Le jury au procès des trois ex-employés de la MMA accusés pour le déraillement mortel de Lac-Mégantic a coûté plus de 300 000 $ aux contribuables, selon des données obtenues par La Presse canadienne via une demande d'accès à l'information.

Cette facture ne couvre que les coûts associés au jury, et non pas les salaires et dépenses des quatre procureurs de la Couronne présents au procès, ni les frais judiciaires, par exemple, pour le personnel présent en tout temps dans la salle de cour du palais de justice de Sherbrooke, comme les greffiers, les huissiers et les constables spéciaux.

Les indemnités journalières remises à chacun des 14 jurés durant le procès ont totalisé 211 989 $. Le jury ne comptait toutefois que 12 membres lors des délibérations.

Ces montants sont prévus par la Loi sur les jurés et son règlement. L'indemnité quotidienne de 103 $ par jour est majorée à la 57e journée de procès à 160 $ par jour. Un juré a aussi droit, sur ordonnance du juge, à une allocation pour garde d'enfants.

Et comme les jurés ont été confinés pendant neuf jours pour ces délibérations, ils ont dû demeurer à l'hôtel durant cette période, pour une facture de 26 746 $.

Le procès a débuté le 2 octobre et s'est poursuivi jusqu'à la mi-décembre. Il a repris le 3 janvier pour les plaidoiries et les délibérations se sont déroulées du 11 au 19 janvier, jour où le verdict est tombé pour les trois ex-employés de la Montreal Maine & Atlantique (MMA) : Thomas Harding Richard Labrie et Jean Demaître ont alors été acquittés.

Quant au coût des repas des jurés pendant le procès, celui-ci s'élève à 26 829,84 $.

Un transport sécurisé a aussi été nécessaire lorsqu'ils se rendaient au restaurant, mais aussi pour aller et revenir de l'hôtel durant la période de confinement. Coût total : 9 569 $.

Le procès ayant été complètement bilingue, des services de traduction et d'interprètes ont été requis, pour un coût de 35 698 $.

La facture totale, transmise par le ministère de la Justice du Québec, s'élève à 310 984 $.

« C'est une fraction du coût », a commenté en entrevue Me Charles Shearson, l'un des procureurs du chef de train Thomas Harding.

Le montant de la facture ne le surprend pas, car le procès a duré quatre mois et il était complexe, a-t-il déclaré en entrevue téléphonique.

« Ce qui m'étonne, ce sont les choix de la procureure générale ».

Il a rappelé qu'il y a eu au dossier quatre procureurs de la Couronne à temps plein, ainsi que deux policiers lors du procès, sans compter toutes les ressources policières affectées à l'enquête, le temps du juge et de la salle de cour.

« Peut-être que ces ressources auraient été mieux investies si elles avaient été impliquées dans la sécurité ferroviaire pour prévenir d'autres accidents », a-t-il suggéré.

Ce sont des coûts importants pour la société, pour tout le monde, pour les accusés, qui ont dû se défendre contre Goliath, a poursuivi Me Shearson.

Ce choix d'avoir un procès avec jury a été celui de la Couronne, qui a procédé par mise en accusation privilégiée. Cette façon de faire fait sauter l'étape de l'enquête préliminaire et impose le procès devant jury. Ce choix aurait peut-être été fait par les accusés, mais ils n'ont pas eu à se poser la question, a souligné Me Shearson.

Lors du procès, le juge Gaétan Dumas avait qualifié de « faible » la preuve de la Couronne à l'égard de deux des accusés. Ces propos avaient été tenus hors la présence du jury, alors que les avocats de M. Labrie et M. Demaître avaient présenté des requêtes pour un verdict dirigé d'acquittement, qui avaient été rejetées par le juge Dumas.

Après que le verdict fut prononcé, l'une des procureures de la Couronne, Véronique Beauchamp, avait refusé de commenter ces propos du juge. Elle avait toutefois souligné que la négligence criminelle est l'une des accusations prévues au Code criminel qui sont difficiles à prouver.