Le prix Nobel d'économie 2008, l'Américain Paul Krugman, a dénoncé vendredi le culte de «dieux invisibles» dans les appels à réduire les dépenses budgétaires pour contrer la hausse de la dette publique dans les pays occidentaux.

«L'élite des responsables politiques (les banquiers centraux, les ministres des Finances, les élus qui se dressent en défenseurs de la vertu budgétaire) agissent comme les prêtres d'un culte antique, exigeant que nous nous livrions à des sacrifices humains pour apaiser la colère de dieux invisibles», a-t-il écrit dans sa colonne quotidienne du New York Times.

Ces dieux invisibles sont selon M. Krugman les investisseurs sur le marché des emprunts d'État, dont il trouve l'influence exagérée.

«Oui, on parle de sacrifices. Il faudrait que ceux qui doutent de la souffrance causée par les coupes claires dans les dépenses regardent les conséquences catastrophiques des programmes d'austérité en Grèce et en Irlande», a-t-il poursuivi.

Militant acharné des politiques de relance budgétaire, M. Krugman a relevé que malgré la persistance d'un déficit public record, les États-Unis empruntaient à des taux historiquement bas.

«D'abord on nous a dit qu'il fallait ignorer les fondamentaux économiques et à la place obéir au diktat des marchés financiers; maintenant on nous dit d'ignorer ce que disent en fait ces marchés parce qu'ils sont désorientés», a-t-il souligné.

Il a reconnu que certains pays, plus petits, ne pouvaient pas maintenir indéfiniment des déficits élevés. «Mais en Amérique, nous avons le choix. Les marchés n'exigent pas que nous laissions tomber la création d'emplois», a estimé ce professeur de l'université de Princeton.