Des frais pour l'ouverture d'un dossier, pour des tests de laboratoire, pour un forfait de soins, pour des gouttes ophtalmiques ou pour de simples pansements: le Collège des médecins du Québec n'en peut plus. Il est débordé d'appels de patients interloqués et demande au gouvernement d'agir pour établir des règles claires. Avec deux cas cités au comité de discipline et quelques autres qui font l'objet d'une enquête, la direction du Collège a demandé à son comité déontologique de préparer un rapport et a fait le point, mardi, sur sa position relativement aux frais médicaux dits «accessoires» que l'on facture aux patients.

Le Dr Charles Bernard, président-directeur général du Collège des médecins, a parlé d'un problème déontologique devenu «systémique», qui fonctionne cas par cas. Il a en quelque sorte pris la défense des patients en expliquant que, trop souvent, ils ont peur de porter plainte et s'en tiennent à demander de l'information sur les frais facturés, de peur de perdre leur médecin. «On presse le gouvernement d'agir. Il n'agit pas assez vite et, quand il agit, c'est à la pièce. Les patients ont leurs limites, et ils ont peur», a-t-il résumé.

Selon le Collège des médecins, il est grand temps de réviser la loi sur les frais médicaux, qui date d'il y a une quarantaine d'années. Sans prendre la défense pleine des médecins, le Dr Yves Robert, trésorier, a expliqué que les cabinets doivent souvent dépenser des sommes faramineuses pour l'achat d'équipements ou d'appareils. En fin de compte, ce sont les patients qui paient avec les frais accessoires.

Le Dr Robert a cité le cas de la dégénérescence maculaire, une maladie qui, avec le vieillissement de la population, touche un grand nombre de personnes. «Quand les patients se font facturer 200$ pour des gouttes (Lucentis), il est clair que ce n'est pas juste pour les gouttes, mais aussi pour l'appareil nécessaire à l'examen. Ce qui nous inquiète, c'est l'aspect généralisé des frais. Ça pourrait limiter l'accès pour certains patients qui n'ont pas les mêmes moyens financiers que d'autres.»

Actuellement, les médecins ont le droit de consacrer 30% de leurs honoraires à l'achat des «composantes techniques» de leur clinique. Le Dr Bernard est d'avis que le gouvernement devrait payer certains appareils, notamment des appareils numériques pour les mammographies. À ce sujet, un groupe de médecins du Centre de sein Ville-Marie, à Montréal, s'est déjà insurgé contre la Régie de l'assurance maladie du Québec - l'instance responsable d'appliquer la loi -, qui avait sommé la clinique de cesser de facturer des frais pour les examens numériques.

«L'achat des deux appareils avec les installations connexes nous avait coûté environ 6 millions, explique le Dr John Keyserlingk. On devait facturer 200$ aux patients. Maintenant, la RAMQ paie pour la technologie numérique parce qu'elle est reconnue comme plus précise. Notre problème est donc réglé, mais je pense qu'il faut des fonds pour soutenir les nouvelles technologies en médecine tout en sachant que le gouvernement a des moyens limités.»

À la RAMQ, on n'a pas l'intention de se positionner sur les demandes du Collège des médecins. Mais Marc Lortie, porte-parole, souligne qu'il y a toujours 11 enquêtes en cours sur des cliniques, dont la dernière porte sur Medisys 124. Cette clinique offre un service d'assistance médicale pédiatrique sept jours sur sept, ce qui s'apparente aux block fees, des forfaits annuels ou trimestriels illégaux. M. Lortie rappelle par ailleurs qu'une campagne d'information auprès des médecins a été lancée en décembre dernier, et qu'il y en aura une prochainement auprès de la population.

Le Dr Gaétan Barrette, président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec, souvent interpellé sur la question, entend pour sa part tenir un point de presse mercredi.