En pleine restructuration, Bell Média vient de montrer la porte à plusieurs de ses dirigeants québécois, dont ses deux principaux patrons au Québec, Charles Benoît et Mario Clément. Mais cette restructuration ne se fera pas aux dépens du Québec, selon le nouveau président de la télé francophone de Bell Média, Gerry Frappier.

« La restructuration se fait partout [au pays]. Le Québec n'est pas plus favorisé ou moins favorisé. Nous faisons le même effort que le Canada anglais [toutes proportions gardées] », dit Gerry Frappier en entrevue avec La Presse.

Jusqu'à 700 pertes d'emplois

Gerry Frappier estime que malgré cette restructuration en cours - attribuable, selon l'entreprise, au contexte financier difficile dans l'industrie des médias -, « le pouvoir décisionnel demeure ici [au Québec] pour la programmation et les contenus ». Selon nos informations, cette restructuration pourrait signifier jusqu'à 700 pertes d'emploi chez Bell Média cet automne à travers le pays, soit environ 10 % de l'effectif. Bell Média n'a pas voulu préciser hier le nombre de pertes d'emploi, autant pour le Québec qu'à l'échelle nationale. La dernière phase des compressions doit avoir lieu à la fin novembre, selon nos informations.

Nommé en août président de la télé francophone de Bell Média, Gerry Frappier combine essentiellement les deux emplois de direction laissés vacants par les départs de Charles Benoît, vice-président de la radio et de la télé de Bell Média au Québec, et de Mario Clément, vice-président du contenu de Bell Média au Québec. « Les responsabilités [du Québec] ne changent pas, mais nous sommes moins nombreux [comme dirigeants] », dit Gerry Frappier, qui conserve aussi son poste de président de RDS, qu'il occupe depuis 1999.

La responsabilité des radios au Québec a toutefois été transférée en théorie de Charles Benoît à David Corey, vice-président de la programmation radio à l'échelle nationale. « C'est Martin Spalding [vice-président des radios au Québec] qui gère les radios au Québec, dit Gerry Frappier. Quand tu as plus de 100 radios au pays, penses-tu qu'un dirigeant à Toronto va s'impliquer dans les émissions de radio au Québec ? Les décisions de programmation vont se passer ultimement dans mon bureau pour la télé et dans le bureau de Martin Spalding pour la radio. »

Le Québec contre le Canada anglais : Gerry Frappier estime qu'il s'agit d'un « faux » débat. « Nous sommes une entreprise nationale », dit-il. La présidente de Bell Média, Mary Ann Turcke, est établie à Toronto, tout comme l'était son prédécesseur Kevin Crull.

Parallèlement à la question du Québec et du Canada anglais, il y a aussi le débat Bell Média/Astral. Plusieurs anciens hauts dirigeants d'Astral, dont l'ancien numéro deux Jacques Parisien, Charles Benoît, Lyne Denault (Canal Vie) et Jacques Mathieu (Z), sont partis successivement depuis l'acquisition d'Astral par Bell en juillet 2013. « Ce n'est pas une question d'Astral versus Bell Média, dit Gerry Frappier. Au niveau de la culture, il y a un héritage d'Astral qui est encore là, mais nous sommes Bell Média. Astral n'existe pas, comme on ne parle plus de Canwest [vendue par Shaw]. »

Une restructuration nécessaire, selon Bell Média

Selon Bell Média, la restructuration annoncée cet automne est inévitable en raison du contexte financier dans l'industrie des médias. « Nous nous prenons en main, sachant l'ampleur des intempéries qui s'en viennent, dit Gerry Frappier. C'est difficile de voir partir des collègues de travail, mais nous devons gérer les enjeux auxquels nous faisons face. Nous agissons de façon responsable en réduisant notre structure de coûts. Nous voyons venir une pression additionnelle sur nos revenus. [....] [Cette restructuration] va nous permettre de maximiser les ressources disponibles pour investir dans le contenu. C'est le contenu qui va faire le succès de l'entreprise. »

Selon les derniers chiffres du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), les profits de toutes les stations de radio au pays ont chuté de 8,8 % et les profits des télés spécialisées ont diminué de 7,6 % en 2013-2014.