Fini les règles disparates et l'anarchie. En 2018, la Ville de Montréal s'occupera elle-même de gérer les chiens dangereux, car certains arrondissements remplissent plus ou moins bien cette mission, a appris La Presse.

D'ici un an et demi, la Ville de Montréal adoptera un nouveau règlement et lancera une équipe d'inspecteurs sur le terrain afin de mieux gérer les chiens dangereux et abandonnés, qui inquiètent de nombreux citoyens. L'administration en profitera pour revoir l'approche à adopter face aux controversés pitbulls.

« On veut avoir la même politique d'un arrondissement à l'autre et on veut qu'elle soit appliquée de façon uniforme, comme ce doit être le cas dans une ville ayant le statut de métropole. Il y aura donc un seul règlement pour toute la grande ville », a exposé à La Presse la vice-présidente du comité exécutif, Anie Samson et aussi mairesse de l'arrondissement de Villeray-Saint-Michel-Parc-Extension.

« Actuellement, il n'y a pas d'inspecteurs canins à tous les endroits et la gestion des chiens dangereux n'arrive pas au même rang des priorités d'un arrondissement à l'autre. Il y en a qui ne savent pas trop quoi faire avec ça », dit Anie Samson, vice-présidente du comité exécutif.

Il y a deux semaines, La Presse a révélé que des chiens agressifs ont défiguré plus d'une vingtaine d'enfants de la région de Montréal, en un seul été, l'an dernier. Et que les règlements en place, disparates et mal appliqués, protègent mal les citoyens contre les nombreux maîtres irresponsables ou contre les chiens pathologiquement agressifs - qui, contrairement au mythe, se comptent par dizaines dans la métropole.

Plus d'attaques de pitbulls

Autre constat de notre enquête : parmi tous les chiens potentiellement dangereux - qui appartiennent à plusieurs races -, les pitbulls passent plus souvent à l'attaque et infligent les blessures les plus graves. Un phénomène aujourd'hui confirmé par les rapports de police et les bilans de patrouilleurs canins, que La Presse a obtenus grâce à la Loi sur l'accès à l'information.

L'administration est bien au fait du phénomène et en tiendra compte dans son nouveau règlement, assure Anie Samson. « On est très sensible à la question [des pitbulls]. On est en train de regarder tout ça. Certains arrondissements les ont bannis, mais notre vétérinaire en chef et les experts sont partagés là-dessus, puisque ce n'est ni blanc ni noir. Faut-il les bannir, cibler plusieurs races ou faire autre chose ? Il y aura un débat. »

« On ne peut pas défendre l'indéfendable ; il faut protéger les gens, les enfants. On doit pouvoir intervenir pour s'assurer qu'ils vivent en toute quiétude et que le règlement est respecté », estime Denis Coderre.

Les arrondissements peuvent déjà faire museler un chien qui a mordu ou le faire euthanasier si un expert conclut qu'il est dangereux. « Mais il faut penser en termes de prévention. On ne doit pas attendre qu'un enfant se fasse défigurer pour réagir », plaide le maire.

Faut-il imposer la muselière « en amont », s'interroge-t-il, ou encore augmenter les amendes pour les rendre plus dissuasives lorsqu'un chien n'est pas tenu en laisse ? À moins qu'une application plus rigoureuse des règles en place suffise à prévenir les tragédies ? Un comité d'experts travaille déjà à « analyser tout ça », précise Denis Coderre.

L'Ordre et l'Association des vétérinaires ont maintes fois déclaré que cibler une race ne réglera pas le problème. Mais plusieurs vétérinaires nous ont confié se sentir muselés lorsqu'il s'agit de discuter du cas des pitbulls. « Ils ont un gros lobby de défenseurs. Dès que tu hausses un sourcil, ces gens te rentrent dedans », affirme une source au coeur du débat.

Les animaux abandonnés

Chose certaine, trop de chiens continuent de se promener sans laisse, y compris après avoir déjà mordu. Même les règles de base ne sont guère respectées, puisqu'à peine 12 % des Montréalais propriétaires de chiens se procurent la licence réglementaire.

Montréal compte doubler cette proportion avec son nouveau règlement. Elle profitera aussi de son grand remaniement pour rapatrier la gestion des animaux abandonnés ou errants. Dès 2018, ils seront accueillis au futur Centre de services animaliers municipal (CSAM) plutôt qu'à la SPCA ou au Berger blanc - lesquels pourront toujours desservir les autres municipalités de l'île.

Le Centre soignera les bêtes et cherchera à retrouver leurs propriétaires. En cas d'échec, elle les mettra en adoption après les avoir vaccinées, vermifugées, stérilisées et après leur avoir implanté une micropuce. Seuls les animaux en bonne santé physique et mentale seront envoyés dans un nouveau foyer, assure la Ville.

En attendant, Montréal a lancé des campagnes pour rappeler leurs responsabilités aux maîtres, indique Mme Samson. Le nombre d'animaux abandonnés est ainsi passé de 17 000 à 14 000 ces dernières années.