(Ottawa) Des partisans d’Israël et d’importants groupes juifs se sont rassemblés lundi sur la colline du Parlement, appelant à la fin de la violence antisémite au Canada et à la solidarité avec Israël.

« Notre chagrin est profond et incommensurable », a déclaré Raquel Look.

Son fils, Alexandre, qui vivait à Montréal, a été tué par des militants du Hamas lors d’un festival de musique en Israël, au mois d’octobre.

« Nous voulons canaliser cette immense douleur dans un appel à l’action. Cette tragédie n’est pas seulement une horrible perte personnelle, a-t-elle affirmé. C’est un signal d’alarme pour nos politiciens. Chacun d’entre eux. »

Le fils de Mme Look faisait partie des quelque 1200 personnes tuées le 7 octobre, lorsque des militants du Hamas ont lancé des attaques sur le sol israélien depuis la bande de Gaza.

Depuis lors, les responsables du territoire contrôlé par le Hamas affirment que 15 500 Palestiniens ont été tués par les représailles israéliennes, notamment par des frappes aériennes, la coupure des approvisionnements de biens essentiels et une offensive militaire sur le terrain.

Lundi, des centaines de personnes se sont rassemblées sur le terrain de la colline du Parlement à Ottawa, dont plusieurs avaient apporté des drapeaux israéliens. Le Centre consultatif des relations juives et israéliennes a déclaré que l’évènement était censé être une démonstration de force collective face à ce qu’il qualifie d’antisémitisme stupéfiant.

Les intervenants ayant pris la parole ont évoqué des incidents survenus au Canada, tels que des coups de feu tirés contre des écoles juives, un cocktail Molotov lancé sur un centre communautaire juif et une alerte à la bombe contre une école secondaire.

Le député libéral Anthony Housefather a déclaré lors du rassemblement que certaines personnes avaient minimisé l’attaque du 7 octobre contre des civils israéliens.

« Ces dernières semaines m’ont laissé très en colère. En colère, parce que dès que le Hamas a assassiné des Israéliens, les gens ont commencé à se justifier. »

PHOTO DAVE CHAN, AGENCE FRANCE-PRESSE

M. Housefather faisait partie d’une poignée de députés qui se sont récemment rendus en Israël, à l’invitation de fédérations juives du Canada, qui incluait des députés libéraux, des conservateurs et un député indépendant. La plupart d’entre eux étaient présents au rassemblement de lundi.

Une porte-parole du Nouveau Parti démocratique (NPD) a déclaré que les députés du parti avaient été invités à assister à l’évènement, mais qu’aucun n’était disponible. Cependant, le député Matthew Green a dit lundi aux journalistes qu’il n’avait « certainement » pas reçu d’invitation.

Le parti a appelé à un cessez-le-feu dans la guerre entre Israël et le Hamas, et une porte-parole a indiqué que le chef du parti, Jagmeet Singh, a rencontré des proches des personnes tuées par le Hamas et qu’il a dénoncé l’antisémitisme.

Lors du rassemblement, M. Housefather a déclaré que le voyage confirmait sa conviction que l’attaque du Hamas équivalait à un pogrom contre les Juifs.

« Nous avons vu des impacts de balles, des traces de sang et des voitures qui ont quitté la route lorsque leurs occupants ont été tués. Nous avons entendu des survivants raconter des histoires de viol, de torture et de meurtre. Nous avons rencontré des familles de Canadiens qui ont été massacrés et des familles d’otages », a-t-il raconté.

La cheffe adjointe du Parti conservateur, Melissa Lantsman, s’est dite « indignée » par la classe politique canadienne pour ce qu’elle considère comme un échec dans la protection du peuple juif.

« C’était facile d’être pro-israélien lorsque cela s’est produit pour la première fois, et c’est beaucoup plus difficile maintenant. Et maintenant nous voyons qui ils sont vraiment », a-t-elle déclaré, à propos des politiciens.

« Le Canada est devenu, d’une manière ou d’une autre, un pays qui a abandonné sa position de principe de longue date, et qui a opté pour des platitudes farfelues de la part d’un trop grand nombre de personnes », a soutenu Mme Lantsman.

