La dette du Québec est devenue très préoccupante et le gouvernement a décidé de s'y attaquer.

D'ici 15 ans, la dette sera donc significativement réduite en proportion de la taille de l'économie, selon le budget. Et le gouvernement se servira d'Hydro-Québec pour y parvenir.

À la fin février, le ministère des Finances a provoqué un débat houleux sur l'endettement en publiant un document qui place le Québec au 5e rang des pays industrialisés les plus endettés (OCDE). Certains ont reproché au ministère de n'utiliser qu'un concept de comparaison défavorable, soit la dette brute.

Or, dans un document publié hier, le ministère a complété son analyse avec la deuxième méthodologie de l'OCDE, la dette nette, et la comparaison est aussi peu flatteuse. Ainsi, la dette nette du Québec est à 55,9% du PIB, selon cette comparaison, et le Québec se placerait encore au 5e rang des principaux pays industrialisés s'il était indépendant (en incluant la portion de la dette fédérale).

À cet égard, le Québec serait seulement devancé par l'Italie (89,6%), le Japon (84,4%), la Belgique (74,1%) et la Grèce (73,9%). Selon cette méthodologie, la dette nette du Québec serait supérieure à celle des États-Unis (47,2%), de la zone Euro (44,8%) et de l'Espagne (22,8%). La moyenne de l'OCDE est de 41,9% et le Canada pris dans son ensemble est à 22,4%.

Le ministre des Finances, Raymond Bachand, a été clair. «Même si une partie de cet endettement correspond à des actifs de qualité, même si l'économie du Québec est diversifiée, même si le Québec dispose de ressources naturelles abondantes, cette situation est préoccupante. Nous ne devons pas alourdir le fardeau des Québécois qui nous suivront. Il est inconcevable de faire payer par les générations futures une partie des services que nous donnons aujourd'hui».

Deux cibles

Le gouvernement se donne donc deux cibles de réduction de la dette publique. La première concerne la dette représentant les déficits cumulés. Cette dette est de 106,6 milliards au 31 mars 2010, soit 35,4% du PIB. Le gouvernement veut la réduire à 17% du PIB d'ici le 31 mars 2026.

La deuxième cible concerne la dette brute, actuellement de 160,1 milliards ou 55,1% du PIB. D'ici 2026, le gouvernement veut réduire cette dette à 45%.

Pour parvenir à de tels résultats, Québec comptera bien sûr sur la croissance de l'économie. Cette croissance fait gonfler le PIB et réduit automatiquement le poids de la dette.

Mais le gouvernement a également l'intention d'utiliser les recettes additionnelles d'Hydro-Québec. Entre 2014 et 2018, le gouvernement veut augmenter de 3,7% par année les tarifs d'électricité provenant du bloc patrimonial, en plus des hausses normales. À terme, cette hausse représentera 1,6 milliard de revenus additionnels par année.

Ces revenus seront versés au Fonds des générations, gérés par la Caisse de dépôt, dont le solde est de 3,6 milliards actuellement.

32 milliards de plus en cinq ans

Au cours des cinq prochaines années, la dette brute du gouvernement augmentera de près de 32 milliards, pour atteindre 192,2 milliards en 2015. Les facteurs qui feront augmenter la dette sont les déficits budgétaires (8,6 milliards), les placements dans les sociétés d'État dont Hydro-Québec (4,1 milliards), les investissements dans la santé et l'éducation (6,6 milliards) et ceux dans les immobilisations (15,9 milliards). Le Fonds des générations contribuera à réduire la dette de 6,6 milliards.

Le Québec est la province la  plus endettée. Et d'ici deux ans, les intérêts sur la dette auront augmenté de 2,2 milliards, à 10,1 milliards. «C'est autant d'argent qui n'est pas investi dans le décrochage scolaire et les services de garde», critique la cheffe du Parti québécois, Pauline Marois, qui attribue la croissance de la dette au gouvernement Charest.

Pour la comparaison internationale, le ministère des Finances utilise également les cotes de crédit établies par les grandes agences. La cote du Québec (A+ selon Standard & Poor's) est au même niveau que le Portugal, mais trois rangs plus haut que la Grèce (BBB+). Standard & Poor's attribue au Canada sa plus haute cote (AAA), quatre rangs au-dessus du Québec.

Précisons qu'aux fins de la comparaison internationale, le ministère inclut dans sa dette la part de la dette fédérale en proportion de la population. De plus, l'endettement net inclut la valeur comptable d'Hydro-Québec (23,4 milliards), tel que le prévoit la méthodologie de l'OCDE, valeur qui est toutefois significativement inférieure à la valeur marchande de la société d'État.

Enfin, la comparaison ne tient pas compte du fait que les pays de l'OCDE verront leur dette croître plus rapidement que celle du Québec au cours des prochaines années en raison de la crise financière.