Il n'y a pas de bon moment pour avoir une panne informatique. Mais celle qui affecte les serveurs de BlackBerry pouvait difficilement tomber plus mal pour son fabricant Research In Motion (T.RIM), déjà aux prises avec sa part de problèmes.

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Un engorgement des données sur les serveurs européens de Research In Motion paralyse une partie du réseau BlackBerry en Europe et ailleurs dans le monde depuis lundi. Certains clients sont incapables d'envoyer des courriels et des textos ou encore de naviguer sur l'internet.

Hier matin, les débordements sur les serveurs de RIM ont atteint l'Amérique du Nord. RIM, qui ne soupçonne pas de piratage sur ses serveurs, ne savait pas hier en début de soirée quand le problème serait réglé. «Tous les courriels seront envoyés à destination», a promis David Yach, directeur de la technologie de Research In Motion.

La panne a provoqué une baisse de 3,46% du titre de RIM hier à la Bourse de Toronto. «Plus la panne est longue, pire ce sera pour RIM, qui fait déjà face à plusieurs autres défis. Si vous avez beaucoup de clients en colère, ça a des conséquences sur votre réputation», a dit en entrevue à La Presse Affaires Michael Genovese, analyste financier à la firme américaine MKM Partners qui surveille le titre de RIM.

Si la panne venait à s'éterniser, RIM abandonnerait peut-être l'un de ses derniers avantages par rapport à ses concurrents: la fiabilité et la sécurité de ses serveurs. «Les gens de RIM ne semblent pas savoir exactement ce qui ne fonctionne pas, dit Michael Genovese. Ils disent que ce n'est pas du piratage, mais plus longue sera la panne, plus ce sera difficile à croire. Et même s'ils ont raison, ça ne fera que prouver leur incompétence.» «Cette panne est embarrassante pour une entreprise qui a bâti sa réputation sur sa fiabilité», a dit Michael Gartenberg, directeur de la recherche de la firme américaine Gartner, à La Presse Canadienne.

Pour une raison inconnue, le système de redondance des serveurs en Europe n'a pas fonctionné comme prévu lundi dernier, créant une accumulation de données sur les réseaux de RIM ailleurs qu'en Europe. «Le système est conçu pour aller automatiquement à un autre interrupteur, mais ça n'a pas fonctionné de cette façon cette fois-ci», dit David Yach.

Voilà un problème technique dont RIM, abonnée aux mauvaises nouvelles depuis quelques mois, se serait bien passée. Lancée en avril dernier, sa tablette PlayBook s'est avérée un échec commercial, au point où l'entreprise a cessé sa production pour l'instant. Certains actionnaires font aussi savoir leur mécontentement sur la place publique quant au système de gouvernance à deux têtes de Mike Lazaridis et Jim Balsillie. D'autres actionnaires minoritaires parlent ouvertement de scinder l'entreprise. Sans compter les rumeurs d'achat provoquées par le fait que l'investisseur activiste Carl Icahn aurait acquis des actions de RIM, rumeur qui n'a pas été confirmée.

«Je suis très pessimiste quant à l'avenir de RIM, mais ça n'a rien à voir avec la fiabilité de leurs serveurs, dit Ramy Elitzur, professeur d'analyse financière à l'Université de Toronto. Cette panne n'est pas une crise majeure, car RIM a des problèmes plus sérieux. Elle était l'entreprise dominante dans le marché des téléphones intelligents, mais elle a perdu cet avantage au profit d'Apple et de Google.»

Mais pour l'heure, RIM se concentre à rétablir tous ses serveurs. Entre-temps, l'entreprise de Waterloo se défend d'avoir mal géré cette dernière crise, notamment en matière de communication avec ses clients. «Notre priorité est de rétablir le service pour nos clients, dit David Yach. Au final, c'est ce qu'ils veulent le plus.»

Fleuron de l'industrie canadienne des technologies de l'information, RIM a perdu 3,46% (87 cents) hier à la Bourse de Toronto pour clôturer la séance à 24,27$. Le titre de l'entreprise de Waterloo, en Ontario, a perdu 58,2% de sa valeur boursière depuis le début de l'année.