(Genève) L’octroi de la Coupe du monde de soccer au Qatar il y a 12 ans fut une erreur, a déclaré mardi le président de la FIFA à l’époque, Sepp Blatter, rappelant de nouveau que la rencontre entre Nicolas Sarkozy et Michel Platini pourrait avoir influencé l’issue du scrutin.

Blatter, qui est âgé de 86 ans, a émis ces commentaires au conglomérat médiatique suisse Tamedia à l’occasion de sa première entrevue d’envergure depuis qu’il a été blanchi avec Platini en juillet des accusations d’inconduite financière chez la FIFA à la suite d’un procès criminel en cour fédérale.

« Ce pays est trop petit, a dit Blatter au sujet du Qatar, le plus petit en termes de taille depuis la tenue de la Coupe du monde en Suisse en 1954. Le soccer et la Coupe du monde sont trop imposants pour sa taille. »

Les 32 équipes disputeront 64 rencontres dans huit stades construits à Doha et dans sa périphérie. La ville qatarie s’est d’ailleurs métamorphosée depuis 2010 en raison des nombreux projets pharaoniques mis en chantier en vue de la Coupe du monde.

Les matchs seront présentés à compter du 20 novembre, et environ 1,2 million de spectateurs en provenance de l’étranger doivent visiter le Qatar pendant la Coupe du monde. En raison de l’offre d’hébergement limitée au Qatar, plusieurs d’entre eux devront faire des aller-retour quotidiens à partir des pays limitrophes.

« C’était une mauvaise décision. Et j’en suis responsable puisque j’étais président à l’époque », a confié Blatter, qui avait déjà déclaré avoir voté pour les États-Unis. La candidature américaine a été battue par celle du Qatar lors du dernier tour du scrutin réunissant cinq pays candidats en vue du tournoi de 2022.

Le point de bascule qui a fait dérailler la candidature des États-Unis s’est produit lorsque Sarkozy a organisé une rencontre à Paris pendant la semaine qui a précédé le scrutin du comité exécutif de la FIFA le 2 décembre 2010.

Platini, alors le président de l’UEFA et vice-président de la FIFA, a été invité par Sarkozy, alors président de la France, à sa résidence officielle. Le prince héritier du Qatar, aujourd’hui l’émir, cheikh Tamim ben Hamad Al Thani, était aussi présent.

Blatter a répété mardi ses allégations au sujet de Sarkozy, qui aurait tenté d’influencer Platini, et a de nouveau livré sa version du coup de fil que lui aurait passé Platini après la rencontre à Paris pour lui dire que le processus du scrutin pour l’octroi de la Coupe du monde avait changé.

« Grâce aux quatre voix de Platini et de son équipe (de l’UEFA), la Coupe du monde a été octroyée au Qatar plutôt qu’aux États-Unis. C’est la vérité », a évoqué Blatter au sujet du scrutin qui s’est terminé 14-8 en faveur du pays du Moyen-Orient.

Dans un entretien accordé à l’Associated Press (AP) en 2015, Platini avait confirmé l’importante de la rencontre à Paris dans l’issue du scrutin.

« Sarkozy ne m’a jamais demandé de voter pour le Qatar, mais je savais que ce serait préférable », avait dit Platini à l’AP à Zurich il y a sept ans. Il avait aussi admis qu’il « aurait pu » avoir dit aux dirigeants américains qu’il allait voter en faveur de leur candidature pour 2022.

Blatter n’a cependant pas fait allusion aux critiques relatives au travail forcé et aux droits humains bafoués au Qatar depuis 2010.

Il s’est cependant demandé pourquoi son successeur au poste de président de la FIFA, Gianni Infantino, est déménagé au Qatar il y a de ça au moins un an.

Blatter a pris connaissance des nombreuses requêtes des groupes humanitaires et de certaines fédérations membres de la FIFA — dont l’Angleterre et les États-Unis — en faveur de la création d’un fonds d’indemnisation pour les familles des travailleurs qui ont été blessés ou qui sont décédés pendant les préparatifs en vue de la Coupe du monde. Le gouvernement du Qatar a toujours nié l’existence du problème, et ajouté qu’il s’agissait « d’un coup d’éclat publicitaire ».

« Qu’est-ce que la FIFA peut faire si son président se trouve dans le même bateau que le Qatar ? », a questionné Blatter au sujet d’Infantino, qui a choisi d’habiter au Qatar.

La FIFA n’a toujours pas répondu aux requêtes afin d’obtenir des commentaires au sujet de l’entrevue accordée par Blatter.