« Camaraderie ». « Confiance ». « Excitation ». « Fraternité ». Autant de mots qui sortent de la bouche d’Alistair Johnston lorsqu’il est question de son équipe nationale canadienne.

« On se texte tout le temps, pas seulement quand il y a les fenêtres internationales de 10 jours », explique le défenseur du CF Montréal et du Canada.

« Si un de nos gars s’apprête à jouer un gros match, tout le monde écrit dans la discussion de groupe et lui envoie de bons messages. On est tellement devenus de bons amis à travers tout ça. C’est un aspect que les gens oublient souvent, je pense. »

Les hommes de John Herdman se retrouvent cette semaine pour les tout derniers matchs de qualifications pour la Coupe du monde au Qatar, en novembre prochain. Le Canada est toujours invaincu après 11 matchs dans l’Octogonale. Le tour est déjà presque joué. Une victoire jeudi contre le Costa Rica, et le Canada y est. Il y a même des possibilités de qualifications en cas de match nul ou de défaite, moyennant des résultats favorables ailleurs.

Juste avant leurs retrouvailles, La Presse s’est entretenue avec le défenseur du CF Montréal, entre deux rencontres du calendrier congestionné du club.

PHOTO TIRÉE DU COMPTE INSTAGRAM D’ALISTAIR JOHNSTON

À 23 ans et seulement un an après avoir fait ses débuts avec l’équipe canadienne, Alistair Johnston est rapidement devenu l’un de ses piliers défensifs.

L’entraînement du CF Montréal vient de se terminer au Centre Nutrilait lorsque votre représentant du quotidien arrive sur les lieux en ce début d’après-midi de la mi-mars. Sebastian Breza discute paisiblement sur le trottoir de l’avenue Letourneux. Victor Wanyama se prépare à entrer dans sa voiture, déposant sa tasse de café sur le capot de son bolide.

Et Alistair Johnston nous attend calmement sur une chaise pliante au coin d’un des terrains d’entraînement. Son sourire habituel et honnête nous accueille chaleureusement. Tout comme ce soleil qui offre, enfin, une bonne dose de sérotonine.

Si une telle température occupe le terrain du BMO Field de Toronto le 27 mars prochain, le défenseur ne détonnera peut-être pas autant qu’en novembre dernier, lorsqu’il avait porté des manches courtes dans le froid glacial d’Edmonton contre le Costa Rica.

« Avec ce soleil, je n’aurai peut-être même pas besoin de porter des manches tout court ! », lance Johnston en riant lorsqu’on y fait allusion.

Mais avant le match contre la Jamaïque à Toronto, il y a un nouvel affrontement contre le Costa Rica, à San José cette fois. Le Canada jouera ensuite son tout dernier match de la phase qualificative le 30 mars, au Panamá.

On sait que ce ne sera pas facile. Le Costa Rica et le Panamá se battent pour leur survie. Ils ont besoin de tous les points qu’ils peuvent aller chercher.

Alistair Johnston

Il reste que le but premier est de « faire le travail » lors du premier match.

« On s’est mis dans une superbe position. Ça nous excite. On aimerait s’en occuper tout de suite, au Costa Rica.

« On veut s’enlever de la pression pour le match contre la Jamaïque et apprécier l’ambiance à Toronto. Parce que premièrement, Toronto sait comment organiser un party. Et deuxièmement, parce que les Jamaïcains aussi savent comment organiser un party. Ça sera une bonanza ! »

Trouver ses repères entre deux systèmes de jeu

Johnston a été acquis dans l’entre-saison par le CF Montréal, en provenance du Nashville SC. Il joue principalement au centre droit dans une défense à trois, ou à droite dans une défense à quatre.

Au sein d’un effectif rempli de compatriotes canadiens, il a notamment rejoint son collègue aux remparts de l’unifolié, Kamal Miller. Une association de longue date qui sert autant le club que la sélection… même s’il concède qu’il est encore en train de trouver ses repères sous les ordres de Wilfried Nancy.

Mais ça viendra, assure-t-il. Le nombre de matchs disputés – et les blessures qui ont suivi – a fait en sorte qu’il y a eu beaucoup de rotation dans l’effectif montréalais.

« En tant que défenseur, la chimie se trouve avec le temps. Je joue avec Rudy [Camacho], avec Joel [Waterman], et évidemment, j’ai déjà beaucoup joué avec Kamal. Il suffit de trouver la connexion. Par exemple, si je mets le pied ici, je sais exactement où mon coéquipier ira. Et ça, ça se développe avec le temps. »

Le système de Nancy impose beaucoup de « responsabilités » à ses défenseurs centraux, selon Johnston, qui ne s’en plaint pas du tout.

« La nouvelle génération de défenseurs, on n’est plus seulement des menaces aériennes. L’entraîneur veut qu’on joue avec intensité, qu’on prenne des risques. Évidemment, si tu joues avec le feu, tu te brûles de temps en temps. »

Mais lorsque l’équipe est dans ses beaux jours, « on fait flèche de tout bois ».

