Un ex-huissier de justice se retrouve lui-même devant la justice. Marc Boulianne a fait croire à des procureurs de la Cour municipale de Montréal que des témoins avaient été officiellement informés de leur assignation à la cour, alors qu’il était resté les bras croisés. Il risque maintenant la prison.

Peu connus du public, les huissiers de justice sont un rouage important du système judiciaire. Ils signifient d’innombrables procédures, comme les citations à comparaître, et exécutent les décisions exécutoires des juges. Les huissiers de justice sont ainsi régis par un ordre professionnel.

En juillet dernier, Marc Boulianne a plaidé coupable au palais de justice de Montréal d’avoir « fait un faux document, soit un rapport de signification, le sachant faux » en 2018. Il est rarissime qu’un huissier de justice soit accusé d’un crime commis dans le cadre de ses fonctions.

Alors qu’il était huissier, Marc Boulianne a produit six faux rapports de signification à la Cour municipale de Montréal. Selon le résumé des faits présenté à la cour, le procureur chef adjoint soupçonnait que l’huissier n’effectuait pas son travail. Trois procureurs municipaux ont alors vérifié auprès de témoins civils et ont découvert que ceux-ci n’avaient jamais reçu de documents de l’huissier.

« Fort heureusement, dans aucun de ces cas, il n’y a de conséquences malheureuses pour les témoins civils », a affirmé la procureure de la Couronne, MSylvie Dulude, le 11 juillet dernier. Précisons qu’une personne assignée à comparaître qui ne se présente pas en cour peut être accusée d’outrage au tribunal.

Pas d'accusation déontologique

Au départ, Marc Boulianne était également accusé de prévarication des fonctionnaires dans l’exécution d’actes judiciaires, un chef d’accusation rarissime. Ce chef a cependant été abandonné par la poursuite au moment de sa reconnaissance de culpabilité sur le chef de faux.

L’homme de 31 ans n’est plus membre de la Chambre des huissiers de justice du Québec depuis mars 2020. Aucune accusation déontologique n’a étonnamment été portée contre lui par le syndic dans cette affaire. La Chambre des huissiers de justice ignorait d’ailleurs tous des démêlés de l’ex-huissier devant la justice, a confirmé à La Presse une responsable de l’organisme.

Le dossier est brièvement retourné en cour le 6 octobre dernier et a été reporté en janvier prochain en attente de la confection d’un rapport présentenciel. L’accusé réside maintenant à La Tuque.

Son employeur l'ignorait

Au moment des crimes, Marc Boulianne était affilié à la firme Hainault Gravel. Le vice-président du conseil d’administration de cette société, Sylvain Gravel, a affirmé à La Presse n’avoir jamais été mis au courant des accusations criminelles portées contre Marc Boulianne.

« Je ne savais même pas. On l’aurait expulsé immédiatement de l’entreprise. On aurait rapporté au syndic aussi. La Ville [de Montréal] nous avait demandé de ne pas lui donner de l’ouvrage, alors il a décidé de partir », a expliqué Sylvain Gravel.

MSimon Chartier défend Marc Boulianne.

Le titre de cet article a été modifié afin de refléter le fait que Marc Boulianne n’est plus huissier.