Une vérification administrative a été entreprise par la ville centre pour étudier les critiques faites par l'ombudsman de Montréal visant l'administration du Plateau-Mont-Royal sous la direction de Johanne Falcon, a appris La Presse.

La gestion de Mme Falcon a été critiquée sévèrement par l'ombudsman, Me Johanne Savard, lors de la publication de son rapport, le 29 avril dernier. Me Savard avait critiqué le Plateau Mont-Royal pour son manque de transparence. «Dans les faits, c'est difficile, c'est très difficile, avait-elle alors déclaré devant les journalistes. Au Plateau, c'est comme arracher une dent à chaque information. Il faut même vérifier les informations qu'on nous donne. Elles sont parfois non conformes à la réalité.»

 

Me Savard avait dit en conférence de presse que Johanne Falcon était «au coeur du problème» et que des employés auraient reçu la consigne de ne pas transmettre d'informations à l'ombudsman. D'autres auraient été semoncés pour l'avoir fait, avait-t-elle ajouté. «J'en ai parlé à la mairesse de l'arrondissement plusieurs fois, j'ai même sonné la cloche auprès du directeur général de la Ville, qu'on avait des grosses difficultés, avait dit Me Savard. On est obligé de passer par des élus pour régler des problèmes de gestion, ça n'a pas de bon sens.»

Mme Falcon avait réagi le jour même par communiqué et par une lettre de trois pages envoyée au maire Gérald Tremblay, à la mairesse du Plateau-Mont-Royal, Helen Fotopulos, et au directeur général de la Ville, Claude Léger.

«Mes collègues de l'équipe de direction de l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal ont eu la même réaction que moi: celle d'une surprise totale», écrit-elle dans cette lettre, ajoutant que les commentaires de Me Savard attaquent « (sa) réputation, (sa) crédibilité et celles de (ses) employés».

La conseillère du Plateau, Josée Duplessis, au nom de Projet Montréal, avait dit souhaiter que l'administration Tremblay fasse enquête sur les problèmes de gestion vécus dans l'arrondissement.

Lors du conseil d'arrondissement du 4 mai, Mme Fotopulos avait dit à l'assistance avoir évoqué les critiques de Me Savard avec le président du comité exécutif, Claude Dauphin, avec l'ombudsman, avec le président du conseil municipal, Marcel Parent, avec Pierre Reid et avec Mme Falcon «qui m'a réaffirmé son engagement et son respect envers l'institution et le mandat de l'ombudsman ainsi que sa volonté de collaborer».

Porte-parole de la Ville, Gonzalo Nuñez a confirmé à La Presse, hier, que le service du capital humain a du coup demandé à Me Alain Bond de coordonner l'analyse de la situation dans le Plateau-Mont-Royal. «Il accompagne le service du capital humain pour s'assurer du bon déroulement du processus de vérification à la suite des déclarations de l'ombudsman», dit M. Nuñez.

Dans ce cadre, des employés ont déjà été interrogés tout comme la mairesse Fotopulos. Et Mme Falcon aussi, «tout comme d'autres personnes, dans le processus de vérification de ces allégations qui est en cours», a dit, hier, son conseiller politique, Marc Snyder.

De plus, le 6 mai, des «employés et ex-employés de l'arrondissement du Plateau Mont-Royal» ont envoyé une lettre à Claude Léger et au directeur du service du capital humain à la Ville, Pierre Reid. Pas pour soutenir Mme Falcon, mais pour en rajouter.

«Nous avons pris connaissance à notre tour AVEC STUPÉFACTION (NDLR: écrit en grosses lettres) de la réponse de Johanne Falcon aux commentaires de l'ombudsman. Réponse faite au nom de ses employés et de ses directeurs, et que nous réfutons vivement, lit-on dans la lettre de deux pages obtenue par La Presse. Nous souhaitons rétablir la vérité. Nous avons vécu, et dans certains cas, vivons toujours, des séquelles de situations de censure grave et de dictature militaire. Depuis plusieurs années, la directrice de l'arrondissement impose un modèle de gestion qui repose sur la crainte, le non-respect des personnes, la méfiance et l'absence de collaboration, tant entre les directions elles-mêmes qu'entre les directions et les élus.»

Les auteurs de la lettre expliquent que s'il est important qu'il y ait une ligne tracée entre l'administratif et le politique, cela ne doit pas se faire «au point où on a l'impression de travailler les uns contre les autres». «En livrant cette guerre de tous les instants avec le 'politique', la directrice et ses directeurs (soumis aux diktats imposés) oublient notre raison d'être qui est celle d'être au service des citoyens», lit-on.

La lettre évoque ensuite le «régime de terreur mis en place par madame Falcon» qui a entraîné «une démobilisation du personnel, un nombre anormal de départ d'employés vers d'autres arrondissements et de nombreuses blessures psychologiques chez plusieurs d'entre eux, que ce soit des cols blancs, des professionnels ou des directeurs».

Ces employés et ex-employés affirment que cela fait des années qu'ils se plaignent de cette situation, que certains «ont été punis» pour s'être plaints et que certains sont partis «pour préserver notre santé mentale et physique». Ils louent l'ombudsman d'avoir «osé parler et dénoncer une situation qui perdure».

La lettre envoyée à M. Léger ne contient pas de noms. Elle est signée «employés et ex-employés de l'arrondissement Plateau Mont-Royal» et comporte une adresse courriel qui a permis à l'administration d'entrer en contact avec eux. Les auteurs n'ont pas voulu se nommer car ils craignent «des représailles sévères». La Presse a parlé, hier, avec un des auteurs de la lettre.

Mme Falcon n'a pas rappelé La Presse.

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