Attirée par cette vingtaine de caméramen, photographes et journalistes, la foule grossissait devant la porte des arrivées de l'Eurostar, à la très occupée gare internationale St. Pancras, mardi après-midi.

Qui est-ce? demandaient des curieux en sortant leur téléphone intelligent. Non, ce n'était ni Mark Cavendish ni Bradley Wiggins.

Quelques-uns connaissaient le nom de Ryder Hesjedal, le grand mince qui a débarqué du train en provenance de Bruxelles. Lunettes rouges sur sa tête blonde, bermudas bleus à carreaux, bas blanc aux genoux, le cycliste de Victoria a franchi les portes en tirant ses valises à roulettes. Il les a laissées à sa femme Ashley avant d'être aspiré dans une mêlée gentiment désordonnée.

Le vainqueur du dernier Giro a été un peu surpris par l'accueil qui lui a été réservé pour ses troisièmes Jeux olympiques. «C'est excitant... et un peu déroutant», a dit Hesjedal, qui arrivait de Lille après avoir remporté la veille le critérium de Roulers, en Belgique, l'une de ces courses arrangées où les vedettes du Tour de France vont monnayer leur présence.

Remis de sa chute au Tour de France

Satisfait de sa forme, Hesjedal s'est dit pleinement remis de la chute qui l'a forcé à l'abandon après la sixième étape du Tour, il y a un peu moins de trois semaines. «Je me sens bien, j'ai eu de bonnes journées», a souligné celui qui a subi des éraflures et une blessure à la jambe gauche. «Je me suis entraîné comme un malade et on verra ce que ça va donner.»

Trois jours après l'accident, le cycliste de 31 ans est retourné sur le rouleau à sa résidence de Gérone, en Espagne. Dès le lendemain, il reprenait la route. «Je me suis entraîné vraiment fort, a-t-il précisé. Je connais les routes de Gérone, je connais les sensations, je sais ce que dit mon capteur de puissance. Toutes les mesures sont bonnes. J'étais au sommet de ma forme au Tour. Je crois n'avoir rien perdu de cette condition. [...] Je suis même encore plus confiant en mes habiletés pour ces épreuves d'un jour.»

Unique représentant du Canada pour la course sur route de samedi, Hesjedal sait qu'il aura besoin de chance pour s'illustrer. Il souhaite que l'épreuve soit «la plus dure possible « avec l'espoir de compléter les 250 kilomètres au sein d'un petit groupe d'échappés. «À partir de là, il n'y aura plus beaucoup de gars avec des coéquipiers.»

Évidemment, les Britanniques auront une autre idée en tête. Après les neuf ascensions de la côte Box Hill, dans le Surrey, Wiggins, son dauphin Chris Froome, David Millar et Ian Stannard auront 50 kilomètres pour emmener l'irrésistible Cavendish vers un sprint sur l'avenue The Mall, devant le palais de Buckingham.

« Les Britanniques ont clairement démontré comment ils sont forts», a reconnu Hesjedal, qui a assisté au sacre historique de Wiggins à Paris dimanche dernier. «Ils prendront l'initiative, ils contrôleront la course. Ce sera donc tout le monde contre eux s'ils adoptent cette position et on verra ce qui va arriver.»

Pas d'illusions

Vétéran des Jeux d'Athènes (vélo de montagne) et de Pékin, où il avait animé l'échappée du jour avant de rallier l'arrivée au 55e rang, Hesjedal ne se fait pas d'illusions pour Londres, où il disputera aussi le contre-la-montre.

«Je ne dirais pas que je suis un des favoris, a-t-il dit. Il y a plusieurs gars qui tiennent le haut de l'affiche. En tant que one-man-show, je n'ai pas vraiment besoin d'être un favori. Je dois me servir d'autres coureurs qui prendront cette responsabilité et je vais tenter ma chance.»

Hesjedal a répondu à quelques autres questions avant de se diriger vers la sortie, suivi d'une nuée de photographes. Il a signé des autographes à deux enfants, a placé son sac à vélo dans le coffre de la voiture de l'équipe canadienne avant d'ouvrir la porte du côté droit pour s'asseoir à l'avant. Il avait oublié qu'il était en Angleterre.