Les heures sont comptées pour sauver l'usine de médicaments génériques de Teva, à Mirabel, dont la vente à l'américaine Halo Pharmaceutical est plongée dans l'incertitude.

La transaction censée faire passer l'usine de 350 employés des mains de l'israélienne Teva à l'américaine Halo doit se conclure avant aujourd'hui. Or, au moment de mettre sous presse, hier, les possibilités que la vente avorte semblaient bien réelles.

Selon nos sources, Halo a retiré son offre d'achat suite à un vote des employés syndiqués qui s'est tenu mardi. Les employés ont rejeté avec une majorité de 65% une offre de Halo qui accordait des hausses salariales et maintenait les avantages sociaux des employés, mais leur demandait un important réaménagement des tâches de façon à augmenter la flexibilité de l'usine.

Ni Teva, ni Halo, ni TCA-Québec, le syndicat qui représente quelque 180 travailleurs de l'usine, n'ont voulu commenter la situation.

Le fait qu'environ la moitié des employés du site soient syndiqués a provoqué de vives tensions entre syndiqués et non-syndiqués, au point où des agents de sécurité ont dû être dépêchés sur les lieux, jeudi.

«L'ambiance est très, très lourde. Tout le monde est à couteaux tirés et ça ne prendrait pas grand-chose pour que ça dégénère», a confié une employée à La Presse Affaires.

«On se sent pris en otage», a dit cette employée non-syndiquée, qui estime que les employés syndiqués ont joué avec le feu et compromis l'avenir de l'usine alors que l'industrie pharmaceutique est en plein déclin à Montréal et que les possibilités de se replacer ailleurs sont limitées.

«Les non-syndiqués se font dire des choses par la partie patronale et n'ont pas toute l'histoire. On fait porter tout le blâme sur les syndiqués, alors qu'il me semble y avoir de l'entêtement et de la mauvaise communication tant de la part de la partie syndicale que de la partie patronale», a confié pour sa part un syndiqué, qui se demande notamment pourquoi le vote s'est tenu si près de l'échéance de la transaction.

Les syndiqués disent qu'ils étaient conscients du risque que Halo retire son offre au moment de voter, mais plusieurs croyaient qu'il ne s'agissait que d'un bluff.

Certains cadres ont déjà été avisés de prendre les mesures nécessaires pour que la production de l'usine de Mirabel soit transférée à d'autres sites de production.

Une longue saga

Les événements récents représentent le dernier chapitre d'un long feuilleton. L'usine de Teva a été fondée en 1974 sous le nom de Technilab, avant d'être rachetée par Ratiopharm en 2002. Teva, un géant israélien des médicaments génériques, l'a rachetée à son tour en novembre 2010, avant d'annoncer sa fermeture quelques mois plus tard.

Teva a effectivement fermé le centre de recherche de l'usine en juillet 2011, provoquant une centaine de mises à pied. L'entreprise avait aussi annoncé son intention de fermer l'usine complète si elle ne parvenait pas à la vendre. Personne n'entretenait beaucoup d'espoir à ce sujet jusqu'à ce que Halo, une petite entreprise de 165 employés du New Jersey, se manifeste in extremis en mars dernier.

Halo souhaitait transformer l'usine de Teva en site de sous-traitance qui aurait été utilisé par plusieurs entreprises, la principale étant Teva elle-même. Le fait que la transaction soit maintenant comprise risque donc de toucher aussi Teva.

Le site aurait servi à fabriquer autant des médicaments génériques que des premières formulations pour des produits expérimentaux concoctés par les entreprises biotechnologies. Il aurait desservi à la fois les marchés canadien, américain et européen.

Halo avait promis de conserver au moins 150 des 350 employés, mais plusieurs sources ont dit croire que davantage de travailleurs auraient conservé leur poste.

«Il y avait une possibilité de réembauche si l'usine allait vraiment bien, et on pouvait espérer que jusqu'aux trois quarts des employés conservent leur emploi en fin de compte», a dit Alain Cassista, directeur général de Pharmabio développement, un organisme impliqué dans le reclassement des travailleurs de l'usine de Teva.