Les sourds et malentendants canadiens craignent d'être les laissés-pour-compte du débat sur les débats de la prochaine campagne électorale fédérale.

Le Parti conservateur a rejeté la proposition des principaux réseaux de télévision de tenir des débats en français et en anglais, mettant ainsi en péril leur diffusion. Il est loin d'être assuré que les partis de l'opposition souhaitent participer à des débats où le premier ministre Stephen Harper brillerait par son absence.

Les grands réseaux de télévision, comme Radio-Canada ou TVA, doivent inclure des sous-titres pour presque toute leur programmation, y compris les annonces commerciales.

Les conservateurs ont affirmé vouloir explorer différentes formes de débat, visant notamment les réseaux sociaux qui n'ont pas à intégrer des sous-titres.

Internet n'est pas très accueillant pour les sourds et malentendants. Quant à la diffusion web, elle ne fait pas encore l'objet de réglementation.

Rudyard Griffiths, l'organisateur de Munk Debate, dont les échanges sont diffusés par CBC et C-SPAN, selon son site Internet, espère pouvoir réussir à inclure des sous-titres et un interprète de la langue des signes si son organisation était choisie comme hôte d'un débat.

Le directeur général de l'Association des sourds du Canada, James Roots, rappelle que 10 millions de Canadiens ont recours aux sous-titres. L'actuelle querelle politicienne préoccupe profondément l'organisme, a-t-il reconnu dans un courriel.

Disant ne pas vouloir prendre parti, M. Roots a voulu souligner que tous les Canadiens - et pas seulement les sourds - ont le droit moral et juridique d'avoir un accès égal aux débats. Traditionnellement, ce droit est assuré par les sous-titres.

Susan Masters, de l'Institut de l'Ouest pour les sourds et les malentendants, affirme que les nouveaux moyens de diffusion ne sont pas toujours conviviaux pour les personnes ayant des problèmes d'ouïe.

Geoff Smith, un ancien avocat ayant commencé à perdre l'usage de l'ouïe en raison d'une tumeur au cerveau, il y a 30 ans, a écrit à La Presse canadienne pour se plaindre de la situation. Il a dit qu'il n'aimait pas se sentir exclu des débats. Selon lui, le premier ministre Harper tente non seulement de contrôler les médias, mais aussi de manipuler les personnes sourdes et malentendantes en tentant de déplacer les débats vers Internet.