Adieu, gardes de 24 heures. Une sentence arbitrale rendue mardi donne à Québec six mois pour faire passer de 24 à 16 heures la durée des tours de garde des médecins résidents dans les hôpitaux.

«C'est une grande nouvelle pour les patients et les résidents, qui pourront travailler dans de meilleures conditions, se réjouit Charles Dussault, président de la Fédération des médecins résidents du Québec. Une forte majorité de nos membres voit ce changement d'un bon oeil. C'est positif pour l'apprentissage et ça évite les inconvénients des lendemains de garde.»

Fatigue, perte de concentration et irritabilité, tels sont les symptômes qui commencent à apparaître au cours d'une garde de 24 heures, ont raconté plusieurs médecins résidents. Privés de sommeil, ils risquent davantage de commettre une erreur médicale. Pire: après 24 heures sans sommeil, les facultés d'une personne sont aussi affaiblies que sous l'effet de l'alcool, note de son côté un professeur à l'Université de Harvard cité par l'arbitre Jean-Pierre Lussier. Parce qu'elles représentent un danger pour les patients, les résidents et leurs familles, les gardes de 24 heures contreviennent à la Charte des droits et libertés de la personne, a en outre tranché l'arbitre.

Une décision sans surprise

Les milieux hospitalier et universitaire se préparaient à ce changement majeur depuis plusieurs mois. À l'automne, un comité réunissant le gouvernement, les milieux universitaire et hospitalier ainsi que les médecins résidents a été mis sur pied pour étudier des solutions de remplacement aux gardes de 24 heures. Ce comité proposera au cours des prochains mois une solution qui puisse être adoptée de façon uniforme par les universités et hôpitaux québécois.

«Ce n'est pas une surprise», dit le vice-doyen aux études postdoctorales de l'Université McGill, le Dr Sarkis Meterissian. Le département de médecine de l'Université McGill a abandonné les gardes de 24 heures il y a un an. Un exemple que suivront bientôt les autres départements. «On fait des gardes de 24 heures depuis plus de 100 ans, et les études montrent qu'elles provoquent des erreurs médicales. C'est clair qu'on doit avancer et s'ajuster», dit le Dr Meterissian. L'Université McGill étudie les conséquences de la réduction des heures de garde sur la scolarité de ses résidents et sur la passation des renseignements sur les patients entre les équipes.

Le passage aux gardes de 16 heures est une bonne nouvelle pour les patients. «Pas un seul être humain ne peut fonctionner normalement après 24 heures sans sommeil. C'est anachronique et ça n'avait pas de sens», dit Paul Brunet, président du Conseil pour la protection des malades. Toutefois, M. Brunet précise qu'il surveille de près l'évolution des moyens de pression mis en oeuvre cette semaine par les médecins résidents, afin de s'assurer que le bien-être des patients n'en souffre pas. «On est contre l'idée que les professionnels de la santé empêchent les patients d'avoir accès à des soins», dit-il.

Enfin, Québec de son côté accueille «favorablement» la décision de l'arbitre. «On avait une ouverture à ce sujet et on accueille favorablement cette décision», a dit Natacha Joncas-Boudreau, attachée de presse du ministre de la Santé, Yves Bolduc.