Pour la première fois en neuf ans, le solde du compte courant du Canada était en déficit avec le reste du monde, a révélé vendredi Statistique Canada, signalant la fin d'une longue série d'excédents commerciaux.

Pour la première fois en neuf ans, le solde du compte courant du Canada était en déficit avec le reste du monde, a révélé vendredi Statistique Canada, signalant la fin d'une longue série d'excédents commerciaux.

La combinaison de l'appréciation du dollar canadien, d'une faible demande aux États-Unis, d'une baisse des prix intérieurs pour les biens étrangers et d'un exil des consommateurs à la recherche d'aubaines au sud de la frontière, ont réduit le solde du compte courant de 1,8 G$ comparativement au troisième trimestre, pour un déficit net de 513 M$.

«Je crois que nous observons un changement dans la balance commerciale qui va rester avec nous pour quelques années», a analysé l'économiste en chef adjoint de la Banque de Montréal, Douglas Porter.

«Et pour une rare fois depuis des décennies, nous pourrions nous retrouver avec un déficit de marchandises dans l'ensemble. Nous avons déjà franchi plus que la moitié des niveaux de pointe.»

Pour l'ensemble de 2007, le compte courant - la plus large mesure du commerce international - a affiché un excédent de 14,2 G$, une forte baisse comparativement au surplus de 23,6 G$ enregistré en 2006.

Mais plusieurs économistes s'attendent à ne voir que de l'encre rouge en 2008, pour un déficit qui pourrait s'élever jusqu'à 20 G$.

Les nouveaux signes de faiblesse économique croissante pourraient forcer le nouveau gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, à réagir de façon importante mardi en réduisant le taux d'intérêt directeur de la banque d'un demi point de pourcentage à 3,5%, a estimé l'économiste Krishen Rangasamy, de la CIBC.

La publication des données de vendredi a aussi mis un frein à la récente reprise du dollar canadien, .

«La Banque du Canada doit réagir à cela, a affirmé M. Rangasamy. Une réduction de 50 points de base stimulerait l'économie en réduisant le coût de l'emprunt, ce qui encouragerait les investissements et les dépenses.»

La plupart des grands indicateurs compris dans les données du compte courant ont affiché des reculs en décembre, a précisé Statistique Canada.

L'excédent au chapitre des biens s'est retrouvé à 9,3 G$, soit en deçà de la barre des 10 G$ pour la première fois au cours de la présente décennie, la diminution des exportations s'étant poursuivie pour un troisième trimestre consécutif. Pendant ce temps, le déficit habituel des services a grimpé à 5,8 G$.

«Ceci est conforme avec le fait que le secteur du commerce agit comme un frein sur la croissance du produit intérieur brut une fois de plus au quatrième trimestre, a noté l'analyste Dawn Desjardins, de la Banque Royale.

Nous croyons que les exportations nettes réelles ont réduit la croissance trimestrielle d'environ 2,6 points de pourcentage au cours du trimestre.»

De plus, les firmes étrangères ont continué à avaler les entreprises canadiennes, particulièrement dans le secteur des ressources.

Les flux d'investissements directs ont bondi à 47 G$ au quatrième trimestre pour un total de 115,4 G$ sur l'ensemble de l'année, ce qui a même dépassé la montée en flèche des investissements étrangers au Canada pendant la bulle technologique de 2000.

«Nous avons vu des entreprises bourrées d'argent mettre la main sur tout ce qu'elles pouvaient dans le secteur des ressources, même si le dollar canadien est très élevé», a noté M. Porter.

Mais l'économiste a ajouté que la détérioration de la balance commerciale devrait être placée en perspective avec la situation des Américains, qui paient une facture salée pour avoir affiché un déficit commercial pendant plusieurs années.

«Même si notre déficit grimpait à 20 G$, ce qui est bien possible, cela ne serait qu'un peu plus qu'un pour cent du PIB, tandis que les États-Unis ont passé plusieurs années avec des déficits qui atteignaient cinq ou six pour cent de leur PIB, a-t-il noté.

Nous sommes encore bien loin de la situation des États-Unis.»

Le déficit au chapitre des voyages a aussi atteint un record au quatrième trimestre, a précisé Statistique Canada, la vigueur du dollar canadien encourageant les Canadiens à aller faire un tour aux États-Unis - autant pour des vacances que pour de courtes expéditions de magasinage.