Elle a appelé à la fin des boycottages des entreprises juives et à la poursuite des auteurs de vandalisme et d’éventuels crimes de haine.

« Ce ne sera pas fini tant que tous les politiciens de ce pays n’auront pas condamné les foules sans visage, portant des masques et hurlant, qui incitent illégalement à la haine dans nos rues. »

Les membres de la société civile ont appelé les Canadiens à défendre le droit d’Israël à exister et sa nécessité de se défendre contre le terrorisme. Ils demandent également à la communauté internationale de faire pression pour la libération des otages détenus par le Hamas.

« Nous ne pouvons pas nous permettre de faire preuve de complaisance. Nous ne pouvons pas accepter le silence de ceux qui ne se sont pas encore exprimés », a déclaré Mme Look.

De plus petites contre-manifestations ont eu lieu près des barrières le long de la colline du Parlement, où des dizaines de manifestants ont brandi des drapeaux palestiniens et des pancartes dénonçant les actions militaires israéliennes.

PHOTO SPENCER COLBY, LA PRESSE CANADIENNE

Le Conseil de sécurité nationale d’Israël a récemment augmenté le niveau de menace pour les Juifs dans certaines parties de l’Europe occidentale, bien que le Canada reste répertorié comme ne présentant « aucune menace de voyage » pour les Israéliens.

Israël a repris ses frappes aériennes meurtrières sur le sud de Gaza cette fin de semaine après l’échec d’une trêve d’une semaine vendredi, les deux parties s’accusant mutuellement.

L’armée israélienne a déclaré que plus de 250 roquettes avaient été tirées depuis Gaza depuis la fin de la trêve.

Mouvements à la frontière

Les responsables israéliens affirment que 137 personnes sont toujours retenues en otages à Gaza. Un autre groupe de 105 Palestiniens a été libéré pendant le cessez-le-feu en échange de la libération de 240 Palestiniens détenus dans les prisons israéliennes. La plupart des personnes libérées des deux côtés étaient des femmes et des enfants.

Ces échanges avaient lieu au poste-frontière de Rafah entre l’Égypte et Gaza. Depuis la fin de la trêve, les ressortissants étrangers ont de nouveau été autorisés à sortir par le terminal de Rafah. Affaires mondiales Canada a déclaré que cela comprenait environ 130 Canadiens qui sont partis au cours de la fin de semaine.

Le ministère a indiqué dans un communiqué dimanche soir qu’environ 600 Canadiens, résidents permanents et membres de leurs familles ont pu quitter le territoire assiégé jusqu’à présent. Le ministère affirme qu’il y a 426 Canadiens en Cisjordanie et à Gaza qui sont enregistrés auprès du gouvernement fédéral.

Affaires mondiales Canada a également annoncé dimanche soir qu’un huitième Canadien était mort à cause du conflit actuel, cette fois au Liban.

Un Canadien est porté disparu, affirme le gouvernement, sans toutefois préciser qui est cette personne ni où elle se trouve, invoquant des raisons de confidentialité.

La famille de Judih Weinstein Haggai a toutefois déclaré qu’elle était retenue en otage par le Hamas à Gaza. Elle est une citoyenne canadienne qui a vécu à Toronto pendant 20 ans.

Un cessez-le-feu peu probable

Plus tard lundi, l’Association des jeunes de la communauté musulmane Ahmadiyya devrait organiser un évènement distinct sur la colline du Parlement pour exhorter à la paix au Moyen-Orient, en commençant par un cessez-le-feu.

Les organisateurs de l’évènement ont déclaré qu’ils attendaient des élus de divers partis, dont la ministre de la Diversité et de l’Inclusion, Kamal Khera, et la ministre de la Petite Entreprise, Rechie Valdez.

La possibilité d’un nouvel accord de cessez-le-feu semble écartée. Israël a rappelé ses négociateurs et le chef adjoint du Hamas a déclaré que toute nouvelle libération d’otages n’interviendrait que dans le cadre de la fin de la guerre.

Samedi, un procureur de la Cour pénale internationale a dit que son bureau souhaitait sérieusement ouvrir une enquête sur les allégations de crimes de guerre des deux côtés.

Avec des informations de Laura Osman et de l’Associated Press.