Le géant de l'électronique japonais Sharp, en pleine crise financière, exprime depuis jeudi son «blues» dans une série de messages plutôt inhabituels sur Twitter.

«Eh bien, c'est dur de tweeter aujourd'hui. Pas faute d'y penser mais rien à faire d'autre qu'accepter mon sort», a écrit le groupe sur son compte officiel à l'adresse de ses 202 000 abonnés.

Sharp a annoncé jeudi la suppression de 10% de ses effectifs dans le monde, soit quelque 5000 personnes (dont 3500 au Japon), accompagnée d'un vaste plan de restructuration pour faire face à des pertes massives.

«J'ai le blues mais je garde le moral quand même», tweete aussi le géant blessé, parlant à la première personne comme s'il était un samouraï.

Le pionnier japonais des écrans à cristaux liquides a été fragilisé par la concurrence sur les panneaux solaires et les écrans de téléphones intelligents et tablettes. Il a aussi pâti des mouvements défavorables de devises sur la production délocalisée d'appareils électroménagers destinés au marché japonais.

Contraint à une cure d'amaigrissement draconienne, il a perdu plus du quart de sa valeur à la bourse de Tokyo au cours de la semaine.

L'agence de notation financière Standard & Poor's a par ailleurs abaissé vendredi de deux crans à CCC- la note à long terme du groupe japonais d'électronique Sharp qui est forcé d'avoir recours aux banques et est désormais considéré comme un émetteur très risqué.

Le pionnier des écrans à cristaux liquides (LCD) était déjà relégué en catégorie spéculative et avait vu sa note abaissée de trois crans début mars.

Mais cette fois, le soutien des banques annoncé jeudi par Sharp est assimilé par S&P à un échange de créances contre des actifs, ce qui est considéré par l'agence comme un «défaut sélectif».

Étranglé par près de 10 milliards d'euros de pertes cumulées depuis 2011, Sharp a obtenu de la part de ses banques la promesse de recevoir 200 milliards de yens pour rembourser des dettes, en échange de l'émission d'actions préférentielles pour les deux établissements concernés, Mizuho et Mitsubishi UFJ.

«Si les actionnaires de Sharp approuvent l'émission de titres privilégiés lors de l'assemblée générale à venir, nous prévoyons de réduire à SD (défaut de paiement sélectif) la notation de l'entreprise», a prévenu S&P.

L'agence a donc assorti la nouvelle appréciation d'une perspective négative.

La note de la dette à long terme est, elle, pour le moment conservée à CCC+. «Par conséquent, la note de la dette à long terme dépasse la note de crédit à long terme d'entreprise de deux crans. Avant, les deux évaluations étaient les mêmes», précise S&P.

Sharp a fait état d'une perte nette de 222 milliards de yens pour l'année comptable close en mars et s'est abstenu de donner une estimation pour 2015/16 à cause de l'enregistrement de dépréciations.

Sur cette base, il s'est montré confiant quant à sa capacité à stopper l'hémorragie puisqu'il espère dégager un bénéfice d'exploitation durant l'exercice actuel qui sera clos le 31 mars 2016.

Les acteurs de la Bourse de Tokyo sont en revanche plus sceptiques puisqu'ils ont encore sanctionné le titre vendredi. Il est tombé de 7% à 186 yens, son niveau le plus bas depuis décembre 2012.

Il avait déjà abandonné lundi un quart de sa valeur sur fond de rumeurs de presse, avant de rebondir le lendemain.