Les jeunes des gangs de rue souffriraient davantage de troubles mentaux et de détresse psychologique que les autres jeunes contrevenants du Québec. Voilà les résultats étonnants d'une étude actuellement menée par l'Institut universitaire du Centre jeunesse de Montréal, dont les résultats préliminaires ont été présentés hier. Même si les conclusions des chercheurs sont embryonnaires, elles mettent en lumière l'importance d'effectuer un meilleur dépistage dès leur entrée dans le système jeunesse.

Stress post-traumatique

Environ 44 % des jeunes qui ont dit être membres d'un gang de rue seraient atteints d'anxiété généralisée alors que la proportion s'élève à 26,8% chez les jeunes contrevenants, montre l'étude menée par Catherine Laurier, professeure associée en criminologie à l'Université de Montréal. De la même manière, 29,4 % des membres d'un gang ont vécu un épisode maniaque, contre 7,3 % chez les autres délinquants.

Mais ce sont les données sur le stress post-traumatique qui ont surpris les chercheurs. Près de 41 % des jeunes membres d'un gang soumis à l'étude présentaient les symptômes du syndrome du stress post-traumatique, soit deux fois plus que les autres délinquants. Par ailleurs, 100% des membres de gangs ont dit avoir vécu un traumatisme, contre 77 % des jeunes contrevenants.

À titre de comparaison, une étude américaine publiée en 2002 a montré que 25 % des enfants ou adolescents ont vécu un traumatisme majeur dans leur vie.

L'étude est menée depuis 2011 et se poursuivra jusqu'en 2013. Déjà, 82 jeunes contrevenants de 15 à 21 ans, dont la majorité est incarcérée à Cité des Prairies, ont été interrogés par questionnaire et en personne. La chercheuse aimerait en rencontrer 160 d'ici la fin de sa recherche et étendre son échantillon aux jeunes âgés de 25 ans en visitant des pénitenciers fédéraux.

C'est une étude sur le suicide chez les jeunes délinquants menée en 2009-2010 qui a poussé l'Institut universitaire à poursuivre sur la piste de la santé mentale. Elle a révélé que 18 des 49 jeunes rencontrés présentaient un risque suicidaire.

Risque suicidaire

L'étude en cours semble montrer que les membres d'un gang sont moins suicidaires que les jeunes contrevenants. Un peu plus de 5% d'entre eux auraient tenté de passer à l'acte au cours de leur vie, contre près de 17 % des jeunes contrevenants. Plus du double (22 %) des membres de gangs ont toutefois «souhaité être mort au cours du dernier mois».

«C'est totalement nouveau, on n'a vu des résultats comme ceux-là nulle part ailleurs dans la littérature scientifique», a expliqué le coordonnateur du Centre d'expertise sur la délinquance et les troubles de comportement de l'Institut universitaire du Centre jeunesse de Montréal, Clément Laporte, en marge de la présentation des résultats devant une salle réunissant des centaines d'intervenants.

«Ça force une réflexion sur l'organisation des services. Actuellement, on s'occupe beaucoup plus de la manifestation violente ou des problèmes de comportement alors qu'il faudrait peut-être se pencher davantage sur les problèmes intériorisés qui touchent la santé mentale.»