Hausse importante des droits de scolarité et pénalités aux baby-boomers qui veulent prendre une retraite anticipée: Raymond Bachand avait les yeux braqués sur le long terme en préparant son second budget.

Québec garde le cap sur son «plan réaliste» de retour au déficit zéro pour 2013-2014. L'an passé, le gouvernement a dépensé 700 millions de plus que prévu, mais avec une croissance économique plus vigoureuse (3%), 1 milliard de recettes supplémentaires ont permis de réduire le déficit de 300 millions pour le ramener à 4,2 milliards de dollars.

Le tableau change pour l'année financière qui débute: la croissance revient à 2% ; le déficit, à 3,8 milliards, est de 900 millions de plus que prévu. Québec renonce à 311 millions de compressions, a reçu 200 millions de moins de ses sociétés et met 300 millions de côté pour des imprévus.

Le second budget Bachand ne va pas chercher de nouvelles taxes ou tarifs. Les contribuables étaient déjà passés à la caisse avec une cascade de mauvaises surprises l'an dernier.

Étudiants et rentiers

Québec annonce que, chaque année pendant cinq ans, les étudiants verront les droits de scolarité augmenter de 325$, une majoration de 1625$ par année en 2016-2017. Une année à l'université coûtera alors 3793$ comparativement à 2168$ actuellement. Même avec ces hausses, les étudiants québécois ne paieront que 70% de la moyenne canadienne. Leur contribution correspondra à 17% du coût de leurs études (elle est de 13% actuellement). «Il faut avoir les universités les plus performantes, et les frais de scolarité sont une composante», a dit M. Bachand. Le régime de prêts et bourses sera bonifié pour annuler l'impact de la hausse pour les étudiants moins fortunés.

Afin d'assurer la viabilité à long terme du régime de rentes du Québec, le gouvernement annonce une série d'ajustements douloureux. «Pour des raisons démographiques, la caisse de la Régie des rentes sera à sec dans une trentaine d'années», a prévenu M. Bachand. «Une contribution à un régime de retraite n'est pas une taxe», a-t-il insisté.

On augmente donc progressivement sur six ans, de 5 à 6%, la pénalité actuarielle annuelle pour ceux qui veulent partir à la retraite à 60 ans, ce qui est le cas d'environ 60 000 personnes par année. Avec un salaire de 48 000$ -le maximum assurable-, ces nouveaux retraités verront à terme leur rente annuelle, actuellement de 8000$, être amputée de 691$. Québec hausse aussi le taux de cotisation des salariés et des employeurs de 0,1% par année pour la faire passer de 9,9% à 10,8% de la masse salariale. Au maximum assurable, salariés et employeurs se partageront une hausse annuelle de 67$.

En dehors des droits de scolarité et des rentes, il n'y a pas de grandes manoeuvres dans le budget d'hier -M. Bachand avait frappé fort l'an dernier avec des hausses de la TVQ et la «contribution santé» de 200$. L'ensemble des décisions annoncées dans ce budget coûtera 170 millions de dollars au gouvernement en 2010-2011; la facture atteindra 335 millions en 2013-2014.

Cette année, on saupoudre des millions dans diverses mesures: 17 millions iront la réalisation du Plan Nord -un projet toujours vague hier -et 45 millions à des mesures pour mieux exploiter les richesses minières, gazières et forestières.

Québec injectera à terme, dans trois ans, 25 millions pour que les élèves de sixième année reçoivent un enseignement intensif de l'anglais. Dès la rentrée 2011, les écoles auront accès à 240 millions pour des ordinateurs et des tableaux interactifs. On annonce aussi la création de 15 000 places supplémentaires en garderies subventionnées, un engagement reporté toutefois de 2013 à 2016. Une série de mesures pour favoriser le maintien à domicile des aînés obtiendront une quinzaine de millions dès cette année.

Dépenses et dette

Le portrait des dépenses est plus complexe. Les dépenses de programmes, 61 milliards, augmentent de 2,4%, essentiellement parce que Québec isole les contributions des fonds importants mis en place l'an dernier pour les infrastructures et la santé, notamment -on compte désormais plus de 35 fonds spéciaux. Les dépenses de ces deux fonds grimpent de 6,1% en 2011-2012 et de 9,9% l'année suivante.

Avec ces fonds, les déficits des établissements de santé et le service de la dette, les dépenses de Québec totalisent 84 milliards de dollars, une augmentation de 4% par rapport à l'année 2010-2011.

Les chiffres de la dette sont plus transparents et révèlent la précarité des finances publiques. En 3 ans, l'endettement aura augmenté de 30 milliards, passant de 163 à 173 et 183 milliards en 2011-2012.

«On est dans nos cibles», a dit M. Bachand, qui a rappelé que le dégel des tarifs d'électricité dès 2014 permettra de s'y attaquer. Pour freiner la dette, Québec versera le quart des redevances des richesses naturelles au Fonds des générations. Mais par rapport au PIB, la dette atteint un record de 55%.