Le nouveau service sans fil à rabais que s'apprête à lancer Rogers Communications est un acte d'intimidation visant à détruire la concurrence au sein de l'industrie canadienne des télécommunications, affirme le patron d'un des nouveaux venus dans le secteur du sans fil, Mobilicity.

Le président du conseil de Mobilicity, John Bitove, n'a pas caché son mécontentement vis-à-vis du service Chatr annoncé par Rogers le 30 juin, allant jusqu'à affirmer qu'il ne s'était pas lancé en affaires pour se faire arnaquer par un joueur de plus grande taille.

M. Bitove prévoit examiner les recours judiciaires qui s'offriront à son entreprise en vertu de la Loi sur la concurrence du Canada si Rogers [[|ticker sym='T.RCI.B'|]] va de l'avant avec son nouveau service à rabais.

Selon M. Bitove, l'offre de Chatr est suspicieusement similaire aux plans de Mobilicity qui proposent des appels et des messages textes illimités à des tarifs fixes s'établissant entre 15 $ et 65 $.

«Regardez les marchés qu'ils visent, ce sont nos marchés. Regardez les plans qu'ils offrent aux consommateurs, ce sont pratiquement des imitations des plans que nous avons mis en place», a affirmé M. Bitove.

Rogers Communications n'a pas immédiatement retourné les appels pour commenter les accusations de M. Bitove.

Le président de Mobilicity estime que l'arrivée de Chatr n'a rien d'une coïncidence, puisque Rogers aurait pu choisir de lancer un tel service il y a plusieurs années, mais n'a choisi de le faire que lorsque Mobilicity a fait son entrée sur le marché.

«Essentiellement, il s'agit d'un acte d'intimidation de la part d'un joueur de 20 milliards $ qui tente de détruire la concurrence aussi rapidement que possible.»

Mobilicity est l'un des nouveaux venus sur le marché de la téléphonie sans fil, ayant remporté une part des nouvelles fréquences mises aux enchères en 2008 par Ottawa.

Une partie du spectre ainsi attribué était réservée aux nouveaux joueurs, Ottawa ayant spécifiquement prévu que cela favoriserait la concurrence dans le secteur du sans-fil.

Avant l'entrée en scène des nouveaux joueurs, le marché n'était partagé qu'entre trois géants, soit Rogers, Bell [[|ticker sym='T.BCE'|]] et Telus [[|ticker sym='T.T'|]].

Rogers a acquis il y a quelques années le service Fido des mains de Microcell Télécommuncations, qui avait mis au défi les gros joueurs avec sa stratégie de service à rabais. Avant cela, Telus avait racheté Clearnet Communications pour le combiner à Telus Mobilité.

Chatr deviendrait le troisième membre de la famille sans fil de Rogers Communications, après Rogers sans fil et Fido.

Mobilicity entend notamment déposer une plainte auprès du Bureau de la concurrence, faisant valoir que Rogers a enfreint la section «abus de position dominante» de la loi, qui interdit «l'utilisation sélective et temporaire de marques de combat destinées à mettre au pas ou à éliminer un concurrent».

M. Bitove croit que Rogers éliminera ses rabais une fois que Mobilicity aura été écarté du marché.

Le Bureau de la concurrence examine s'il existe une preuve qu'un comportement a un effet nuisible sur le marché, afin de déterminer s'il y a eu, ou non, un abus de position dominante, a expliqué son porte-parole, Greg Scott, qui n'a pas voulu préciser si le Bureau étudiait ce cas précis.

L'analyste en télécommunications Iain Grand croit que les allégations de Mobilicity contre Rogers sont solides, compte tenu du moment choisi pour le lancement du service et du choix des mots utilisés par Rogers pour présenter sa marque, à la lumière du texte de la Loi sur la concurrence.

Plusieurs fournisseurs ont lancé, ces dernières années, des bannières soeurs, comme le service Kodoo de Telus, ainsi que les marques Solo et Virgin Mobile, de Bell.

«La différence, c'est le moment choisi pour le faire, et la manière de le faire», a observé M. Grant. «Ceci est presque un exemple parfait de ce que la loi tente d'empêcher.»

«Si vous introduisez votre marque à rabais au moment où Mobilicity et Public Mobile et Wind se pointent le bout du nez avec de nouveaux plans concurrentiels, cela pourrait être perçu comme un peu opportuniste.»

Mobilicity a lancé en mai son service sans fil dans la grande région métropolitaine de Toronto, et prévoit faire de même d'ici la fin de l'année à Vancouver, Edmonton, Calgary et Ottawa.