Marina Stakusic a marqué les esprits à la plus récente Coupe Billie Jean King, en novembre. Comme une extraterrestre venue de l’au-delà, cette inconnue de 19 ans a permis au Canada de remporter son premier titre mondial du côté féminin, grâce à trois victoires en quatre matchs. Puis, plus rien.

Pendant quatre mois, nous avons été sans nouvelles de l’athlète de Mississauga. Quelques publications sur les médias sociaux, mais c’est à peu près tout.

Comment un diamant inespéré, dans un contexte particulièrement instable pour le tennis canadien, pouvait-il disparaître ainsi des écrans radars après une entrée en matière aussi fracassante ?

« Après la Coupe BJK, j’ai dû négocier avec quelques blessures et entamer un processus de réadaptation. Compétitionner, c’est ce que j’aime le plus faire. Je me suis promenée entre le Canada et la Floride pour m’entraîner », a-t-elle confié à La Presse.

Cette blessure aux abdominaux l’a empêchée de surfer sur la vague de la Coupe Billie Jean King. Du jour au lendemain, elle est sortie de l’anonymat, mais elle a été incapable d’en profiter. Devant le monde entier, elle a montré pourquoi et comment elle pouvait non seulement battre des adversaires bien mieux classées, mais aussi briller sur une scène sur laquelle elle n’avait jamais été invitée auparavant.

Cependant, elle a dû attendre quatre mois avant de renouer avec l’action. C’est comme si elle avait dû faire ses preuves à nouveau.

C’était très frustrant. Ce n’est jamais plaisant de devoir négocier avec des blessures, en particulier après avoir bien conclu la dernière saison.

Marina Stakusic

Si la blessure aux abdominaux a traîné, retourner dans l’ombre après avoir été sous les projecteurs de manière si instantanée a écorché son moral. « Mentalement, ce n’est pas évident d’arrêter après avoir connu une séquence aussi fructueuse, c’est dur de garder la motivation. J’ai fait de mon mieux pour passer à travers. »

Retour à San Diego

Stakusic est revenue au jeu il y a deux semaines à San Diego. La jeune sensation canadienne s’était lancé un défi de taille en reprenant le collier dans un tournoi très compétitif. Des joueuses comme Jessica Pegula, Beatriz Haddad Maia et Marta Kostyuk étaient inscrites à cet évènement de catégorie 500.

« J’avais vraiment très peu d’attentes, mais d’aller dans un gros tournoi comme celui-là allait me donner beaucoup de motivation, plus que si j’avais joué dans un petit tournoi », a souligné la 221e joueuse au classement mondial.

Avec un peu de recul, elle dresse un bilan positif de son passage en Californie.

« Bien franchement, en allant au tournoi, je ne me sentais pas particulièrement bien, mais dès que je suis retrouvée sur le terrain, quelque chose s’est passé. Ça a complètement changé. »

PHOTO MANU FERNANDEZ, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Marina Stakusic

À son match de premier tour, après avoir disputé deux rondes de qualifications, elle a battu une autre qualifiée, Marina Melnikova, en trois manches. « J’ai même été un peu surprise, car même mes entraîneurs se demandaient ce qui venait de se passer. J’imagine que je suis revenue au bon endroit au bon moment », a-t-elle insisté.

Puis, contre Donna Vekić au deuxième tour, la Canadienne s’est inclinée en trois manches. Malgré la défaite, Stakusic est satisfaite de ce qu’elle est parvenue à offrir contre la septième tête de série et tombeuse d’Aryna Sabalenka la semaine précédente à Dubaï.

« C’était assez égal et partagé pendant tout le match. Nous avons joué de gros points, on s’est bien battues et franchement, ça aurait pu aller d’un bord ou de l’autre. Je me suis fait briser au troisième set. J’aurais seulement eu besoin de quelques matchs supplémentaires derrière la cravate pour garder le rythme. Évidemment, elle est très expérimentée, donc en fin de compte, c’est là qu’elle a eu l’avantage. »

De nouveaux objectifs

Son horaire des prochaines semaines n’était pas encore défini au moment de l’entrevue. Sa seule certitude est de se retrouver dans les qualifications du tournoi de Roland-Garros au mois de mai. Sa première présence en tournoi du Grand Chelem.

Stakusic espère cependant s’éloigner de plus en plus du processus de qualifications au cours de la saison. Son objectif prioritaire en 2024 est d’intégrer le top 100 le plus rapidement possible, justement pour entrer dans les tableaux d’importance avec plus d’aisance.

Plus elle jouera, plus elle affrontera des joueuses capables de la repousser dans ses derniers retranchements. Avec la Coupe Billie Jean King, elle croit s’être fait un nom sur le circuit.

Je sais que plus de gens me connaissent maintenant et reconnaissent mes qualités de joueuse.

Marina Stakusic

En revanche, elle aspire surtout à montrer que ce n’était pas un feu de paille. C’est pourquoi elle veut que la route jusqu’au sommet soit ardue, et pourquoi pas parsemée de quelques pièges. Simplement question d’arriver en haut avec la certitude d’avoir mérité sa place.

« Quand je joue contre des joueuses meilleures que moi, je suis capable d’élever mon jeu d’un cran. C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai décidé d’aller à San Diego. Quand je joue contre de meilleures joueuses, je joue naturellement mieux. »

Entre-temps, elle essaiera de rester en bonne santé, de gagner des matchs de tennis et de rester dans la lumière, car c’est sous les projecteurs qu’elle se sent le mieux.