Le chef de l'Assemblée des Premières Nations (APN), Shawn Atleo, se voit contraint de prendre un congé de maladie, quelques jours seulement après une rencontre cruciale avec le premier ministre Stephen Harper.

«Au cours des deux dernières semaines, nous avons eu à composer avec plusieurs interminables conférences téléphoniques, nombre de réunions tardives, et bien des frustrations», a-t-il indiqué dans un communiqué.

«Je suis au regret de vous annoncer que ces longues journées m'ont grandement affecté. Cette fin de semaine, mon médecin m'a avisé de prendre maintenant le temps de récupérer, et ma famille et moi-même avons décidé que je me conformerais dès maintenant à cet avis.»

C'est M. Atleo qui a mené de front les négociations et assumé la coordination de la rencontre controversée entre des chefs autochtones et le premier ministre, vendredi dernier à Ottawa.

La durée de son congé n'a pas été précisée, mais l'Autochtone de la nation Aoushat de Vancouver assure qu'il sera «de nouveau à pied d'oeuvre très bientôt, revigoré et plus que jamais déterminé à travailler avec vous afin que, tous ensemble, nous poursuivions notre élan sur la voie du changement».

En conférence de presse à Montréal, lundi, le premier ministre Harper a été questionné sur l'état de santé de M. Atleo, le mouvement de contestation autochtone Idle No More et la rencontre de vendredi dernier.

«Nous avons eu de bonnes discussions. Nous ne sommes pas d'accord sur tout, évidemment, mais nous avons eu de bons échanges et j'ai certainement hâte de reprendre les discussions avec le chef national Shawn Atleo quand il sera en mesure de le faire», a-t-il affirmé.

«Notre priorité, en tant que gouvernement, est l'économie, la croissance et la création d'emplois bien rémunérés pour les Canadiens, qu'ils soient autochtones ou non.»

M. Atleo a fait l'objet de nombreuses critiques de la part de chefs qui ont boycotté la rencontre avec le premier ministre Harper, et remis son leadership en question.

Au terme d'une semaine de discussions musclées, M. Atleo est parvenu à établir un consensus sur les sujets à aborder pendant la réunion avec M. Harper. Il n'a toutefois pas réussi à convaincre le premier ministre d'inclure le gouverneur général, David Johnston, à la rencontre, une condition jugée essentielle par certains chefs, notamment Theresa Spence, qui mène une grève de la faim depuis le 11 décembre dernier.

Plusieurs chefs estiment que l'APN aurait dû boycotter la réunion, parce qu'elle n'a pas été tenue en respectant les conditions qu'ils exigeaient, pas plus qu'elle n'a eu lieu sur leur territoire. Les chefs du Manitoba et de l'Ontario, et certains autres de la Saskatchewan, ont refusé de rencontrer M. Harper, choisissant plutôt de manifester dans la rue à proximité du bureau du premier ministre.

Après la réunion, les critiques ont continué de fuser.

«Pourquoi le laissons-nous le premier ministre faire mal à nos peuples de cette façon? À quoi avez-vous pensé?», a écrit Isadore Day, cheffe de Serpent River, dans le nord de l'Ontario, qui est bien connue pour son franc-parler.

Le chef Atleo a été réélu l'été dernier pour un deuxième mandat de trois ans. Il avait alors reçu des appuis significatifs, bien que certains de ses opposants ont dénoncé ses liens étroits avec M. Harper et le gouvernement fédéral.

M. Atleo a demandé au chef régional Roger Augustine, qui représente les chefs du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard, de continuer à présider et à animer les réunions du Comité exécutif national de l'APN pendant son absence, qu'il a qualifiée de «brève».

Les chefs régionaux de la Saskatchewan, Perry Bellegarde, et de la Colombie-Britannique, Jody Wilson-Raybould, ont quant à eux été mandatés pour «poursuivre les travaux entamés cette semaine sous leur impulsion en matière de mise en oeuvre des traités et de règlement des revendications globales».

Il a été convenu lors de la rencontre avec Stephen Harper qu'une autre réunion avec l'APN aurait lieu d'ici un mois, pour déterminer les prochaines étapes.

M. Atleo se dit confiant que les Premières Nations seront capables d'assurer que la semaine dernière marque bel et bien la fin d'un «chapitre amer de paralysie et de provocation» dans leurs relations avec le gouvernement du Canada.