Les investisseurs québécois ont eu toutes les raisons du monde, en 2007, de développer une méfiance marquée à l'égard des produits financiers.

Les investisseurs québécois ont eu toutes les raisons du monde, en 2007, de développer une méfiance marquée à l'égard des produits financiers.

C'est en raison du retentissement médiatique des procès de Vincent Lacroix (Norbourg) et Benoît Laliberté (Jitec) intentés par l'Autorité des marchés financiers (AMF).

L'onde de choc a été amplifiée par le fait qu'une forte proportion de Québécois compte parmi ses proches et ses connaissances un investisseur floué.

Les témoignages de détresse et de colère entendus à la fin des procès de Laliberté et de Lacroix ont fait réaliser à bien des gens que leur sécurité financière n'est peut-être pas aussi bien assurée qu'ils le croient.

Il ressort que ceux qui avaient investi dans une filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec, passée entre les mains de Lacroix, ont dormi sur leurs deux oreilles, confiants. L'idée que leurs avoirs pouvaient être en péril ne leur a jamais effleuré l'esprit.

La même confiance habitait ceux qui constataient que Vincent Lacroix présentait ses états financiers et que ceux-ci étaient examinés et approuvés par l'AMF. Pourquoi se seraient-ils inquiétés ?

Dans le cas de Laliberté, il a fait miroiter d'importants contrats au grand public, par voie de communiqué, ce qui a suscité l'engouement pour sa compagnie Jitec. Comment les investisseurs auraient-ils pu croire que ce chef d'entreprise jouait sur les mots, se comportait comme un illusionniste.

D'autres investisseurs potentiels, plus particulièrement des gens d'affaires de Drummondville, ont prêté foi à des rumeurs et des sous-entendus relativement à des contrats mirobolants. Ils ne demandaient pas mieux que d'y croire, ayant réalisé pour la plupart des gains importants au préalable avec des actions d'une compagnie pharmaceutique. Dans Jitec, ils ont plutôt laissé leur chemise.

Vincent Lacroix connaîtra sa sentence le 28 janvier pour avoir contrevenu à la Loi sur les valeurs mobilières. Quant à Benoît Laliberté, on saura le 11 février s'il est reconnu coupable des constats d'infraction émanant de l'AMF. Les deux hommes font également l'objet de recours collectifs.

Il y a fort à parier que les investisseurs québécois ont perdu bien des illusions à la lumière des informations mises en lumière tout au long des procès des Lacroix et Laliberté.

Fraudes et confiance

Une étude pancanadienne menée en 2007 a démontré qu'un Canadien sur 20 a déjà été victime d'une fraude financière et que la moitié d'entre eux ont rencontré le fraudeur par l'entremise d'une personne de confiance, soit un ami, un collègue ou encore un membre de la famille.

Voulant éviter la désertion des marchés des capitaux, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières, dont l'AMF, ont profité des occasions offertes au cours des dernières mois pour servir des mises en garde contre des investissements trop risqués, qui ne conviennent pas au commun des mortels ou qui sont proposés par des personnes ou sociétés non autorisées à acheter et vendre des produits de placement.

Parmi les conseils fournis, on trouve celui de ne pas agir sur la base d'une information dite privilégiée, parce que c'est illégal et généralement faux. Une recommandation veut que l'investisseur vérifie si celui qui propose des investissements a bien un permis pour exercer au Québec auprès du Centre de renseignements de l'AMF.

Il reste que l'univers des produits et services financiers demeure un secteur complexe où circulent des fraudeurs contre lesquels, malgré toutes les précautions prises, il demeure impossible de se prémunir totalement.

Il est évident que l'affaire Norbourg a servi d'électrochoc. L'AMF a été active comme jamais au cours de la dernière année financière dans l'espoir manifeste de restaurer la confiance des investisseurs québécois et assurer l'intégrité des marchés.

Les quelques curieux qui ont suivi en direct les procès intentés à Vincent Lacroix et Benoit Laliberté ont pu constater qu'ils n'ont pas agi seuls. Ils auraient profité de la connivence de courtiers et de conseillers juridiques, notamment, et du manque de vigilance de certains autres groupes professionnels qui auraient, à des degrés divers, détourné le regard pour ne pas tuer la poule aux oeufs d'or.

Il n'est d'ailleurs pas du tout exclu que des poursuites soient intentées également contre eux.

Une année 2008 bien remplie

L'année 2008 s'annonce fort active. Deux gros dossiers initiés par l'AMF reviendront devant les tribunaux.

Celui de Mount Real est l'un de ceux-là. Le 24 janvier 2007, l'AMF avait porté 619 chefs contre 24 individus ayant agi à différents niveaux dans le dossier de Mount Real Corporation et ses filiales.

Seuls Victor Lacroix et Armando Ferruci ont été condamnés jusqu'ici à payer des amendes respectives de 156 000 $ et 288 888 $. Un total de 1600 investisseurs de Mount Real ont perdu 130 M$ dans cette affaire.

Le second procès concerne Steven Demers, le fondateur de la société Enviromondial qui transforme les déchets en énergie renouvelable. Du 28 janvier au 8 février 2008, 162 des 346 accusations portées contre Demers seront entendues. Des amendes de 1,2 million $ sont réclamées.

Il est à signaler que l'AMF a retroussé ses manches au cours de la dernière année financière au chapitre des pré-enquêtes, enquêtes et recours judiciaires.

Pas moins de 298 pré-enquêtes ont été ouvertes, comparativement à 165 l'année précédente, alors que 127 enquêtes ont pris fin en cours d'année et que le nombre de recours judiciaires a presque doublé pour atteindre 49, contre 26 l'année précédente.

L'AMF a reçu 1986 plaintes, contre 1056 l'année précédente. L'augmentation est attribuable à un dossier, celui de Mount Real.