À seulement 21 ans, Jordan Spieth est entré dimanche dans l'histoire du golf en remportant le 115e Omnium des États-Unis au club de Chambers Bay dans l'État de Washington. Le Texan a su attendre son heure, et attendre encore que son rival Dustin Johnson gâche sa dernière chance sur le vert du 18e trou, pour célébrer une victoire dramatique.

Spieth est seulement le sixième joueur à remporter le Tournoi des Maîtres et l'Omnium des États-Unis la même année, le premier depuis Tiger Woods en 2002. Il est aussi le plus jeune champion de son omnium national depuis le légendaire Bobby Jones, en 1923.

La victoire a toutefois été longue à se dessiner. Spieth avait amorcé la journée à égalité au premier rang avec son compatriote Dustin Johnson, l'Australien Jason Day et le Sud-Africain Branden Grace. Longtemps mené par Johnson, puis à égalité avec son partenaire de jeu Grace, Spieth croyait avoir fait le plus dur au 16e, quand il avait réussi un oiselet, alors que Grace commettait un double boguey.

Mais il a enchaîné avec un double boguey sur le 17e, revenant ainsi à égalité au premier rang, cette fois avec le Sud-Africain Louis Oosthuizen. Spieth a gardé son calme et a réussi deux coups superbes au 18e trou pour se donner une chance d'aigle. Son premier coup roulé est resté à quelques pouces de la coupe, mais l'oiselet lui a redonné le premier rang, avec une dernière ronde de 69 et un cumulatif de 275 (-5).

Johnson n'avait toutefois pas dit son dernier mot. Malgré trois bogueys sur le neuf de retour, il n'était qu'à un coup du meneur (après un oiselet au 17e) et avait lui aussi un coup roulé d'une douzaine de pieds au 18e trou pour un aigle. Il l'a raté, puis le suivant aussi (de moins de trois pieds), laissant à Spieth un titre qui semblait lui être promis.

«Je suis en état de choc», a noté le champion en quittant la roulotte des officiels. «Je croyais devoir jouer en prolongation et je suis vraiment désolé pour Dustin (Johnson). Mais en même temps, je ne pourrais être plus heureux. J'avais dit à mon père que je lui offrirais le trophée pour le fête des Pères et je vais pouvoir le faire!»

Interrogé sur la suite de la saison et sur ses chances de gagner d'autres tournois majeurs, Spieth a répondu: «Je pense déjà à l'Omnium britannique, qui sera joué à St. Andrews, un parcours où tout le monde rêve de l'emporter. Je crois que j'aurai de bonnes chances de le faire si je peux avoir une bonne préparation.»

Les regrets de Johnson, Oosthuizen, McIlroy, Scott...

Johnson aura de la difficulté à se remettre d'une telle défaite. C'était la quatrième fois qu'il jouait dans le dernier groupe en ronde finale d'un tournoi majeur et il n'en a toujours pas remporté un. L'un des plus longs cogneurs du circuit, sa puissance l'a avantagé à Chambers Bay, et il n'aura peut-être pas souvent d'occasions aussi belles de «briser la glace».

Oosthuizen, qui avait joué 77 en première ronde, a pour sa part bien failli gagner sa place en prolongation, voire enlever le titre, grâce à une spectaculaire poussée de six oiselets sur les neuf derniers trous, qui lui a permis d'enregistrer un 67 et de compléter la compétition à 276 (-4).

«J'aimerais pouvoir reprendre quelques coups de cette première ronde, a-t-il commenté. Et encore aujourd'hui, cela a été très laborieux sur le premier neuf. Je savais que je devais faire quelque chose de spécial... Malheureusement, cela n'a pas été suffisant...», a conclu Oosthuizen, qui s'est finalement contenté d'un nouveau record de 29 sur un neuf final en tournoi majeur.

On disait dimanche qu'il faudrait un miracle pour que Rory McIlroy revienne dans lutte et il a bien failli se produire! Après le 14e trou, le no 1 mondial se retrouvait à -6 pour sa ronde et pensait bien retrancher deux autres coups à la normale en fin de ronde. Cela lui aurait permis d'établir une marque record de 62 en tournois majeurs.

«J'ai plutôt joué deux bogueys et toutes mes chances se sont envolées, a-t-il souligné. En fait, j'avais perdu le tournoi plus tôt cette semaine, sur les verts surtout, car je n'avais sans doute jamais aussi bien frappé la balle en tournoi majeur, du tertre au vert.

«C'est frustrant, parce que j'ai vraiment l'impression d'avoir laissé échapper ce titre, mais je sais que je serai compétitif lors des deux derniers tournois majeurs de la saison.» McIlroy défendra justement ses titres à l'Omnium britannique, dans moins d'un mois à St. Andrews, puis en août au Championnat de la PGA.

L'Australien Adam Scott a lui aussi flirté avec le miracle, réussissant la meilleure ronde du tournoi, un 64, qui a lui a permis de revenir au quatrième rang (-3). Scott a réussi six oiselets sans commettre un seul boguey, mais il avait amorcé la ronde finale trop loin du quatuor de tête. Un autre Australien, le jeune Cameron Smith (21 ans), a aussi complété le tournoi à 277 (-3) et il était l'un des rares joueurs satisfaits de sa journée; sa quatrième place lui vaudra en effet des invitations pour plusieurs tournois majeurs.

Pas moins de 22 joueurs ont réussi des rondes de moins de 70 dimanche, les organisateurs ayant de toute évidence tenu compte des nombreuses critiques formulées depuis le début de l'Omnium. Mike Davis et les dirigeants de la USGA ne pouvaient toutefois rien faire pour corriger l'état des verts en dernière ronde et les joueurs n'ont pas caché leur frustration.

L'Américain Billie Horschel, pourtant auteur d'un 67, a déclaré: «J'ai perdu beaucoup de respect pour la USGA cette semaine. Aujourd'hui (dimanche), j'ai frappé plusieurs bons coups roulés qui ont bondi un peu partout dans le monde! Cela a été une semaine très frustrante pour tous les joueurs.

«Les gens vont dire que nous nous plaignons tout le temps, mais ce n'est pas vrai et quand nous le faisons, ce serait important que les gens concernés nous écoutent...»

Tout autant que la victoire de Spieth, sinon plus, c'est du parcours de Chambers Bay que les amateurs se souviendront quand on parlera du 115e Omnium des États-Unis. Et malheureusement pas pour les bonnes raisons.