Marie et son frère jumeau Pierre passent l'après-midi ensemble. Ils vont d'abord prendre les chemises qu'ils ont déposées la veille chez le nettoyeur à sec du quartier.

Marie et son frère jumeau Pierre passent l'après-midi ensemble. Ils vont d'abord prendre les chemises qu'ils ont déposées la veille chez le nettoyeur à sec du quartier.

Ensuite, ils se rendent au salon de coiffure pour une coupe. Comme les deux portent leurs cheveux courts, l'opération est vite expédiée. Avant de rentrer à la maison, ils arrêtent à la pharmacie pour acheter un flacon d'eau de toilette.

Même marque et même format, mais en version pour femme et pour homme. «Un après-midi qui coûte cher», dit Marie à son frère, en sortant du magasin.

«Pas si mal, lui répond-il. J'ai dépensé 70$. Et toi?» Marie fait le calcul. Dans son cas, pour des produits et des services similaires, sa facture s'est élevée à 111$.

Si Pierre et Marie sont deux personnes fictives, les différences de prix relevées sont bien réelles.

Hommes et femmes ne paient pas toujours le même prix pour des produits et services comparables. À vos affaires a fait un suivi sur une question quelque peu oubliée depuis les années 90, époque où elle avait fait couler beaucoup d'encre.

Dans les petits pots, le meilleur exemple. Même si l'industrie du cosmétique courtise la gent masculine depuis au moins 15 ans, les produits pour hommes à la formule similaire sont généralement vendus moins cher.

«Les compagnies se sont dit que les femmes paieraient plus parce que nous sommes soumises à des impératifs de beauté bien plus stricts», estime Frances C. Whittelsey.

«Le marché masculin reste en développement, et la sensibilité au prix est différente dans ce cas», tempère JoAnne Labrecque, professeure à HEC et spécialisée en commerce de détail.

Le centre d'esthétique ATL Laser illustre cette évolution. Les prix indiqués sur son site ont de quoi surprendre. Une séance d'épilation laser des joues: 99$ pour les femmes, 75$ pour les hommes. Les mains: 159$ pour les femmes, 100$ pour les hommes, etc.

Selon Dolores McDonough d'ATL Laser, ces prix remontent à au moins trois ans. Le marché a changé et, aujourd'hui, les tarifs, plus bas, sont basés sur la durée du traitement, affirme-t-elle. Par exemple, une séance d'épilation des aisselles coûte 60$ pour les femmes et 89$ pour les hommes.

À chacun donc d'ouvrir l'oeil. Car les marchés sont bourrés d'illogismes, et pas toujours au détriment des femmes.

En décembre dernier, la firme d'études de marché Euromonitor International signalait qu'en Amérique latine, les déodorants pour hommes coûtent deux fois plus cher que les produits similaires destinés aux femmes. ¡Ay, caramba!

Par contre, dans les trois magasins que nous avons visités, nous n'avons pas constaté de différence de prix dans les déodorants, les lames et les rasoirs jetables comparables. Même que dans un Zellers, les gels à raser Satin Care (de marque Gillett) étaient nettement moins chers que les gels Gillette Series, pour la même quantité (3,46$ vs 4,58$).

Ce même Zellers remporte carrément la palme en matière d'équité des prix. Le «t-shirt parfait» de la marque Midtown était 7,47$ pour toutes les tailles féminines, ainsi que pour les tailles P et TG masculines.

Quant aux hommes qui portent du 2TG et 3TG, ils devaient débourser 8,97$ pour le même t-shirt, présumément en raison de la quantité additionnelle de tissu.

Commentaires entendus pendant les débats sur le projet de loi ontarien

«Je suis heureuse que cette loi ait été proposée, car j'en ai assez de payer plus cher que mon conjoint pour mes vêtements. J'en ai assez de payer plus cher chez le coiffeur.»

- Marilyn Churley, députée de Toronto-Danforth.

«Si vous voulez payer le même prix pour vos chemises, que vous soyez un homme ou une femme, allez chez Lee Wah Laundry. Je viens de parler avec M. Lee et il m'assure qu'il ne se soucie pas du sexe de la personne qui lui amène la chemise et qui la porte.»

- Tim Hudak, député d'Erie-Lincoln

«Il y a certains - pas tous, mais certains - établissements et commerçants qui font de la discrimination basée sur le sexe. Un dollar dans la main d'une femme devrait valoir la même chose qu'un dollar dans la main d'un homme. Une femme ne devrait pas avoir à magasiner pour trouver un nettoyeur qui lui fera le même prix qu'à un homme.»

- Lorenzo Berardinetti, député de Scarborough Southwest et auteur du projet de loi