Le nombre d'infirmières a beau avoir crû de 400 au Québec l'an dernier, leur ordre professionnel craint une grave pénurie de main-d'oeuvre dès l'année prochaine si le gouvernement n'agit pas rapidement pour stopper les départs à la retraite.

Entre avril 2007 et mars 2008, plus de 3200 infirmières ont quitté la profession, révèle le recensement annuel publié hier par l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ). C'est 600 de plus que par les années passées.Et ce n'est qu'un début, prévient la présidente de l'OIIQ, Gyslaine Desrosiers. Une infirmière sur cinq - plus de 15 000 en tout - est âgée de plus de 55 ans. Ces milliers de travailleuses seront bientôt à l'âge de la retraite.

«On ne peut pas former plus de nouvelles infirmières chaque année, dit-elle. Et compte tenu des départs, on demande au gouvernement de prendre des mesures pour freiner la tendance.»

L'Ordre suggère d'adopter des mesures qui rendront l'emploi attrayant pour des travailleuses plus âgées, par exemple en allégeant leurs tâches ou en leur confiant des rôles de tutrices auprès des nouvelles infirmières.

«Ce ne sont pas les heures supplémentaire obligatoires qui vont combler les départs de milliers de travailleuses par année, au contraire, affirme Mme Desrosiers. Plus les hôpitaux persistent à imposer les heures supplémentaires, plus les infirmières partent vite.»

Conditions de travail

Au bureau du ministre de la Santé, Yves Bolduc, on fait valoir que le gouvernement a adopté en juin une série de mesures pour améliorer les conditions de travail des infirmières. Le programme prévoyait une enveloppe de 80 millions pour embaucher, retenir et mieux traiter les infirmières.

Or, plusieurs établissements de santé tardent à mettre le plan en oeuvre, dénonce la Fédération interprofessionnelle du Québec, syndicat qui représente les infirmières.

«On est toujours en train de se battre sur le terrain pour que ces mesures soient appliquées», dénonce la vice-présidente de la FIQ, Michèle Boisclair.

La meilleure façon de prévenir une pénurie est d'augmenter massivement le nombre d'infirmières à temps plein, poursuit-elle. Même si cette mesure pourrait plonger certains hôpitaux en déficit, elle aurait l'avantage de les prémunir contre les milliers de départs à la retraite qui s'annoncent dans les années à venir.

Au cabinet du ministre, on invite les infirmières à faire preuve de patience.

«Ce sont des changements qui, à court terme, n'ont pas nécessairement d'impact, reconnaît l'attachée de presse du ministre, Marie-Ève Bédard. Le travail d'une infirmière, dans un contexte de pénurie, ne sera pas facilité demain matin.»

L'OIIQ a recensé 70 181 infirmières dans la province.