« Quand Kamal et moi pouvons monter et descendre, ça cause beaucoup de problèmes à l’équipe adverse. Tu forces les ailiers et les attaquants à défendre, et c’est la dernière chose qu’ils veulent faire. »

À 23 ans et seulement un an après avoir fait ses débuts avec l’équipe canadienne, Johnston est rapidement devenu l’un des piliers défensifs de John Herdman.

Le plan tactique de son sélectionneur a des similitudes avec celui de Nancy, estime le défenseur.

« Ce sont deux systèmes avec une bonne intensité. […] On veut s’avancer et faire en sorte que les équipes adverses vont faire des erreurs. »

Mais où le schéma de Herdman diverge, c’est dans le service rapide aux créatifs joueurs canadiens plus avancés sur le terrain. Chez Nancy, « on cherche à absorber et jouer de l’arrière ».

« [Herdman] veut qu’on envoie le ballon à nos frondeurs [mavericks], nos ailiers. Tajon Buchanan, Alphonso Davies, Sam Adekugbe : on laisse ces gars aller en bataille à un contre un. Quand tu as du talent comme ça, tu veux lui donner le ballon le plus rapidement possible. »

PHOTO PATRICK WOODBURY, ARCHIVES LE DROIT

Sam Adekugbe (3)

Évidemment, Davies ne pourra prendre part aux prochains matchs du Canada, lui qui se remet encore de sa myocardite. L’unifolié n’avait pas trop été incommodé lors des derniers matchs cet hiver, remportant les trois rencontres de janvier et février, mais il est certain que son absence fait mal à l’équipe.

« C’est le meilleur latéral gauche au monde, estime Johnston. C’est le meilleur joueur de la CONCACAF. Il change le match dès qu’il entre en jeu. Je suis sur le côté droit, et si je regarde à gauche, je peux voir l’ailier droit, le latéral droit et le défenseur droit adverses concentrés sur lui. Ça ouvre mon côté complètement.

« Son dynamisme, son athlétisme et son talent avec le ballon peuvent faire chavirer un match. »

Après Koné, Choinière et Breza ?

Le fil conducteur de notre entretien avec Johnston sur la pelouse humide du Centre Nutrilait, c’est sa propension à créditer la belle « fraternité » qui s’est développée au sein des joueurs du Canada.

Cette union, jumelée à la profondeur de la sélection formée par Herdman, permet à des joueurs un peu moins connus de l’effectif de prendre la place sans problème lorsqu’un joueur de premier plan doit s’absenter.

Johnston note l’exemple d’Adekugbe, qui remplaçait Davies à gauche il y a quelques semaines.

« Il a prouvé à bien du monde qui ne le connaissait pas à quel point c’est un bon joueur. Il a eu un camp incroyable. » 

On a cette confiance en notre profondeur qui permet de remplacer n’importe qui dans l’alignement.

Alistair Johnston

Dans cet ordre d’idées, on demande à Johnston lesquels de ses coéquipiers canadiens avec le CF Montréal il verrait bientôt s’imposer au sein de l’équipe nationale.

Il répond sans hésitation.

« Il y a tellement de talent qui s’en vient, ici. Je suis un grand fan de Mathieu Choinière. Il est tellement polyvalent. Il peut jouer latéral gauche ou droit, et il est constant. »

Avant même qu’il ne soit rappelé officiellement dimanche, Johnston vantait les qualités d’Ismaël Koné, jeune milieu de terrain qui a fait ses débuts professionnels en 2022 à Montréal.

« Il est extrêmement athlétique, intelligent, il peut s’avancer et prendre des risques. »

PHOTO NATHAN RAY SEEBECK, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Ismaël Koné (à droite)

Le gardien Sebastian Breza fait aussi partie de l’énumération du défenseur canadien. « Il a été fabuleux » récemment, dit-il.

« Ce qui est bien pour eux, c’est qu’ils s’entraînent avec Kamal, Sam Piette et moi tous les jours. Nous sommes des gars qui jouons des minutes avec le Canada. Ils peuvent se dire que non seulement ils ont leur place sur le terrain, mais qu’il n’y a pas une grande différence entre eux et nous, si même il y en a une. »

Et si ce n’est pas pour 2022, il y a aussi la Coupe du monde de 2026 que le Canada coorganisera, rappelle-t-il.

« Quel meilleur carburant pour se motiver que de vouloir faire partie de l’alignement dans quatre ans ? »

Une passion qui crève l’écran

Avant de laisser Johnston profiter de la première belle journée du printemps montréalais, on lui demande ce qu’il souhaite voir ressortir des trois derniers matchs de qualifications du Canada.

« J’aimerais que les gens voient l’émotion dans les visages des joueurs. Qu’ils voient à quel point c’est important pour nous. Regardez les gars sur le banc. Ils seront debout, ils vont courir vers les échauffourées, vers les célébrations de but. C’est ça qu’on veut que les fans réalisent : on veut qu’ils voient à quel point ce groupe est soudé.

« On se bat pour notre pays. On adore le représenter. On sait à quel point on est chanceux. On veut écrire une nouvelle histoire pour notre pays et pour le monde du soccer. Sautez dans le train en marche ! »

Canada c. Costa Rica, jeudi à 22 h 05 au stade national du Costa Rica, à San José