Elle coûtait 30 millions de dollars aux Québécois en 2005. Son prix atteint maintenant 193 millions: les coûts de la «règle des 15 ans», l'une des pierres angulaires de la politique de soutien du gouvernement du Québec à l'industrie pharmaceutique, continuent de grimper.        



La règle de 15 ans est un engagement pris par Québec visant à encourager les entreprises pharmaceutiques qui développent de nouveaux médicaments. Elle stipule que, même si des versions génériques moins chères d'un médicament sont disponibles sur le marché, Québec continuera de rembourser aux patients la version originale pendant une période de 15 ans, même s'il se prive ainsi d'économies.

Le dernier budget Bachand indique que le coût de la mesure passera de 161,5 millions l'an dernier à 193 millions cette année.

La hausse s'explique d'abord par la baisse du prix des médicaments génériques au Québec. Une première baisse est entrée en vigueur en décembre dernier et une deuxième suivra en avril. En continuant de payer le plein prix des versions originales plutôt que ces prix réduits, Québec se prive d'économies grandissantes.

L'autre coupable est le Lipitor, deuxième médicament le plus prescrit au Québec en 2010. Son brevet est venu à échéance l'an dernier au Canada et des versions génériques sont apparues sur le marché. En acceptant de continuer à rembourser la version originale, Québec se prive encore une fois d'économies qui font grimper le coût de sa mesure de soutien.

L'industrie des médicaments génériques n'a pas manqué de dénoncer ce soutien à l'industrie innovatrice, arguant que les économies réalisées par la baisse des médicaments génériques (elles atteindront 190 millions en deux ans) sont complètement plombées par le coût de la règle des 15 ans.

En 2005, un groupe de chercheurs avaient calculé que la règle des 15 ans, qui coûtait à l'époque 25 millions au gouvernement, rapportait 37 millions à Québec et était donc rentable. L'un des chercheurs avait confié l'an dernier à La Presse Affaires que l'explosion des coûts de la mesure avait fort probablement renversé ces conclusions.

Le ministère des Finances a confirmé hier à La Presse Affaires qu'il travaillait à réévaluer les coûts et les bénéfices de la règle des 15 ans, sans toutefois pouvoir préciser d'échéancier.

Selon Mélanie Bourassa-Forcier, professeure de droit pharmaceutique à l'Université de Sherbrooke, il faut s'attendre à ce que le coût de la règle des 15 ans continue d'augmenter avec le vieillissement de la population et l'augmentation du prix des médicaments.