Le Canada ne parviendra peut-être pas à éviter une décroissance économique, mais il ne s'apprête pas à revivre les affres des récessions de 1982 et de 1990.

Le Canada ne parviendra peut-être pas à éviter une décroissance économique, mais il ne s'apprête pas à revivre les affres des récessions de 1982 et de 1990.

L'allègement monétaire pratiqué par la Banque du Canada depuis le début de la présente crise financière maintiendra la croissance de la demande intérieure, soutient Yanick Desnoyers, économiste principal à la Financière Banque Nationale. "Au Canada, la demande intérieure (consommation, investissement et dépenses gouvernementales) s'effondre seulement lors des resserrements monétaires par la Banque du Canada et ce, quelles que soient la durée et la profondeur de la récession aux États-Unis", écrit-il dans la dernière livraison de L'Hebdo économique.

Or, les récessions douloureuses sont précisément celles où la demande intérieure se replie.

C'est le cas maintenant aux États-Unis. C'était le cas au Canada en 1990 quand la politique monétaire de la banque centrale avait poussé le taux directeur jusqu'à 500 centièmes au-dessus des taux directeurs américains. Étouffés, le consommateur et l'entrepreneur canadiens avaient capitulé tandis que les gouvernements tentaient de contenir leurs déficits.

Cette fois-ci, la Banque du Canada a abaissé son taux directeur de 225 centièmes en un an. Son travail à ce chapitre n'est sans doute pas terminé, a-t-elle indiqué dans sa plus récente baisse de taux, le 21 octobre. Le taux cible de financement à un jour se situe à 2,25%. Présentement, la demande intérieure canadienne progresse de 4% en rythme annuel. On est encore loin d'une capitulation synchronisée du consommateur, des entreprises et des gouvernements.

Cela dit, comme le quart de l'économie canadienne repose sur ses exportations en partance surtout vers les États-Unis, la récession américaine va mordre. M. Desnoyers n'exclut pas un recul du produit intérieur brut durant deux trimestres d'affilée, qui correspond à la définition technique d'une récession.

Il croit aussi que le taux de chômage pourrait grimper jusqu'à 7% l'an prochain, d'un océan à l'autre. Il se situait à 6,2% le mois dernier, soit moins que les 6,5% des États-Unis. "Cela contraste avec les hausses substantielles de six points de pourcentage et de 4,5 points de pourcentage respectivement en 1982 et 1990", rappelle M. Desnoyers.

Le taux d'emploi est plus élevé chez nous que chez l'Oncle Sam. Ce taux correspond à la portion de la population âgée de 15 et plus (16 ans aux États-Unis) qui détient ou recherche activement un emploi. Un taux d'emploi plus élevé stimule davantage la consommation au moment où, de surcroît, les finances publiques sont davantage en ordre qu'en 1990 ou qu'aux États-Unis.

Le Canada dispose en outre d'attributs qu'il n'avait pas en 1990. La dépréciation soudaine du huard augmentera la marge bénéficiaire des exportateurs tandis que les expéditeurs de produits de base subiront moins les contrecoups de l'effondrement des prix fixés en dollars américains.

"Même si nous n'excluons pas la possibilité que le Canada enregistre une récession technique vu la sévérité de la récession américaine, brandir le spectre d'une récession sévère comme celles de 1990 ou de 1982 au Canada ne nous semble pas justifié", dit-il.