Chaque semaine, notre journaliste répond aux questions scientifiques de lecteurs.

La couleur de nos yeux influence-t-elle la façon de voir les couleurs de ce que nous voyons ?

Bernard Imbeault

Non, mais il y a de subtiles différences de vision selon la couleur des yeux.

La pupille des iris bruns a une plus grande contractilité – c’est-à-dire une plus grande capacité à se contracter pour modifier la quantité de lumière qui atteint la rétine – que celle des yeux verts et bleus, explique Philippe Valmaggia, de l’Université de Bâle, en Suisse, qui a publié en novembre dernier une étude sur le sujet dans la revue Translational Vision Science and Technology. « Nous n’avons pas encore mesuré quel impact clinique cela avait. »

Marie-Claude Robert, ophtalmologiste au CHUM, confirme que les gens qui ont des yeux bleus sont plus facilement éblouis que ceux qui ont des yeux bruns. « C’est probablement la cause de la différence de contractilité observée dans l’étude », dit la Dre Robert.

Elle prévient cependant que les différences sont faibles comparées aux variations naturelles dans la population, et que la revue où l’étude suisse a été publiée a un faible « facteur d’impact », une mesure de la qualité d’une revue scientifique.

L’étude du DValmaggia a été faite sur 71 patients en santé.

Les études scientifiques sur les effets cliniques de la couleur des yeux ne courent pas les rues. Une étude texane, publiée en 2010 dans le Journal of Ocular Pharmacology and Therapeutics, a conclu que la couleur des yeux n’affecte pas la capacité de voir dans la pénombre. Une étude australienne, publiée en 2000 dans l’American Journal of Ophtalmology, affirmait de son côté que les yeux bleus augmentaient le risque de cataracte de 60 %. Et une étude autrichienne, publiée en 2012 dans la revue Graefe’s Archive for Clinical and Experimental Ophtalmology, concluait que les gens ayant des yeux bruns étaient 14 % moins souvent victimes d’éblouissements pathologiques, mais n’avaient pas une meilleure acuité que les gens ayant des yeux bleus.

La dégénérescence maculaire est le seul trouble pour lequel il existe un lien démontré avec la couleur des yeux, selon la Dre Robert.

PHOTO TIRÉE DU SITE WEB DE L’UNIVERSITÉ DE MONTRÉAL

La Dre Marie-Claude Robert, ophtalmologiste au CHUM

Il est connu que la couleur des yeux augmente très faiblement le risque de dégénérescence maculaire.

La Dre Marie-Claude Robert, ophtalmologiste au CHUM

« Les femmes et les hypermétropes ont aussi un risque un peu plus élevé », souligne l’ophtalmologiste.

La Dre Robert juge qu’il s’agit d’un sujet délicat. « Je vois parfois des patients qui ont tenté ou envisagent une opération pour changer la couleur de leurs yeux, dit la Dre Robert. Ce ne sont pas des interventions sécuritaires. C’est même très dangereux. Il ne faudrait absolument pas que les gens pensent que la couleur de leurs yeux les prédispose à des problèmes de santé à un tel niveau qu’il faut changer de couleur. »

À la base, à quoi est due la différence de couleurs des yeux ? « Les yeux bruns ont des pigments et les yeux bleus n’en ont pas, dit la Dre Robert. On voit le fond de l’œil, qui est sombre, mais par diffraction, il apparaît bleu. C’est comme le ciel qui est bleu même si l’espace derrière est noir. »

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En savoir plus
  • 22 %
    Proportion des Français qui ont les yeux bleus
    SOURCES : Forensic Science International, Académie américaine d’ophtalmologie
    27 %
    Proportion des Américains qui ont les yeux bleus
    SOURCES : Forensic Science International, Académie américaine d’ophtalmologie
  • 65 %
    Proportion des Danois qui ont les yeux bleus
    SOURCES : Forensic Science International, Académie américaine d’ophtalmologie