Le chapeau, cet accessoire intemporel, est de retour. De plus en plus porté, il donne du style et de la personnalité à tous les looks. Regard sur des entreprises montréalaises qui fabriquent ici de très beaux chapeaux.

Canadian Hat: l'indémodable

Selon la femme d'affaires Diane Lanctôt, porter un chapeau rehausse tout de suite une tenue. «C'est si élégant, il faut oser en porter parce que c'est un plaisir, mais aussi un "fashion statement"», affirme la présidente de Groupe Lanctôt, fabricant et distributeur de grandes marques sportives.

Mme Lanctôt avoue avoir eu un vrai coup de coeur pour la société Canadian Hat, qu'elle a achetée il y a deux ans. «C'est extraordinaire, le savoir-faire qu'il y a ici, dans cet atelier qui compte une quinzaine d'employés où tout est fabriqué à la main», dit-elle. Le style de la marque? Des modèles indémodables comme le chapeau Fedora avec une petite plume, en feutre ou en paille. L'entreprise fabrique également des couvre-chefs très luxueux, en fourrure.

Des 20 000 chapeaux fabriqués à Montréal, la moitié sera exportée et vendue à Londres, dans le célèbre grand magasin Harrods, aux États-Unis, au Japon, en Corée du Sud et en Chine. La présidente évoque les grandes marques comme Borsalino en Italie ou Failsworth en Angleterre, qui fabriquent de très beaux couvre-chefs emblématiques. «On a la chance d'avoir Canadian Hat qu'il faut absolument découvrir et encourager», dit-elle.

Porter le chapeau

Été comme hiver, le chapeau revient à la mode. Il est devenu un accessoire qui donne du style et de la personnalité. «On voit qu'il est plus présent dans les défilés de mode et les jeunes en portent beaucoup. L'été, on veut se protéger du soleil, alors on porte de jolis modèles en paille et je pense que, dans les années à venir, on en verra davantage», lance Diane Lanctôt.

Mais comment trouver le bon couvre-chef? «Il y en a pour toutes les têtes, il faut savoir le choisir et bien le mettre sur la tête», lance Ava Harbut, directrice du design et de la fabrication chez Canadian Hat, qui souligne qu'on n'a pas besoin d'un nouveau manteau si on porte un beau chapeau.

Mme Harbut travaille chez Canadian Hat depuis 32 ans. Elle dessine les chapeaux, suit toutes les nouvelles tendances, regarde avec attention les défilés de mode et voyage à la recherche de matières premières: plumes, feutres, paille, tissus et fourrures. «Les belles formes de chapeau reviennent en force, on voit que les bords sont plus grands», observe-t-elle.

Rajeunir son image

Après un siècle d'existence, Canadian Hat doit trouver le moyen de se renouveler: «On a rajeuni l'image, changé le logo et le site internet. Il faut se repositionner, tout en mettant en valeur le fait que les chapeaux sont fabriqués à Montréal», estime Diane Lanctôt.

Même si les ventes sont en croissance, la présidente de Canadian Hat sait qu'elle doit travailler sur le développement de la marque, les réseaux sociaux et le marketing. «Il faut augmenter notre visibilité, dit-elle. Il suffit qu'un seul chapeau se fasse remarquer et ça peut aller très vite, la marque peut exploser!»

D'ailleurs, elle vient d'envoyer un chapeau à Sophie Grégoire et espère qu'elle le portera. «Et si on en envoyait un à Céline Dion? s'amuse-t-elle. Il faut que nos grands artistes portent nos chapeaux!»

Un savoir-faire

Dans l'atelier, il est impressionnant de découvrir les centaines de moules. «Ils datent de toutes les époques, alors quand les modes reviennent, on a tout ici pour les recréer. On pourrait même ouvrir le musée du chapeau canadien ici!», affirme Diane Lanctôt.

Elle estime que les chapeaux ont une âme et une histoire et que les consommateurs doivent comprendre le travail qu'il y a derrière chaque objet. «Il faut reconnaître cette valeur ajoutée et le prix de ce savoir-faire artisanal.»

Diane Lanctôt rêve d'ouvrir une belle boutique avec de grandes baies vitrées qui permettraient aux passants de voir leur fabrication. «Ce serait unique et merveilleux.»

Les prix varient de 120 $ à 250 $ pour les chapeaux en feutre et de 80 $ à 230 $ pour ceux en paille. Pour les articles en fourrure très haut de gamme, les prix peuvent aller jusqu'à 1000 $. Les chapeaux de Canadian Hat sont vendus chez Ogilvy, Simons, La Baie d'Hudson, dans des petites boutiques comme 5e Avenue sur l'avenue Laurier Ouest et dans les hôtels Fairmont partout au Canada.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Ava Harbut, directrice du design et de la fabrication de Canadian Hat, et Diane Lanctôt, présidente de Groupe Lanctôt

Jeunes marques contre-attaquent

Utiliser le savoir-faire traditionnel du chapelier tout en l'amenant dans la modernité. Chacune à sa façon, ces trois jeunes marques montréalaises rendent hommage à l'art de la chapellerie en créant des couvre-chefs de haute qualité au style des plus actuels.

