Le barreau de Montréal a un nouveau bâtonnier: Stephen Schenke, un ancien militaire devenu avocat qui veut changer l'image de la profession.

Le barreau de Montréal a un nouveau bâtonnier: Stephen Schenke, un ancien militaire devenu avocat qui veut changer l'image de la profession.

Le Montréalais Stephen G. Schenke a toujours su qu'il deviendrait avocat. Au secondaire, il excellait dans les joutes oratoires et se doutait bien qu'il plaiderait tôt ou tard dans les grands tribunaux du pays.

Mais voilà, jeune, il rêvait aussi de devenir soldat, comme son père, et surtout comme le général George P. Vanier, dont, adolescent, la biographie l'avait marqué.

En 1978, à 18 ans, il a donc décidé de s'enrôler dans l'armée canadienne, où il fut, pendant quatre ans, officier d'infanterie à Val-Cartier. Jusqu'à ce que l'envie du droit le rattrape et qu'il finisse par troquer l'uniforme contre la toge.

«L'armée fut une expérience extraordinaire et m'a beaucoup appris», dit l'avocat de 48 ans, associé au bureau montréalais de McCarthy Tétrault, alors qu'il reçoit La Presse au centre-ville de Montréal.

En fait, la vie de soldat l'a tellement marqué qu'il n'est pas étonnant qu'il soit devenu plaideur, spécialiste des litiges, dans les secteurs de l'immobilier et de la construction. Dans le domaine du droit, les plaideurs sont considérés comme les guerriers de la profession, ceux qui aiment se battre, séduire, convaincre, conquérir...

C'est d'ailleurs un peu pour changer cette image que Stephen Schenke a accepté de relever le défi du barreau de Montréal. Car depuis le 7 mai dernier, il est le nouveau bâtonnier. Élu par acclamations, il orientera les actions de l'organisme pour la prochaine année.

«On ne refuse pas un tel honneur», dit-il, pour expliquer son choix.

Regroupant plus de 12 000 avocats, le barreau de Montréal est l'un des plus grands barreaux du monde et le deuxième barreau francophone en importance.

Changer la perception

Une des priorités du nouveau bâtonnier sera de promouvoir le dossier de la justice participative. En commençant par changer la perception négative que l'on peut avoir des avocats de litige.

«Il faut transformer cette image que les plaideurs sont des guerriers, explique-t-il. Ils doivent plutôt devenir des spécialistes de résolution de conflits.»

Ce changement de perception, il doit d'abord venir des avocats eux-mêmes. Selon lui, probablement en raison de leur formation universitaire, bien trop d'avocats considèrent encore aujourd'hui comme seule solution, pour régler un litige, la plaidoirie d'une position devant un juge. «Alors qu'on ne doit plaider une cause qu'en dernier ressort», dit-il.

Un des problèmes est que les facultés de droit n'offrent peu ou pas de formation en médiation. C'est pourquoi le nouveau bâtonnier prépare, pour octobre 2008, une table ronde qui réunira des responsables de l'École du Barreau, des magistrats de diverses instantes et tous les responsables des facultés.

L'objectif? Dresser un compte rendu de tout ce qu'offrent les facultés en matière de formation en médiation et négociation.

Idéalement, Me Schenke souhaiterait que chaque étudiant en droit suive obligatoirement un trimestre en moyens alternatifs de règlement de disputes.

Un autre objectif que s'est fixé le nouveau bâtonnier est la création par le Barreau du Québec d'un organisme pro bono québécois, comme il en existe ailleurs au Canada. Actuellement, explique-t-il, plusieurs cabinets offrent bénévolement des heures de pratique à diverses causes, mais à peu près personne n'est au courant.

Ce qu'il préconise est la création d'une agence qui assurerait la coordination des demandes et la distribution des services pro bono offerts par les cabinets. «De façon à ce que le public se rende compte de la contribution des avocats.»

La tâche s'annonce colossale car peu a été fait au Québec. Le nouveau bâtonnier compte donc profiter de l'expérience des autres, en organisant sous peu un colloque avec les agences pro bono des barreaux de l'Alberta, de l'Ontario et de certains états américains.

Ouverture sur le monde

Stephen Schenke veut aussi créer des liens avec les grands barreaux internationaux, notamment avec ceux de Shanghai, Mumbai, New Delhi, Rio et Dubaï.

Celui de Shanghai est particulièrement dans sa ligne de mire, parce que, dit-il, c'est toute l'économie qui passera un jour par la Chine, et que les avocats doivent être prêts.

Un dialogue a récemment été établi avec le Barreau de Shanghai, mais le bâtonnier de Montréal souhaite pousser plus loin les échanges en organisant des activités de réseautage et d'échanges de connaissances entre avocats de Shanghai et de Montréal, particulièrement pour ceux qui représentent des clients faisant des affaires en Chine.

Me Schenke note que la concurrence a déjà pris pas mal d'avance: une centaine de cabinets étrangers se sont établis en Chine, alors que les firmes canadiennes hésitent toujours. «Il y a 15 cabinets de Paris en Chine, alors y'a sûrement de la place pour un cabinet de Montréal.»

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