui visent tous les opérations canadiennes de Chrysler.

Conjointement avec les Américains, les gouvernements canadien et ontarien participeront à la supervision juridique de la restructuration de Chrysler LLC, par l'intermédiaire de prêts débiteur-exploitant.

En échange, le Canada et l'Ontario détiendront 2% des parts de l'entreprise restructurée - contre 8% pour les États-Unis. Ottawa pourra par ailleurs nommer un des neuf gestionnaires au conseil d'administration, «pour s'assurer que les intérêts des contribuables canadiens soient protégés», a dit le premier ministre Stephen Harper.

Fin mars, Ottawa a rejeté le premier plan de relance proposé par Chrysler, mais le gouvernement estime cette fois que le constructeur automobile a fait ses devoirs.

«Les gestionnaires, les syndicats, et les institutions financières de Chrysler ont fait les sacrifices nécessaires pour assurer la viabilité à long terme de l'entreprise», a souligné M. Harper.

La décision d'ouvrir les coffres et de débourser ces 3,8 milliards de dollars était devenue inévitable, a-t-il précisé.

«Avec la décision de l'administration américaine d'intervenir, nous avons rapidement conclu que la seule option réaliste, pour le Canada, était de participer au processus de restructuration. Autrement, nous aurions couru un risque important de voir l'entreprise se restructurer totalement à l'extérieur de notre pays. Ce n'est tout simplement pas une solution viable pour l'économie canadienne», a expliqué le premier ministre.

Si l'entente prévoit que 20% des investissements et des emplois de Chrysler après la restructuration seront maintenus au Canada, Ottawa n'a toutefois aucune garantie que l'ensemble des usines actuelles continueront leurs activités.

«Ça va dépendre de la performance de l'entreprise, a dit M. Harper. Chrysler sera dans l'avenir une compagnie plus petite. Mais soyons clairs, nous avions à choisir entre une plus petite entreprise ou l'effondrement complet et la disparition de 100% des emplois. Ce qui n'était pas une option.»

Le premier ministre de l'Ontario, Dalton McGuinty, abonde dans son sens. «C'est impossible de garantir qu'on va maintenir le nombre de travailleurs ici en Ontario. Mais c'est dans l'intérêt de Chrysler de maintenir une présence importante en Ontario», dit-il.

Manque de vision

À Ottawa, les partis de l'opposition ont convenu que le gouvernement ne pouvait faire autrement que de s'engager dans cette voie. Selon eux, toutefois, Stephen Harper aurait pu en faire plus.

Le député libéral du sud de l'Ontario Frank Valetiote a déploré le fait que l'entente ne garantisse pas que les emplois resteront au Canada, surtout compte tenu que le pays ne détient qu'un siège sur 9 au conseil d'administration.

Des questions restent aussi en suspens, a-t-il ajouté. «J'espère aussi qu'il y a un plan chronologique pour nous permettre de nous retirer de tout cela.»

Le chef du NPD, Jack Layton, a déploré le manque de vision du gouvernement Harper. «On devrait ajouter, d'abord, une dimension de véhicules verts à toute l'affaire, a-t-il dit. Deuxièmement, une indication que les communautés qui bâtissent ces véhicules sont importantes», a-t-il dit.

Le président des Travailleurs canadiens de l'automobile (TCA), Ken Lewenza, a pour sa part poussé un soupir de soulagement, hier, et se dit confiant de voir Chrysler se restructurer de façon à continuer de produire des véhicules au Canada.