(Londres) La militante écologiste suédoise Greta Thunberg a été arrêtée mardi à Londres pendant une manifestation en marge d’une conférence sur le pétrole et le gaz, où elle dénonçait les accords entre le secteur et les responsables politiques.

Plusieurs centaines de manifestants écologistes ont perturbé le premier jour de l’Energy Intelligence Forum, un évènement rassemblant pendant trois jours dans la capitale britannique de hauts dirigeants de l’industrie pétrolière et gazière.

La militante, âgée de vingt ans, a été interpellée en milieu de journée. Elle est coutumière d’actions de blocage, comme à Malmö en Suède, ce qui lui avait valu une amende il y a quelques jours.

En janvier, elle avait été emmenée de force par des policiers hors d’une manifestation contre le recours au charbon en Allemagne.

Dans un communiqué, la police de Londres, sans faire de référence à l’illustre militante écologiste, s’est contentée d’évoquer 20 arrestations pour obstruction de la voie publique.

« Derrière ces portes closes […] des politiciens sans carrure concluent des accords et des compromis avec les lobbyistes du secteur destructeur des combustibles fossiles », avait dénoncé en début de matinée, au cours d’une conférence de presse, Greta Thunberg.

« Nous devons leur répondre »

Les manifestants « qui étaient au coin de la rue ce matin, nous devons leur répondre […] Je pense que ces sociétés, les majors pétrolières et gazières, nous avons tous les atouts, les finances, les personnes pour pouvoir être au cœur de cette transition », a assuré le PDG de TotalEnergies Patrick Pouyanné, qui s’exprimait à la conférence mardi en fin d’après-midi.

Malgré les appels à réduire les énergies fossiles, TotalEnergies avait annoncé fin septembre qu’il comptait « augmenter sa production d’hydrocarbures de 2 à 3 % par an sur les cinq prochaines années », tout en assurant vouloir maintenir « le cap de sa stratégie multi-énergies équilibrée » avec sa forte croissance dans l’électricité renouvelable.

« Nous devons contribuer à la lutte contre le changement climatique », mais pas en arrêtant immédiatement les hydrocarbures « parce que dans la vraie vie, les gens utilisent du pétrole et du gaz tous les jours »,  a ajouté M. Pouyanné, qui s’exprimait en anglais.

Au son d’une cinquantaine de tambours, les manifestants avaient scandé pendant la matinée « arrêtez le pétrole, arrêtez le gaz ! » ou encore « rien ne peut nous arrêter, un autre monde est possible ! ».

« J’ai six petits-enfants. Je fais des cauchemars en pensant à l’avenir qu’ils auront », a dit Doro Marden, une retraitée londonienne de 75 ans.

Le patron de la compagnie pétrolière saoudienne Aramco, Amin Nasser, a réaffirmé au cours de la conférence que « de nouveaux investissements » dans les hydrocarbures étaient nécessaires pour contrer le déclin des champs pétrolifères vieillissants.

Lobbyistes

Quant à Wael Sawan, le patron de Shell, il a fait valoir que sa compagnie essayait d’« assurer la sécurité énergétique ». Mais, en même temps, a-t-il ajouté, « nous voulons être un acteur de la transition énergétique en investissant entre 10 et 15 milliards de dollars au cours des trois prochaines années ».

M. Sawan s’exprimait par lien vidéo, n’ayant pas pu accéder à l’hôtel en raison de la manifestation.  

Shell était revenu en juin sur son engagement de réduire sa production de brut de 1 à 2 % par an, suscitant l’ire des écologistes.

Les manifestants mardi ont aussi dénoncé le fait que le président de la COP28, la conférence annuelle des Nations unies sur le climat prévue pour se dérouler du 30 novembre au 12 décembre à Dubaï, ne soit autre que le patron de la compagnie pétrolière des Émirats arabes unis, Sultan al-Jaber.

« Nous savons que les lobbyistes des énergies fossiles corrompent les procédures des COP depuis des décennies », a ainsi fait valoir avant son arrestation Greta Thunberg, pour qui le choix de ce président « montre très, très clairement » le manque d’ambition de sommets qui ne peuvent pas selon elle « conduire à une réduction drastique des émissions de CO2 ».