Le vote des actionnaires qui se sont exprimés par procuration n'a pas été considéré lors des deux dernières assemblées annuelles de Quebecor [|ticker sym='T.QBR.B'|]]. Ça sera encore le cas aujourd'hui à l'assemblée générale de ses actionnaires si personne ne demande le scrutin secret.

En conformité avec la loi et le règlement interne de la société, Quebecor ne tient pas compte des votes par procuration dûment enregistrés par les actionnaires à moins que le scrutin secret n'ait été demandé.

En réaction, le Groupe Investissement Responsable (GIR) a recommandé à ses clients de demander la tenue d'un vote au scrutin secret, dans une note datée du 23 janvier 2012 que La Presse a obtenue. L'organisme conseilelant les investisseurs institutionnels dans l'exercice de leur droit de vote aux assemblées d'actionnaires donne spécifiquement le cas de Quebecor en exemple.

Contrairement à la loi ontarienne, la loi québécoise n'oblige pas la tenue d'un scrutin secret, peu importe le nombre de procurations reçues, déplore le GIR. Les scrutins secrets sont rarement demandés en assemblée générale des actionnaires.

Abstention

Qu'est-ce qui s'est donc passé chez Quebecor en 2010 et 2011? Au cours des deux dernières assemblées générales des actionnaires, une majorité d'actionnaires de catégorie B ayant voté par procuration s'est abstenue de voter en faveur des deux candidats censés les représenter au conseil d'administration.

Une telle abstention reste rarissime en démocratie actionnariale. Aux États-Unis, par exemple, seulement 20 administrateurs du S&P 500 ont obtenu un taux d'abstention ou d'opposition supérieur à 50% en 2010, d'après le rapport de la firme de consultants Georgeson, cité par le Groupe Investissement Responsable dans sa note de janvier.

Or, Quebecor soutient que les deux candidats ont été élus chaque fois à l'unanimité.

«Lors des assemblées annuelles de 2010 et 2011, un vote à main levée fut pris pour l'élection des administrateurs de catégorie B, écrit Quebecor en réponse à une proposition d'actionnaire demandant le vote majoritaire. Les actionnaires de catégorie B, présents à l'assemblée, et qui se sont exprimés sur cette proposition, ont voté à l'unanimité en faveur des candidats proposés.»

Proposition du MEDAC

Une politique de vote majoritaire, comme le propose le Mouvement d'éducation et de défense des actionnaires (MEDAC), contraint un administrateur qui n'obtient pas une majorité de votes «pour» à remettre sa démission au conseil. Près de 60% des émetteurs du TSX ont adopté pareille politique, d'après le MEDAC.

Quebecor invite ses actionnaires à rejeter le vote majoritaire pour éviter de jouer le jeu des firmes de sollicitation de procurations, comme Institutional Shareholder Services (ISS), qui «se serviront de ce mécanisme pour menacer les entreprises d'un vote d'abstention pour l'élection d'administrateurs si l'entreprise n'acquiesce pas à certains changements demandés», avance Quebecor, dans la circulaire.

En 2009-2010, ISS a en effet recommandé aux actionnaires B de Quebecor de s'abstenir de voter pour les deux candidats proposés en réaction notamment au mode d'élection en bloc des administrateurs.

Vote individuel

Cette année, Quebecor a adopté le vote individuel, tant et si bien qu'ISS recommande à ses clients de voter cette fois-ci «pour» les deux candidates proposées, soit Sylvie Lalande et Geneviève Marcon.

Selon le rapport préliminaire sur le dépouillement des procurations, les deux candidates aux postes d'administratrices de la catégorie B reçoivent un appui massif, écrit dans un courriel Serge Sasseville, vice-président principal, Affaires corporatives et institutionnelles.

Les autres propositions du MEDAC portant sur le vote consultatif sur la rémunération (en vigueur dans plus de 80 grandes sociétés canadiennes, d'après le proposeur), la parité hommes-femmes au conseil et le dividende aux actionnaires de long terme sont rejetées, toujours en fonction du rapport préliminaire sur le dépouillement des procurations. «Ce résultat n'est évidemment pas surprenant étant donné la présence d'un actionnaire largement majoritaire», convient Serge Sasseville.

Pierre Karl Péladeau détient 72,61% des droits de vote rattachés aux actions A et B mises ensemble. À part pour l'élection des administrateurs, les actionnaires A et B votent ensemble pour toutes les autres questions soumises à l'assemblée. Les actions A donnent droit à 10 votes par action, tandis que les actions B donnent droit à un vote par action. Les actionnaires B élisent deux administrateurs au conseil.

La présence de cet actionnaire majoritaire permettra l'adoption de la modification aux statuts de la société pour ajouter un accent aigu à la version française de la raison sociale qui deviendra Québecor.