Les élus de Montréal seront soumis dès la semaine prochaine à un code d'éthique transitoire pour prévenir les éventuels conflits d'intérêts. Ce code ne comportera toutefois aucune sanction pour ceux qui le violeraient, déplore le chef de l'opposition, Benoit Labonté.

Éclaboussé par diverses controverses, le comité exécutif de la Ville de Montréal a consacré sa rencontre de mercredi à l'adoption de «gestes concrets» visant à mieux encadrer le travail des élus et des fonctionnaires.

 

Dans un premier temps, le comité a mandaté la commission de la présidence pour qu'elle formule un nouveau code d'éthique pour les élus. Le conseil municipal devra adopter la nouvelle version à la fin du mois d'août.

D'ici là, le comité exécutif a proposé d'appliquer immédiatement un ancien code d'éthique adopté en 1990, mais rendu caduc moment de la fusion municipale, en 2002. Le conseil municipal, où le parti du maire est majoritaire, doit entériner cette proposition lors de sa rencontre de lundi soir.

«Actuellement, l'éthique est une grande préoccupation, je n'ai pas à vous en convaincre. Pourquoi un code d'éthique? Pour avoir encore plus de transparence», a dit hier le président du comité exécutif, Claude Dauphin, en entrevue téléphonique avec La Presse.

Le code de 1990, obtenu par La Presse, contient 20 articles qui encadrent le comportement des membres du conseil. Empêchera-t-il un élu de voyager avec un soumissionnaire pendant un appel d'offres? «C'est difficile de prendre les cas un par un, mais le sens du code et ses dispositions font en sorte de baliser ça, et d'empêcher ça. C'est l'objectif», a répondu M. Dauphin.

Rappelons que l'administration Tremblay se défend depuis le début du mois en raison de l'apparence de conflit d'intérêts qui entoure l'attribution du contrat des compteurs d'eau. L'ex-président du comité exécutif de Montréal, Frank Zampino, a séjourné sur le bateau du promoteur Tony Accurso en 2007, alors que la Ville s'apprêtait à attribuer le contrat de 356 millions au consortium GÉNIeau, dont fait partie l'entreprise Simard-Beaudry de M. Accurso. Frank Zampino a par la suite été nommé vice-président de la firme Dessau, l'autre entreprise du consortium. M. Zampino a depuis démissionné de ses fonctions chez Dessau.

D'ailleurs, le dernier article du code d'éthique de 1990 stipule qu'«un membre du comité exécutif devrait, après la fin de son mandat, éviter d'occuper un emploi qui pourrait laisser croire (...) qu'il s'agit d'un bénéfice futur».

Pas de sanctions

Le chef de l'opposition officielle, Benoit Labonté, a vivement déploré hier que le code d'éthique transitoire pour les élus ne contienne aucune sanction.

M. Labonté s'en prend aussi à une disposition qui oblige les élus à déclarer les avantages de 75$ ou plus qu'ils ont reçus. Or, cette disposition ne s'applique pas «s'il s'agit d'un repas consommé en présence de la personne qui l'a offert», peut-on lire dans le code de 1990. «C'est ridicule, complètement loufoque», a dit M. Labonté, qui déposera lundi une motion présentant son propre code d'éthique.

Claude Dauphin admet que le code d'éthique ne prévoit aucune sanction. «D'où l'importance de créer un commissaire à l'éthique à l'Assemblée nationale du Québec, qui aurait le pouvoir de sanctionner», a-t-il dit.

Mercredi, le comité exécutif a d'ailleurs demandé officiellement au gouvernement du Québec de créer un commissaire à l'éthique pour l'ensemble des élus du Québec.

Ligne de prévention

Par ailleurs, le comité exécutif a aussi adopté une version plus contraignante du code de conduite destiné aux fonctionnaires municipaux, qui sont soumis à un tel code depuis 2004. La nouvelle version entrera en vigueur le 15 juin.

Le comité a également statué d'inclure de nouvelles clauses aux cahiers de charge «pour rendre le processus d'octroi de contrat plus transparent». Un soumissionnaire devra divulguer tous ses liens d'affaires avec les professionnels qui ont pu accompagner la Ville dans la préparation des devis.

Et tel qu'il l'avait annoncé, le comité exécutif a finalement confié au vérificateur général de la Ville la mise en place de la «ligne éthique», qui servira à dénoncer les cas de fraudes et de gaspillage à la Ville. Elle sera destinée aux fonctionnaires et aux parties intéressées.