Le projet controversé visant à légaliser l'aide médicale à mourir a franchi une nouvelle étape, mardi, avec l'appui sans équivoque donné par la protectrice du citoyen.

Raymonde Saint-Germain va même jusqu'à souligner le courage démontré en haut lieu, alors que l'Assemblée nationale s'apprête à briser le tabou entourant la délicate question de l'intervention médicale entraînant la mort, dans les cas de grands malades en fin de vie.

Lors de son témoignage en commission parlementaire étudiant le projet de loi 52 sur l'aide à mourir, la protectrice du citoyen a dit approuver la démarche privilégiée par le gouvernement quant à la procédure à mettre en place lorsque des patients sont déterminés à mettre fin à leurs jours et lancent un appel à l'aide à leur médecin.

Elle a jugé qu'il s'agissait d'un projet de loi équilibré, qui allait assurer l'autonomie et la volonté des grands malades souffrants qui demandent à mourir, tout en protégeant le droit à la vie des personnes les plus vulnérables de la société, un droit reconnu dans les chartes.

La protectrice avait cependant quelques recommandations à formuler, comme d'affirmer que le soutien médical accordé aux mourants devait être doublé d'une offre accrue de soins palliatifs. Car l'accès à de tels services est à l'heure actuelle nettement déficient dans plusieurs régions, a-t-elle noté.

«Cet élément est d'une importance capitale. Toute personne, lorsqu'elle arrive à cette étape terminale de sa vie, doit pouvoir bénéficier de soins de qualité et d'un environnement stable où le respect de son intimité est assuré», a-t-elle fait valoir.

De plus, pour que les mourants aient droit à leur intimité et à leur dignité jusqu'à la fin, elle recommande que le projet de loi soit amendé pour faire en sorte que toute personne malade en fin de vie puisse jouir sans frais d'une chambre privée à l'hôpital.

«Il ne faut jamais que la question de l'argent soit un enjeu», quand il s'agit de grands malades à l'agonie, a fait valoir celle qui a pour mandat de protéger les citoyens québécois les plus vulnérables.

Le projet de loi 52, piloté par la ministre déléguée aux Services sociaux, Véronique Hivon, propose d'encadrer de façon stricte les cas de malades incurables qui demandent aux médecins qu'on les aide à abréger leurs souffrances.

Il prescrit notamment les conditions et les balises très précises qui permettront à un médecin de donner suite à une telle demande, sans risque de s'exposer à des poursuites.

En fait, l'accès à la sédation terminale sera très limité et encadré. Pour être jugé admissible à la procédure, le patient majeur devra souffrir d'une maladie incurable, être à l'agonie, et affirmer ne plus pouvoir endurer ses douleurs. Il devra consentir par écrit au traitement. Les personnes inaptes n'y auront donc pas accès.

Deux médecins devront juger de la pertinence de la demande et de la conformité aux conditions imposées.

Mais malgré toutes les précautions prises sur le plan éthique, et toutes les restrictions qui accompagnent ce projet de loi, il ne fait pas l'unanimité.

Parmi ses détracteurs, on trouve aux premières loges le docteur Paul Saba, qui est venu, au nom de la Coalition des médecins pour la justice sociale, démolir le projet de loi 52, qui placerait le gouvernement en conflit d'intérêts, selon lui.

Ainsi, derrière un noble objectif de compassion, le gouvernement cacherait ses véritables intentions: faire des économies sur le dos des grands malades, en accélérant leur mort pour libérer des lits.

«Ils vont faire des économies. C'est clair! Parce qu'il manque de lits, de ressources, dans les CHSLD. Ils coupent partout», a-t-il dit en point de presse, en marge de sa présence en commission.

«Les gens n'osent pas le dire, moi je peux le dire. Je ne suis pas avec un parti politique. Ils ont un intérêt économique pour aller de l'avant», a-t-il assuré.

À ses yeux, ce qu'on appelle l'«aide médicale à mourir» est en fait un acte criminel, donc illégal, et indéfendable sur le plan de l'éthique médicale.

«Le médecin ne doit jamais donner la mort intentionnellement», a soutenu le médecin, qui exerce à Montréal.