Deutsche Telekom et France Telecom ont dévoilé mardi leur intention de fusionner leurs filiales britanniques, un joli coup pour l'opérateur français qui devient numéro un au Royaume-Uni tout en gardant la liberté financière d'investir dans les pays émergents.

En entamant des négociations exclusives avec l'allemand, prélude à la signature du contrat d'ici fin octobre, France Telecom a damé le pion au britannique Vodafone et à l'espagnol Telefonica (présent outre-Manche avec O2).   Ces derniers, selon la presse, avaient déposé chacun des offres de plus de 4 milliards d'euros pour le rachat de T-mobile, la filiale de Deutsche Telekom en difficulté financière.

L'allemand cherchait de longue date une solution pour T-mobile, mais l'idée d'une simple cession ne le tentait guère.

En emportant la mise avec son projet de coentreprise, France Telecom s'offre le luxe de ne pas débourser de cash, de quoi réjouir la Bourse de Paris où le titre a terminé en hausse de 1,77% à 18,44 euros dans un marché en légère hausse (+0,22%).

Il ne creuse donc pas sa dette (34,7 milliards fin juin), qu'il s'est efforcé de réduire ces dernières années, et garde des marges de manoeuvre pour sa stratégie d'investissement dans les pays émergents, surtout en Afrique: il y compte 40 millions de clients dans 15 pays et vise les 50 millions en 2010.

En Grande-Bretagne, Orange et T-Mobile, respectivement numéro 3 et 4 du marché, seront réunis pour une durée de trois ans minimum dans une société commune détenue à parité 50/50, pour un chiffre d'affaires combiné de 9,4 milliards d'euros et un résultat brut d'exploitation (Ebitda) de 2,1 milliards.

Pendant 18 mois les opérateurs conserveront leurs marques respectives, le temps de définir une nouvelle «stratégie de marque». Tom Alexander, directeur général d'Orange UK, deviendra PDG de la nouvelle entité.

Cette dernière comptera 28,4 millions de clients, soit 37% du marché anglais de la téléphonie mobile, dont elle deviendra le premier opérateur devant l'actuel leader O2 (27,7%) et Vodafone (24,7%).

Avec cette opération, qui reste soumise au feu vert de Bruxelles, «Orange reprend l'avantage sur Telefonica et Vodafone au Royaume-Uni et par la même occasion contribue à desserrer l'étau concurrentiel sur le marché britannique», estiment les analystes de CM-CIC Securities.

«Le Royaume-Uni, c'est le seul grand marché européen avec cinq gros opérateurs, c'est le marché le plus difficile pour continuer à investir et à développer ses réseaux», a souligné le directeur financier de l'opérateur français, Gervais Pellissier. «Le rapprochement de nos activités (était) la chose la plus naturelle».

Mais France Telecom «va clairement devoir, pendant un certain temps, traîner un boulet qui risque d'être onéreux», remarquent les analystes de la maison de courtage Aurel.

«L'intégration des deux sociétés présente les risques inhérents et habituels» et «il va bien falloir que la marque T-Mobile UK disparaisse, ce qui risque de faire perdre de nombreux clients», estiment-ils, jugeant «un peu osé» de «parler d'économies de coûts sans envisager des pertes de clients».

Les partenaires misent sur des synergies nettes de quelque 4 milliards d'euros dans le réseau, les technologies et la distribution.

Sans surprise, ils évoquent déjà la nécessaire «optimisation des effectifs» après la fusion, notamment dans les services à la clientèle. Interrogé, Tom Alexander n'a pas donné de chiffres. Orange UK emploie près de 12 900 personnes, après avoir supprimé 2000 emplois en 2006, tandis que T-Mobile UK compte 6.100 salariés.