Soucieux de préparer la prise en charge par la RAMQ des soins médicaux que peuvent nécessiter les demandeurs d'asile touchés par les coupes du fédéral, les ministres québécois de la Santé et de l'Immigration, Yves Bolduc et Kathleen Weil, ont demandé une rencontre avec le ministre fédéral de l'Immigration, Jason Kenney, avant l'entrée en vigueur de la réforme, le 30 juin. Mais Ottawa fait la sourde oreille, a appris La Presse.

«Le ministre Bolduc et la ministre Weil ont écrit à M. Kenney pour lui demander de suspendre ou de revoir les modifications au Programme fédéral de santé intérimaire (PFSI), le temps qu'on puisse discuter avec eux de la façon dont cela peut s'articuler compte tenu du fait que les personnes touchées vont finir par consulter dans notre réseau. On n'a pas eu de réponse encore», dit Marie-Ève Bédard, directrice de cabinet de M. Bolduc.

Jason Kenney a semé la surprise et la controverse en supprimant le volet de soins complémentaires du PFSI. Ainsi, depuis le 30 juin, Ottawa ne couvre plus les médicaments ni les soins dentaires ou psychologiques des demandeurs d'asile, mais seulement les soins jugés «urgents ou essentiels».

Devant cette mesure, décriée d'un océan à l'autre par les professionnels de la santé, Québec a fait savoir que les soins délaissés par Ottawa seraient maintenant pris en charge par la RAMQ.

«On a envoyé la consigne à la RAMQ et aux professionnels du réseau: si un demandeur d'asile se présente à l'hôpital, vous le traitez. Si ce n'est pas couvert par le PFSI, vous faites suivre à la RAMQ», a dit Mme Bédard.

Des questions

Mais l'application concrète de cet engagement reste nébuleuse.

«Ce qui est difficile, c'est que les médicaments ne sont plus couverts et que la couverture des services non essentiels serait moindre. Mais Immigration Canada n'a pas précisé», a dit Mme Bédard.

Tout en saluant l'initiative de M. Bolduc, le président de l'organisme Médecins du monde Canada croit aussi que plusieurs points doivent être clarifiés: «C'est assez complexe, il y a beaucoup de subtilités. Quels soins sont couverts? Qu'est-ce qui est considéré comme un soin urgent et essentiel?»

Médecins du monde a d'ailleurs envoyé une lettre à ce sujet au ministre de la Santé, le 12 juillet.

Réponse «en temps et lieu»

Au cabinet du ministre Kenney, on accuse bien réception d'une lettre envoyée par Québec.

«Nous répondrons en temps et lieu», a dit, dans un courriel en anglais, Alexis Pavlich, porte-parole de M. Kenney.

Mais Ottawa n'entend pas reculer.

«Nous ne croyons pas que ce soit juste que des immigrés illégaux et de faux demandeurs d'asile aient accès à de meilleurs services de santé que les contribuables canadiens, dont les aînés. C'est pourquoi nous avons mis en place nos récentes réformes. La santé est une compétence provinciale. Nous avons une bonne relation avec le gouvernement du Québec et avons travaillé avec les fonctionnaires de Québec pour les informer de ces changements.»