Le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble critique dans un entretien à paraître vendredi le projet d'une agence de notation européenne et rappelle que les États sont eux-mêmes responsables de l'influence accordée à Standard and Poor's, Moody's et Fitch.

«Les États ont donné eux-mêmes (aux agences) une partie de cette importance disproportionnée», en rendant obligatoire une notation pour certaines catégories de placements financiers, a dit M. Schäuble au journal Kölner Stadt Anzeiger.

Les grandes agences anglo-saxonnes, très critiquées actuellement en Europe alors qu'elles menacent d'abaisser plusieurs notes souveraines, «doivent s'imposer sur le marché et ont pour but de faire des bénéfices. Pour s'affirmer sur le grand marché américain, il faut faire un peu de raffut. Si c'est toujours sérieux? On peut se le demander», a déclaré le ministre.

M. Schäuble juge toutefois qu'il ne faut pas «abattre le messager porteur de mauvaises nouvelles», mais «régler les problèmes».

Le grand argentier allemand est sceptique face à l'idée d'une agence de notation européenne, éventuellement publique: «Et qui la mettrait en place? Je ne suis pas persuadé qu'une offre publique aurait une chance face à cette concurrence privée, établie depuis longtemps».

Dans ce même entretien, M. Schäuble répète son opposition à toute création d'euro-obligations: «ceux qui parlent des eurobonds compromettent les efforts des États pour résoudre eux-mêmes leurs problèmes».

Il se dit toutefois prêt à «rassembler aussi vite que possible tout le capital» du futur mécanisme européen de stabilité (MES), qui doit dès l'an prochain prendre la place du fonds temporaire existant, le Fonds européen de stabilité financière (FESF).

Le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, le Luxembourgeois Jean-Claude Juncker, a lui déjà appelé les pays de la zone euro à verser en une seule fois le capital du MES, soit 80 milliards d'euros.

Pour dégager les fonds, Berlin va devoir présenter une loi de Finances rectificative pour le budget fédéral 2012, a confirmé M. Schäuble, qui a dit toutefois n'avoir «aucune donnée définitive sur le quand et le combien». Un député allemand a avancé le chiffre de dépenses supplémentaires de 4,3 milliards d'euros.

M. Schäuble juge par ailleurs «très regrettable» que la Grande-Bretagne ait mis son veto la semaine dernière à une modification des traités européens, mais jugé «inacceptables» les conditions posées par Londres pour valider un durcissement de la discipline budgétaire en zone euro, en l'occurrence des règles préférentielles pour son secteur financier.

En conclusion de l'entretien, le ministre, doyen du gouvernement d'Angela Merkel, déclare souhaiter pour Noël que «les gens n'oublient pas qu'en dépit de tout, ils vivent la phase la plus heureuse de l'histoire allemande».