(Paris) À Paris, de longues files d’attente se forment devant les établissements qui servent le ramen, la fameuse soupe aux nouilles japonaises, pour le plus grand bonheur de tous les clients étudiants, cadres ou touristes.

Les restaurants proposant ce plat, copieux, réconfortant et pas cher, suscitent un engouement comparable aux « bouillons », ces bistrots typiquement parisiens bon marché, qui servent une cuisine simple à base de produits frais.

Près des Grands Boulevards, iSSHIN Ramen, où se regroupent chaque soir de nombreux jeunes, a ouvert à la place d’un établissement spécialisé dans le burger, un temps à la mode, puis déserté.

Non loin, près du Louvre, Kodawari Tsukiji a mis en place un système de code QR : on le scanne pour réserver une place puis on peut aller se promener en attendant qu’elle se libère, parfois l’attente le week-end dure une heure et demie.

« Attendre pour manger, cela fait partie de la culture japonaise. Les Français ont commencé à trouver intéressantes les files d’attente qu’ils ne supportaient pas avant », s’amuse auprès de l’AFP la Japonaise Reiko Mori, qui vit à Paris depuis 20 ans et est en charge d’une agence de communication dans la gastronomie.

« Il y a un côté très addictif. Il y a toute une culture que les gens découvrent et, grâce à internet, le ramen se propage partout dans le monde », explique Jean-Baptiste Meusnier, ancien pilote de chasse et fondateur de Kodawari, où l’on mange au milieu des bacs de poissons.

Cent cinquante ingrédients

PHOTO CHRISTOPHE ARCHAMBAULT, AGENCE FRANCE-PRESSE

Malgré la simplicité apparente du ramen, c’est un plat complexe qui invite à « beaucoup de créativité ».

Le Français Sedrik Allani a ouvert Neko Ramen en 2020, après s’être formé au Japon : « je voulais un restaurant japonais bon et pas cher comme on en trouve à Tokyo », raconte-t-il à l’AFP.

Malgré la simplicité apparente du ramen, c’est un plat complexe qui invite à « beaucoup de créativité ».

« J’ai trois ramens qui sont vraiment différents les uns des autres. Il y a 150 ingrédients dans un ramen qui coûte 9,50 euros (14 $) », assure-t-il.

Le « secret », c’est le « tare », l’assaisonnement qu’on met au fond de l’assiette avant d’y verser le bouillon et d’ajouter les nouilles, les « toppings » (œufs, poulet mariné…) et l’huile aromatisée (aux légumes, crevettes, sésame noir, ail brûlé…).

Dans les versions basiques, il s’agit de sauce soja, et d’un mélange d’ingrédients qui macèrent longtemps pour obtenir un goût plus sophistiqué. Sedrik Allani met un mois pour le préparer.

Au Japon, il y a des « tare » millésimées, tandis que certains chefs spécialisés dans les ramens sont des vedettes qui font la couverture des magazines et à qui on demande des autographes dans la rue, s’émerveille-t-il.

« C’est une manière “fast-foodienne” de s’alimenter sainement », résume pour l’AFP le chef étoilé français Guy Savoy. Lui-même dit alterner repas gastronomiques et ramen quand il voyage.

Ses quatre Supu Ramen ouverts à Paris avant la COVID-19 ont tous fermé. « J’ai eu trop d’avance », estime-t-il.

Manga

PHOTO CHRISTOPHE ARCHAMBAULT, AGENCE FRANCE-PRESSE

« Il y a toute une culture que les gens découvrent et, grâce à internet, le ramen se propage partout dans le monde », explique Jean-Baptiste Meusnier, ancien pilote de chasse et fondateur de Kodawari Tsukiji.

Traditionnellement fait avec du bouillon de porc, le ramen est d’origine chinoise. Il a été « japonisé » avec la sauce soja et est devenu extrêmement prisé après la Seconde Guerre mondiale pour son côté nourrissant.

À Paris, comme dans d’autres capitales européennes où de jeunes chefs ont succombé à la tentation ramen, on le revisite pour attirer les clients qui ne mangent pas de porc. Jean-Baptiste Meusnier fait ainsi des bouillons de poisson.

Sedrik Allani adapte de son côté la température de ses ramens au palais des Français, qui n’aiment pas les soupes brûlantes comme en Asie.

En dehors de son prix attrayant, le ramen est aussi une sortie emblématique pour les amateurs des mangas tant ce plat y est représenté. Certains y vont même déguisés.

« Quand j’étais enfant, il était très compliqué d’avoir accès aux mangas. Maintenant, il suffit de payer 5 à 10 euros pour Netflix et avoir accès à un catalogue incroyable », ce qui a rendu la culture pop japonaise « accessible », conclut Sedrik Allani.