Camille Côté

Passionnée de mode, Camille Côté a toujours aimé créer ses propres designs et vêtements. Après des études en mode au cégep Notre-Dame-de-Foy, à Québec (où elle a suivi un cours de fabrication de chapeaux), et un stage en haute couture à Paris, elle a décidé de lancer son entreprise homonyme de chapeaux pour femmes en 2014. Pourquoi les chapeaux? D'abord pour se démarquer, explique la jeune femme. «Puis le chapeau, ça complète la tenue. Et pour les femmes, c'est un statement, une affirmation de soi de mettre un chapeau.»

Autodidacte, la créatrice utilise dans son atelier d'Hochelaga des méthodes traditionnelles comme des moules en bois et une tête chauffante en métal, mais ose aussi de nouvelles formes qui s'éloignent de la tradition, par exemple en intégrant des bandes élastiques à l'arrière de ses chapeaux en feutre de lapin, un de ses éléments signature. Bref, elle casse le moule.

Sa marque, distribuée depuis l'an dernier dans les boutiques Simons, connaît un beau succès. Si ses deux premières collections affichaient une esthétique davantage inspirée de l'univers haute couture, sa dernière est plutôt «prêt-à-porter», mais toujours originale. Soulignons au passage l'utilisation d'une mannequin plus âgée que celles que l'on voit habituellement pour représenter sa collection actuelle. «C'est important pour moi. J'aime mettre des femmes différentes de l'avant, pas nécessairement celles qui me ressemblent. Pour moi, la mode est plutôt un reflet des autres que de soi-même», souligne la designer qui prépare déjà sa collection printanière, laquelle mettra en vedette des chapeaux de paille.

Les créations de Camille Côté sont en vente chez Simons, Lowell et Des vertes et des pas mûres.

Gavoha

Une esthétique inspirée des années 50, des chapeaux fabriqués dans le plus pur respect de la tradition, un esprit unisexe résolument contemporain. Voilà l'ADN de la toute jeune marque Gavoha, un projet des amis de longue date Maxime Abissidan (styliste et coiffeur) et Emanuel Cohen (directeur de création).

«Emmanuel et moi, nous avons toujours été très créatifs et manuels, en modifiant les vêtements à notre façon, par exemple. Personnellement, j'ai toujours porté des chapeaux, mais je n'en ai jamais vraiment trouvé comme je voulais exactement», raconte M. Abissidan. Après qu'on lui eut présenté un chapelier, il a commencé à fabriquer ses propres chapeaux, lesquels ont vite attiré l'attention de son entourage. C'est ainsi que les acolytes ont eu l'idée de lancer leur propre gamme.

Les deux créateurs dessinent tout de A à Z, puis font fabriquer leurs chapeaux dans une usine de chapellerie qui existe depuis 1895. Ils puisent leur inspiration dans les années 50, une époque qu'ils affectionnent particulièrement, tout en amenant le design au goût du jour - une esthétique bien représentée par l'expression «future nostalgie», employé sur leur site web.

La jeune marque - qui a des visées internationales - attire déjà l'attention; elle a réalisé une collaboration exclusive de deux modèles de chapeaux de style Fedora avec Men of the World, une plateforme web new-yorkaise destinée aux hommes. Pour le moment, deux modèles unisexes en feutre de lapin (le Bréchet et le Trooper) sont offerts, mais de nouveaux modèles devraient être commercialisés dès le mois prochain.

Les chapeaux Gavoha sont vendus en ligne seulement.

Heirloom Hats

Samantha-Tara Mainville a toujours adoré les chapeaux. Celle qui a étudié en mode au collège LaSalle a commencé à en faire de façon autodidacte, puis a parfait son art en suivant une formation avec Lucie Grégoire (Comme un chapeau), tout en faisant un DEP en design de patron. Après beaucoup de recherche, d'essais et d'erreurs, elle a lancé Heirloom Hats en septembre 2015 et propose une gamme de chapeaux entièrement conçus et fabriqués à la main dans son atelier de Montréal.

La créatrice utilise des méthodes traditionnelles de chapellerie - dont des formes en bois, difficiles à trouver, qu'elle a dénichées dans la succession d'une chapelière de Toronto - tout en inscrivant ses chapeaux dans la modernité. «Mon style est assez minimaliste, mais avec un peu de punch dans les formes. J'essaie de proposer des styles différents de ceux qui se retrouvent dans les grandes surfaces et qui ne sont pas faciles à répliquer.»

Sa première collection, toujours en vente, propose plusieurs modèles unisexes noirs ou gris, fabriqués en feutre de lapin ou encore en polyester matelassé. Pour le printemps, la designer dit travailler à une collection qui explorera de nouvelles avenues, avec notamment des chapeaux en paille et des couleurs pâles.

Les chapeaux Herloom Hats sont en vente en ligne et chez Mylène B (5259, boulevard Saint-Laurent).

Photo fournie par Camille Côté

Un chapeau signé Camille Côté.