Plus une personne est éduquée, plus elle croit les fausses nouvelles correspondant à ses orientations idéologiques, parce qu'elle utilise ses outils intellectuels pour justifier cette croyance, selon des chercheurs américains. La solution: une meilleure éducation sur la vie professionnelle des scientifiques.

« Quand une personne est plus habile avec les chiffres et les concepts scientifiques, elle a plus de facilité à manipuler la réalité pour qu'elle soit conforme à ses préjugés », explique Joanna Huxster, une étudiante au postdoctorat à l'Université Bucknell en Pennsylvanie.

Elle participait à une conférence sur les fausses nouvelles à la réunion annuelle de l'Association américaine pour l'avancement de la science, à la mi-février à Boston. « Nous pensons que c'est ce qui explique le lien faible entre les connaissances scientifiques et le manque de confiance envers les études et les consensus scientifiques. »

La chercheuse américaine a fait trois études-pilotes qui semblent confirmer que les gens éduqués qui sont mieux informés sur la « structure sociale scientifique », notamment la manière dont les subventions à la recherche sont dépensées et le processus des comités de révision (peer review), sont moins susceptibles de détourner les nouvelles scientifiques pour qu'elles confirment leurs préjugés, par exemple à propos des changements climatiques ou des OGM. Une étude nationale est en cours pour finaliser la validité de la théorie.

« Beaucoup de gens pensent que les scientifiques mettent dans leurs poches les subventions à la recherche, dit Mme Huxster. Ils ne savent pas que ces fonds servent à payer des assistants de recherche et des équipements. Pratiquement personne dans la population ne sait que les études publiées dans les revues sérieuses sont approuvées par des comités de révision complètement indépendants. »

Les revues scientifiques prestigieuses ne publient que les études approuvées par un comité de révision composé à partir d'une banque de chercheurs familiers avec le sujet de l'étude, dont le nom est tenu secret pour éviter qu'ils soient l'objet de représailles de la part des auteurs. Ces derniers ont généralement la possibilité de modifier leurs articles pour refléter les critiques des réviseurs, si elles ne sont pas trop sévères.

« S'il s'avère qu'une meilleure compréhension de la vie professionnelle des scientifiques amenuise la propension à utiliser ses connaissances pour confirmer ses préjugés, il faudra enseigner l'ABC de la méthode scientifique et du processus de publication à l'école », dit M. Huxster.