Une fugueuse de 15 ans d'un centre jeunesse de Québec, devenue elle-même proxénète de jeunes filles, a dû se prostituer au « rythme effréné » de 10 clients par jour pendant l'été 2013. Son proxénète, Samuel Jacques, a été reconnu coupable lundi de l'avoir battue, volée et d'avoir vécu des fruits de sa prostitution. Il risque au moins cinq ans de pénitencier.

Le Montréalais de 36 ans s'est fait passer les menottes lundi après-midi, l'air hébété, alors qu'il espérait revoir son enfant avant de se retrouver derrière les barreaux. Samuel Jacques a été reconnu coupable, lundi, de huit chefs d'accusation, soit de proxénétisme (deux accusations), d'avoir vécu des produits de la prostitution d'une mineure, de vol qualifié, de harcèlement criminel, de voies de fait, d'usage de faux et d'utilisation de document contrefait.

La juge Patricia Compagnone a jugé « invraisemblable » son témoignage pendant le procès qui s'est déroulé en janvier dernier à Montréal. « Il est difficile d'accorder du poids à son récit. Il minimise son implication dans les activités de [la victime] », soutient la juge. Celle-ci a cru le témoignage de la victime, malgré certaines incohérences temporelles compréhensibles pour une victime de 15 ans.

L'adolescente plonge dans le « monde dantesque de la prostitution et du proxénétisme » à l'été 2013. Elle tente d'abord de danser nue à Québec, puis s'enfuit à Montréal chez de vagues connaissances. Elle contacte Samuel Jacques - présenté sur Facebook par une amie fugueuse - pour obtenir de fausses cartes d'identité. Il lui propose de l'héberger.

L'adolescente a une relation sexuelle complète avec son premier client dans un hôtel montréalais. L'accusé lui remet 100 $, soit la moitié du coût des fausses cartes d'identité qu'il tarde à lui donner. Mécontente, la victime communique avec un autre proxénète connu à Québec. Elle se prostitue à quelques reprises pour ce dernier, mais continue de dormir chez l'accusé, qui lui vole son argent.

En juillet 2013, Samuel Jacques menace de la frapper si elle ne lui donne pas son argent. Une fois, le proxénète lui frappe durement la tête sur le tableau de bord de sa voiture, parce que l'adolescente refuse de voir un client. Elle s'enfuit pour travailler à nouveau à Ottawa avec un autre proxénète. Le 19 août, Samuel Jacques et son ami, le proxénète Marty Antoine, entrent dans la chambre d'hôtel de la victime. Marty Antoine la frappe violemment au visage « C'est ça qui arrive quand tu reviens pas. Quand tu vas être prête, tu m'appelleras pour revenir », lui lance Samuel Jacques.

Mais l'adolescente n'a pas dit son dernier mot : elle cache 350 $ dans sa chambre d'hôtel où elle est contrainte de se prostituer et se réfugie à Calgary. Elle s'y prostitue, seule, pendant deux semaines. Puis elle retourne en Ontario, et Samuel Jacques la contraint de revenir sous son aile. Son premier client la viole. Elle consulte un médecin pour ses blessures.

L'année suivante, la fugueuse de 16 ans s'associe avec son second proxénète pour recruter des jeunes filles. « Elle vit de ses revenus et des leurs. Ainsi, elle devient proxénète elle-même », indique la juge. La victime plaide coupable à des accusations de proxénétisme et de pornographie juvénile en Chambre de la jeunesse en octobre 2014. Elle écope d'une peine pour adulte de deux ans moins un jour.

Dans une autre affaire, Marty Antoine a écopé de cinq ans de prison pour avoir exploité sexuellement des jeunes filles de 12 à 14 ans. Il a ensuite récidivé à sa sortie de prison en forçant de jeunes Montréalaises à se prostituer jour et nuit. Un juge l'a qualifié de « parasite » en le condamnant à neuf ans de pénitencier.

Marty Antoine