Le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Brian Gallant, a annoncé mercredi que son gouvernement abrogera un règlement qui limite depuis des décennies l'accès à l'avortement dans la province.

Dans un geste inattendu, M. Gallant a indiqué qu'à compter du 1er janvier, la femme qui souhaite un avortement ne devra plus «obtenir l'avis de deux médecins pour attester que l'intervention est nécessaire d'un point de vue médical». De plus, la province éliminera l'exigence voulant que l'intervention soit pratiquée par un spécialiste, et dans deux hôpitaux seulement: l'avortement pourra donc être pratiqué par tout omnipraticien qualifié, ce qui devrait réduire les délais.

«La modification placera les interventions en matière de santé reproductive dans la même catégorie que n'importe quel autre service médical assuré», a indiqué le premier ministre, à Fredericton. «On va travailler avec les deux régies régionales pour être capables d'augmenter la capacité et d'améliorer la disponibilité dans les délais opportuns (...) et le gouvernement va améliorer l'accès à des renseignements exacts qui ne portent aucun jugement.»

Le premier ministre libéral a déclaré que son gouvernement voulait ainsi respecter les obligations juridiques de la province en vertu du jugement de la Cour suprême du Canada et de la Loi canadienne sur la santé, en ce qui concerne le droit de la femme à choisir.

Le sujet a refait surface lors de la fermeture, en juillet, de la seule clinique privée d'avortement de la province. La clinique Morgentaler, à Fredericton, invoquait un manque de financement du gouvernement pour justifier sa décision de cesser ses activités. Certaines femmes ont dû se rendre aux États-Unis ou dans d'autres provinces pour obtenir cette intervention en temps voulu.

Le premier ministre Gallant a cependant précisé mercredi que les avortements couverts par l'assurance-maladie devront être pratiquées dans un centre hospitalier.

Le chef néo-démocrate de la province, Dominic Cardy, qui souhaitait l'abrogation du règlement 84-20 en campagne électorale, en septembre, s'est réjoui de l'annonce de son adversaire libéral, mercredi. Il a cependant espéré que la clinique Morgentaler, déjà très bien équipée, puisse continuer d'offrir des avortements couverts par l'assurance-maladie.

Cette décision inattendue constitue un changement de cap historique pour les libéraux du Nouveau-Brunswick.

«On ne le fait pas parce que c'est historique, on le fait parce que c'est la bonne chose à faire», a répondu M. Gallant aux journalistes. «Il faut respecter les droits de tous les citoyens (...) et cela inclut les droits de la femme à choisir.

«Je ne me fais pas d'illusions: je sais qu'il va y avoir des discussions dans les semaines et les mois à venir», a-t-il convenu. «Comme premier ministre ou comme gouvernement, on n'a pas le luxe ou le privilège de décider quels droits on veut respecter (... mais) je suis très confiant que moi et le gouvernement prenons la bonne décision, et je suis très prêt à défendre cette décision.»

Peter Ryan, de l'organisme Droit à la vie Nouveau-Brunswick, a condamné la décision du gouvernement, qui se soldera, selon lui, par une augmentation des avortements dans la province. «Nous prévoyons que 2000 enfants perdront la vie chaque année au Nouveau-Brunswick», a-t-il soutenu dans un communiqué.