Joao de Matos, dont l'agence de voyages est établie dans le secteur brésilien de Manhattan depuis les années 70, examine un graphique qui décrit la montée de la devise brésilienne par rapport au dollar américain et ça l'inquiète pour ses affaires.

Joao de Matos, dont l'agence de voyages est établie dans le secteur brésilien de Manhattan depuis les années 70, examine un graphique qui décrit la montée de la devise brésilienne par rapport au dollar américain et ça l'inquiète pour ses affaires.

«Je ne peux rien y faire», soupire M. de Matos en entrant des chiffres dans sa calculatrice pour déterminer la hausse de prix qu'il doit pratiquer sur des forfaits à Rio de Janeiro. «Naguère, le Brésil était un pays bon marché, mais ce n'est plus le cas maintenant», ajoute-t-il.

Le 1er février dernier, M. de Matos, 59 ans, a pu observer le réal faire un bond de 1,1%, son plus fort gain depuis septembre dernier. Cette remontée s'inscrit dans la tendance à la hausse qui a fait que le réal a progressé de 69% en quatre ans par rapport à la devise américaine, ce qui en fait la plus performante à ce titre dans le monde. Cette année, le réal affiche une hausse par rapport à toutes les 70 devises suivies par Bloomberg, sauf la couronne islandaise.

La forte augmentation des exportations de jus d'orange, de sucre, de café, de soja et de minerai de fer de même que des taux d'intérêt à 12,9% attire les investisseurs. La semaine dernière, le réal clôturait à 2,105 réals au dollar, ce qui a été près de son niveau le plus haut depuis mai dernier.

Cette progression a fait pâtir les profits de manufacturiers tels que Volkswagen, qui exporte dans 30 pays à partir de ses usines brésiliennes, et elle a rendu le pays de plus en plus cher pour les visiteurs étrangers. Ainsi, une course en taxi de la plage de Copacabana, à Rio de Janeiro, jusqu'à l'aéroport coûte maintenant 34$US comparativement à 18 $ US il y a quatre ans.

Une chambre de grand luxe donnant sur l'océan Atlantique au Copacabana Palace, lieu de refuge de célébrités telles que Frank Sinatra et Mick Jagger, coûte 2480$US la nuitée comparativement à 1840$US en 2005.

La demande de la devise brésilienne est en hausse tandis que des investisseurs étrangers achètent les titres de dette du Brésil. Les taux de rendement des obligations gouvernementales de deux ans sont de 7,4 points de pourcentage plus élevés que les titres comparables du Trésor américain et de 8,55 points de plus que ceux d'Allemagne.

Les investisseurs attirés

L'obligation de référence du Brésil libellée en réal et dont l'échéance est en 2008 a présenté un rendement de 18,1% au cours des 12 derniers mois. Si l'on convertit en dollar américain, on obtient un rendement de 25,2%.

Ces rendements plus élevés ont rendu le Brésil très attrayant aux yeux des investisseurs qui achètent en yens japonais (pays où le taux d'emprunt est de 0,25%) et qui réinvestissent en titres de dette libellés en réal. Les investisseurs étrangers ont multiplié par cinq l'an dernier leurs possessions de titres de dette en reals à 38,4 milliards de réals (18 milliards US).

«Le Brésil a été l'un des meilleurs marchés au chapitre des devises au cours des deux dernières années», indique Claudia Calich, qui gère des titres de dette de marchés émergents de 900 millions US chez Invesco Inc., à New York. «Les plus forts gains sont chose du passé, ajoute-t-elle, mais je ne crois pas que ce soit fini.»

Ces entrées de fonds au Brésil ont considérablement nui aux efforts de la banque centrale brésilienne pour contenir la progression du réal. La banque a donc vendu des réals contre des dollars américains chaque jour depuis juillet dernier. Ces initiatives ont fait en sorte que les réserves de devises étrangères ont grimpé à un sommet record de 91,6 milliards US, comparativement à 56,9 milliards US un an plus tôt et à 32,4 milliards US en juin 2002.

En septembre dernier, Volks-wagen a annoncé qu'il licencierait 3600 travailleurs de son effectif de 12000 employés de son usine de la banlieue de Sao Paulo parce que le redressement du real affecte les exportations.

Les gains constants de la devise brésilienne sur une aussi longue période sont un fait nouveau dans ce pays qui a connu huit devises différentes depuis la Deuxième Guerre mondiale et qui a vu le réal plonger de 35% aussi récemment qu'en 2002.